Les ouvrages musicaux relèvent parfois de la littérature (Lester Bangs, Nick Tosches, Greil Marcus pour n'en citer que quelques-uns) ou s'y réfèrent directement. C'est le cas du Dictionnaire Gothic initié par Patrick Eudeline et dans lequel les frénétiques du Batcave sont associés aux plus belles plumes du roman gothique (ou noir) à partir d'Horace Walpole et de son Château d'Otrante. Un abécédaire plus que réjouissant (mais ce mot est-il bien choisi?) si l'on admet que la littérature en tant qu'invention verbale et engagement ontologique est au meilleur de son rayonnement dans la contemplation des astres nommés William Beckford, Aleister Crowley, Thomas de Quincey, Roger Gilbert-Lecomte, E.T.A Hoffmann, "Monk" Lewis, Charles Robert Maturin, Charles Nodier ... La lecture de cet ouvrage qui ne fait l'économie ni des gothic lolitas ni des heavently voices est un outil de combat en faveur des connexions entre musique et littérature. S'il y a encore des chèvres attachées à leur aire de broutage.
Jean William Thoury n'est pas que le chroniqueur de la nostalgie au sein de Jukebox Magazine, il est l'auteur d'un Dictionnaire Gainsbourg après avoir été producteur du groupe Bijou pour lequel Lucien aka Serge écrivit Betty Jane Rose. Toutes les chansons de l'émetteur stellaire sont passées au peigne fin. Tout y est pointilleusement consigné. Traçabilité du moindre texte. Sources et exploitation diffluente en covers. De sorte que l'on est tout à fait convaincu que Serge Gainsbourg est bien cet écrivain du 19ème siècle dans la lignée de Huysmans et de Bloy. Fulminateur quelquefois éméché, l'auteur du Sonnet d'Arvers était en mesure de déballer par coeur des pages entières d'A Rebours.
Joe Boyd fut le producteur d'Elektra qui révéla Nick Drake, Incredible String Band, Fairport Convention et Arnold Layne, le premier single de Pink Floyd. White Bicycles, Making Music In The 60's est un livre de souvenirs en abyme. Vertigineux. Qui expose notamment la continuité entre le jazz, le folk-rock et la pop. L'auteur évoque avec une même virtuosité Thelonious Monk que Joan Baez, Rod Stewart qu'Ewan MacColl, Elvin Jones que Bob Dylan.
Si l'on croit que la musique contemporaine est terriblement ennuyeuse, on se trompe gravement. Une désillusion entamée par Pierre Gervasoni dans La Musique contemporaine en 100 disques, un recueil du meilleur de Stockhausen et de Ligeti, de Mauricio Kagel et de Pierre Boulez mais aussi de Pascal Dusapin et d'Olivier Messiaen (dont on reparle beaucoup ces temps-ci, non ?). L'ouvrage ne coûte pas cher mais, insidieusement, il peut ruiner le porte-monnaie.
Comme il est indispensable de se procurer Musiques Expérimentales (Une Anthologie transversale d'enregistrements emblématiques) de Philippe Robert, on doit avoir dans sa bibliothèque Great Black Music (Un Parcours en 110 albums essentiels) et si possible à portée de mains. Tout simplement pour se rafraîchir la mémoire et connaître l'histoire de la grande musique noire à travers un choix de disques (absolument maîtrisé) qui permet d'acquérir yeux fermés (ou à peu près) les très bons Howlin' Wolf, Solomon Burke, Albert Ayler ou Meshell Ndegeocello.
LE DICTIONNAIRE GOTHIC, Scali
DICTIONNAIRE GAINSBOURG, Scali
WHITE BICYCLES, Allia
LA MUSIQUE CONTEMPORAINE EN 100 DISQUES, Editions MF
GREAT BLACK MUSIC, Le Mot et le Reste
www.atheles.org/lemotetlereste