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frédéric goaty

  • LIRE LA MUSIQUE 12

    Entre 2009 et 2012, Lire la musique, ma chronique (transverse) fut publiée dans Le Magazine des Livres aujourd'hui disparu. En voici le feuilleton complet.


     

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    HOMMAGE AU PRINCE

     

    Que savons-nous de Prince hormis ce que le maître du funk global nous donne à voir et à entendre depuis 1978, année de la parution de For You ? Les confessions sont minces et la perspective d’une autobiographie n’est pas à l’ordre du jour. Au secours de notre curiosité, deux fans viennent de publier le vade-mecum idéal, nourri de faits, de réflexions et d’enthousiasme. Un dictionnaire gros de plus de deux cents entrées, encadré d’une préface de Nile Rodgers (guitariste du groupe Chic, producteur de David Bowie et de Madonna, entre bien d’autres) et d’une postface de George Clinton, icône du funk.

     

    Christophe Geudin et Frédéric Goaty sont deux funkateers accentués d’une culture sans barbelés dans les domaines du rock et du jazz. Ce sont des prosélytes parfaits, amoureux de ce dont ils parlent et équipés de plumes alertes. Ils savent ce qu’écrire veut dire et leur dictionnaire est une leçon de respect pour les lecteurs qui ne viennent pas qu’à la pêche d’une bonne anecdote sur le bon Prince. Ce livre n’est pas la célébration aveuglée (hagiographique, ne dit-on pas ?) d’un héros musical multi-instrumentiste ayant vendu cent millions d’albums en trente ans. Nos funkateers auraient pu aisément broder le tapis rouge qu’on déroule au pied des marches de Paisley Park, « le Xanadu princier ». Trop niais. Au lieu de céder aux encens, ils questionnent. Ils interrogent les zones floues : religion, politique, communication. « C’est fou ce que cet homme a l’air seul », écrivent-ils.

     

    Ils mettent en évidence le don total (Prince est un « performer sans égal et sans rival ») hérité du jazz. Le jazz est la référence originelle du kid de Minneapolis. Son père était pianiste de jazz. Prince avoue une dilection pour Miles Davis, Duke Ellington, ces paradigmes du potlatch. Christophe Geudin et Frédéric Goaty à l’affût de la moindre confidence sont surtout des exégètes sonores, le premier fut rédacteur en chef de Recording Musicien, le second est directeur de la publication de Jazz Magazine. Ils ont ainsi connecté tous les liens qui unissent Prince à Carlos Santana, James Brown, Sly Stone, Jimi Hendrix et Joni Mitchell.

     

    On sait désormais que Prince, lorsqu’il est parisien (mais ne le deviendra-t-il pas un jour vraiment ?) fréquente la Maison du Chocolat sise rue François Premier et qu’il compte dans ses bagages Frédéric Yonnet, surnommé le « Jimi Hendrix de l’harmonica » par l’humoriste quatre étoiles David Chapelle, petit-fils de Jacques Yonnet (auteur de Rue des Maléfices, Chronique secrète d’une ville, éditions Phébus, avec photographies de Robert Doisneau), ce flâneur des deux rives que je juche au sommet de la Tour Eiffel des piétons de Paris avec Léon-Paul Fargue, André Hardellet , Alexandre Arnoux et Clément Lépidis. On sait et l’on apprend en écoutant 20 Ten, l’album que l’on a eu la bonne idée d’acheter cet été dans une Maison de la Presse avec une livraison de Courrier International, que l’empereur de l’after-show resurgira assurément dans un club, peut-être un palais (où et quand ne sont pas au programme), et que ce sera la fête.

     

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    Christophe Geudin, quand il ne s’occupe pas de Prince, collectionne les rockumentaires, néologisme inventé par Rob Steiner dans son film pochade, This Is Spinal Tap. Contraction de rock et de documentaire, ce mot désigne plusieurs centaines d’ouvrages filmés et diffusés au cinéma, à la télévision, souvent commercialisés au format DVD. Voici une sélection de ce qui est le meilleur dans la région du rock : biographies, concerts filmés, documentaires à caractère filmé. Une perche pour mieux atteindre les œuvres de Don Allan Pennebaker (Don’t Look Back, Ziggy Stardust and The Spiders From Mars), Jonathan Demme (Stop Making Sense), Martin Scorsese (The Last Waltz) ou découvrir ces formidables outsiders que sont Roky Erickson et Daniel Johnston. Le Dictionnaire essentiel du documentaire rock est un catalogue nécessaire pour toucher le cœur de ce qui nous fait battre le cœur et finalement entrer dans le détail d’une vie, non pas celle que la caméra capte, mais celle de celui qui tient l’objectif et est capable, comme Tony Palmer, de rendre hommage successivement à Benjamin Britten, Peter Sellers ou encore Frank Zappa. Guy Darol

     

    PRINCE, LE DICTIONNAIRE, Christophe Geudin et Frédéric Goaty, Le Castor Astral éditeur, collection Castor music, 334 p., 24 €

    DICTIONNAIRE ESSENTIEL DU DOCUMENTAIRE ROCK, 100                     « ROCKUMENTAIRES » INDISPENSABLES, Christophe Geudin, Éditions Autour du Livre, collection Les Cahiers du Rock, 176 p., 14 €

     

     


  • MUZIQ 11 ❘ UNE DISCOTHEQUE DE REVE

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    Trois ans déjà ! En novembre 2004 paraissait la première livraison de Muziq ("Le magazine qui aime les mêmes musiques que vous") sous l'impulsion de Frédéric Goaty alors rédacteur en chef de Jazz Magazine. Dix numéros plus tard, le magazine s'est étoffé en nombre de pages et nouvelles signatures. Mais vous n'avez encore rien vu. Le 12 décembre 2007, changement de formule. Habits neufs et dossiers encore plus robustes. Je n'en dis pas plus. Je signale.

    Le numéro 11 est actuellement dans les kiosques. Un catalogue de 200 disques (pointilleusement présentés) pour une discothèque de rêve. Impossible de les énumérer tous. Mais pour vos beaux yeux, notez ces quelques noms (et peut-être devinerez-vous l'album sélectionné) : A Tribe Called Quest, AC/DC, Aerosmith, The Allman Brothers Band, Dick Annegarn, Kevin Ayers, Albert Ayler, The Band, The Beach Boys, Beastie Boys, The Beatles, Beck, Jeff Beck, Björk, Black Sabbath, Art Blakey & The Jazz Messengers, Carla Bley, David Bowie, James Brown, Jackson Browne, Dave Brubeck, Tim Buckley, Kate Bush, The Paul Butterfield Blues Band, John Cale, Canned Heat, Captain Beefheart, Alain Chamfort, Chic, Chicago Transit Authority, Chocolate Genius, Gene Clark, The Clash, Leonard Cohen, John Coltrane, Sam Cooke, Elvis Costello, Cream, Creedence Clearwater Revival, Crosby, Stills & Nash, D'Angelo, Miles Davis, Deep Purple, Derek And The Dominos, DJ Shadow, The Doors, Dr Dre, Dr Feelgood, Dr John, Nick Drake ... ...

    Avec cela, un entretien avec Isaac Hayes, une évocation de Jean-François Bizot par Jean-Pierre Lentin, des portraits d'Elisabeth Kontomanou, de Herbie Hancock et de Joe Henry, un angle sur Hair, Let's The Sunshine In (le DVD de l'INA), une longue discussion avec Jannick Top et les Blogs à Muziq de Noadya Arnoux, Bertrand Bouard, moi-même, Julien Ferté, Christophe Geudin, Frédéric Goaty, Baptiste Piégay, Gilles Poussin, Jean Rochard. Le tout adorné de magnifiques photos de Christian Rose. Bonne lecture camaronautes !

  • ZAPPA PLAYS ZAPPA ❘ LUNDI 5 JUIN 2006 ❘ ZENITH PORTE DE PANTIN ❘ COMPTE RENDU

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    Il était prévu que l’on se retrouve autour de la Fontaine aux lions. Il était là, sous le soleil exactement, exact au rendez-vous.  Frédéric Goaty, en personne et sans bodyguard. J’avais pris la précaution de me faire accompagner, venant comme vous le savez peut-être du chemin creux où les malveillants ont plutôt l’aspect du renard et de la belette. Hervé Grimaud, l’ami du Lycée Voltaire, avait finalement décidé de joindre ses pas aux miens pour la grande soirée. Sans billet. Très vite, il lui en fut vendu un. A la criée, comme il se doit. Hervé avait déjà vu Zappa (Frank) à Bercy. Bon souvenir. Avec Frédéric Goaty (rédacteur en chef de Muziq et de Jazz Magazine), nous sommes placés en première ligne, face aux empilements soniques qui ne tarderont pas  à dépoter, au grand dam de mes fragiles petites esgourdes si souvent frottées au rock abrasif des concerts hurlants. Il est 20h30 et nous avons déjà fait nos emplettes au rayon merchandising. Un écran de fond de scène réverbère Frank dans ses œuvres. Film rare et de longtemps promis en version DVD. Chef d’œuvre attendu par tous ceux qui possèdent la patience des femmes de marins qui guettent en rade de Brest le retour du mari humide. Car, voyez vous,  faut pas pousser pépère. Et d’ailleurs, il n’est pas dit qu’after show, backstage oui da, nous ne poussions une circonstancielle gueulante. Et une de plus.
    Le film a la couleur du Roxy, période unissant George Duke, les frères Fowler, Ruth Underwood. Excellent line-up, mirifique sequencing. Avec des variantes (à dresser les poils les plus mal placés) de « Montana » et d’ « Andy ». Dingue, comme on dit de nos jours. Voire ingde ou nideg.

    La scène est coiffée de nombreux instruments. Surtout à percussions. On devine les rafales à venir.


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    Dweezil arrive. Dweezil est là. Le bon fils ému. Emouvant. Chemise blanche, pantalons à motifs staïle boucles d’ADN.  Célébration en mosaïque avec une longue exergue de Napoleon Murphy Brock qui souffle possédé d'une jouvencelle vigueur. Mais le show commence vraiment avec un premier track explicite. Et c’est la première pièce du premier album. « Hungry Freaks Daddy », Freak Out !, 1966. Suit, « Let’s Make The Water Turn Black » (We’re Only In It For The Money, 1968).

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    Dweezil parle, shy, très shy : « Bonsoir ! Thank you so much everybody ». L’ambiance est bouillante. Un couple de jeunes freaks chante et danse aux pieds du digne fils.

    Sur « Florentine Pogen » (One Size Fits All, 1975), Napoleon Murphy Brock use de sa voix flambe tout en offrant une chorégraphie loufoque. A ce stade du concert, il est à l’intersection de tous les regards.  Le spectacle repose sur ses épaules peu vermoulues. A plusieurs reprises, on observera que Napo possède le don de  pasticher les volatiles. Après une citation guitaristique de Rouget de la Marseillaise de Lille, le band nous invite à explorer l’univers tant aimé d’Over-nite Sensation. Retour sur We’re Only In It For The Money pour une interprétation qui se doit d’être touchante : « The Idiot Bastard Son ». Tel est le cas. Touché !

    Sans Apostrophe (‘) et Uncle Meat, cette évocation aurait passé sur le dédale géochronique de la continuité conceptuelle et fait fi du thème de la matrice à produire sans fin. Voici donc Apostrophe (‘) (1974) et une allusion au caniche conceptuel (Fido) aussitôt avalé par « King Kong » (Uncle Meat, 1969) en une version servant de motif pour l’exercice de la gestuelle zappaïenne. Dweezil montre (toutefois sans se conformer vraiment à la symbolique paternelle) comment il est possible de diriger un orchestre au doigt et à l’œil.

    « Don’t Eat The Yellow Snow » (Apostrophe (‘)) est le morceau suivant et l’occasion pour Napoleon Murphy Brock de faire le pingouin sur ces mots :  « Watch out where the huskies go… » Tandis que sur « St Alphonso’s Pancake Breakfast », Brock joue le funky Alfonso dans la peau d’un automate délinéant l'angle droit. Le track s’achève sur une battle drums/percus. Rencontre du  percusionniste rêvant d’être un peu, ce soir, Ruth Underwood et du batteur Joe Travers.

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    La salle s’ébroue, se lève, vagues d’enthousiasme. Dweezil lance en pétales de rose un « Thank you Paris ! » qui stimule des envies de voir l’affiche sur scène. Nous attendons Terry Bozzio,  Steve Vai. Et dans la salle, ce sont des noms que l’on entend glapir de plus en plus distinctement. Mais, patience.
    « Inca Roads » (One Size Fits All, 1975), morceau de bravoure, permet à Dweezil d’exprimer ses talents guitaristiques sur le fameux solo, tandis que Napoleon Murphy Brook expose le flûtiste,  impressionnant dans « Dupree’s Paradise ». Relecture du thème au clavier avec un ostinato frénétique en coda.
    Bien que l’orchestre se résume à huit instrumentistes, nous espérons une entrée dans le vocabulaire du Grand Wazoo. « Eat That Question » récompense nos fantasmes avec un solo admirable de Scheila Gonzales au saxo et un long solo véloce de Dweezil avec un coda tout à fait hendrixien.
    22 heures à nos montres. C’est le moment de l’entracte (nichons et bières) qui dure moins de vingt minutes.
    Dweezil : « Ladies and gentlemen, please welcome Terry Bozzio ».

    Il est 22h16 et la batterie nue d’avant-scène s’anime (brutalement) du jeu plus que rapide de celui qui se présenta un jour chez Frank Zappa, venant du groupe Azteca. Zappa lui demande : « Joue Black Page ! ». Terry le fait. Terry rejoint la grande odyssée. Nous sommes en 1975.

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    En 2006, le batteur véloce bat les fûts et cymbales tout en chantant « I'm So Cute/Tryin' To Grow A Chin» (Sheik Yerbouti, 1979), spécialité vraiment Bozzio.
    Sur « City Of Tiny Lites » (Sheik Yerbouti), sa ferveur est si énorme qu’il explose la grosse caisse. Obligé de rejoindre au centre, le dispositif de Joe Travers. Dès lors, évidemment, il joue beaucoup moins fort. Quoi ? Mais une pièce d’anthologie. Laquelle ? « Punky’s Whips » (Zappa In New York, 1978). Dweezil y prend un solo aussi frénétique que l’expression drumistique du bon Terry. Car l’homme est vraiment bon. Je le constaterai backstage. N’est-ce pas Fred ?
    Dweezil donne la parole à la salle qui réclame « The Black Page ».
    Imaginez la voix du Zénith. Clameur impérieuse.

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    Terry livre son drum solo.

    And now, ladies and gentlemen here is Steve Vai.

    En personne et en chair.

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    Savoir que l’étudiant de Berklee persuada Zappa en lui apportant une transcription de « Black Page » et une cassette de son groupe Morning Thunder. L’enthousiasme immédiat de Zappa se traduit par un engagement audible sur orgia, palatino;">Tinseltown Rebellion, 1981.
    En plein Zénith, il interprète l’œil émerillonné, complice, cherchant la fraternelle approbation, une version « Peaches IV » de « Peaches En Regalia » (Hot Rats, 1969).
    Après ce vaste moment de générosité empathique. Hot Rats n’est-il pas l’album le plus acheté en France ?, retour sur l’album Over-nite Sensation avec une très peu cavalière version de « Montana ». C’est beau.
    « Village Of The Sun » (Roxy & Elsewhere, 1974) est ce « sentimental lyric » (selon les mots de Frank) supposé transporter tout un chacun, méthode Proust, dans ce village où Frank Zappa jouait des classiques du rhythm’n’blues avec les Black Outs, fin des années 1950. La chanson, portée par la voix souple de Napoleon Murphy Brock est un concentré d’émotion vive.
    « Zomby Woof » (Over-Nite Sensation) lancée par Brock qui ne peut hélas pas atteindre les sommets gagnés par Ricky Lancelotti sur l’album est pur nanan. D’ailleurs, au passage, ne voyez vous pas comme une ressemblance certaine entre Ricky Lancelotti et Larry « Wild Man » Fischer ? Dites moi, ô s’il vous plaît, dites-moi.
    La salle clappe à battoirs que veux-tu.
    Le band revient avec « Camarillo Brillo » (Over-Nite Sensation), « Trouble Everyday » (Freak Out !) et "Sofa 2" (One Size Fits All, 1975). J’aurais tant aimé, pour finir « Muffin Man » (Bongo Fury, 1975), souvent joué par Frank Zappa en fin de concert dans la deuxième moitié des années 1970, comme j’ai pu tympaniquement le constater. De visu itou d’ailleurs.
    A présent une mise au point (et je ne parlerai pas de Gail Zappa, de Terry Bozzio, de Steve Vai qu’avec Frédéric Goaty nous avons choucardement approché after  show), ceux qui disent pas de miracle, rien à voir avec Franky, appartiennent à la confrérie des raconteurs d’histoires de Tauto. Tautologie, vous connaissez ? Car  c’est sûr ô gentils nicodèmes, sans Frank, ça ne peut pas être pareil, ça ne saurait être semblable. Mais comme le souligna, bien justement, Frédéric Goaty (pour mes seules oreilles que je vous prête), Dweezil assure ici la transmission… accomplie.
    C’était vraiment le tribute à ne pas rater. Guy Darol

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