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JOSETTE FARIGOUL ET BIENVENU MERINO EN VISITE RUE DU PRESSOIR

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Nous étions, Bienvenu Merino et moi, au rendez-vous fixé à 11H30 au café Le Ménilmontant.
Donc, aujourd'hui 9 avril, nous avons, avant de nous diriger vers la rue du Pressoir, déjeuné ensemble dans ce café, lieu de rendez-vous.
Après plus de 41 ans, j'allais retourner sur les traces de mon enfance et de mon adolescence, là, où j'ai vécu jusqu'à notre expulsion. Je ne veux pourtant pas revoir ce jour du 2 décembre 1966, jour de notre déménagement où mes parents, mes soeurs et moi sommes partis pour un lieu inconnu.
1587510337.JPGAccompagnée de Bienvenu et de mon fils David, je suis partie pour ce périple en remontant, tout d'abord, la rue de Ménilmontant jusqu'à la rue Julien Lacroix, sur la gauche. Nous descendons cette rue, Église notre Dame de la Croix, sur notre droite, dressée là, toujours aussi belle, avec son escalier monumental où tous les ans j'aimais à regarder le cortège de communions descendant les marches revêtues pour cette occasion d'un tapis rouge déroulé.
Sur la gauche, l'ancienne place du Liban, renommée aujourd'hui Place Maurice Chevalier où se dresse l'arbre de mon enfance. Je n'en voyais qu'un, erreur, il y en a plusieurs mais celui-ci est le plus gros.
Nous faisons une escale rue Etienne Dolet, mon école est toujours à la même place, cette école que j'ai fréquentée de 1954 à 1962. Bienvenu prend une photo de moi devant cette grande porte en bois. La porte est entrouverte et je peux apercevoir cette escalier qui montait aux classes.
Nous revenons sur nos pas afin de rattraper la rue des Maronites, nous passons devant l'école maternelle, celle de votre jeune enfance, mon cher Guy.
Puis, bientôt sur notre droite, la rue du Pressoir. Alors là, je crois rêver, c'est plutôt l'horreur. Je n'ai aucune émotion puisque je ne reconnais rien, mais alors rien de rien. Pour sûr ils ont tout rasé. Je pense même avoir déçu Bienvenu par mon manque d'émotion. Je n'ai rien à dire si ce n'est que cette rue est d'une laideur à faire pâlir Des blocs de béton plantés là, c'est plutôt de la rage intérieure que éprouve.  Il est honteux d'avoir fait de cette rue si vivante jadis, un ghetto. Elle est entourée de grilles hautes... des bâtiments dans tous les sens. Aucun intérêt, je ne suis pas certaine d'y retourner un jour.
Envolés la boutique de Madame Gilles, le grand garage, le coiffeur chez Vincent, le café de la mère Andrée, ce même café où le 5 juillet 1965 j'ai croisé, pour la première fois, le regard d'un jeune homme qui plus tard allait devenir mon mari, lui qui arrivait de Pelleport. Difficile pour les copains, ce type-là n'était pas de chez nous. Toi, Daniel qui commençait dans le métier d'ascensoriste, parachuté rue du Pressoir pour monter les ascenseurs des immeubles qui, déjà, commençaient à défigurer notre rue.
Nous continuons à remonter la rue du Pressoir, nous sommes maintenant devant le 23/25, je ne dirai pas devant notre immeuble, tellement c'est laid. Il reste malgré tout une chose, la courbure. A cet endroit, je comprends que nous sommes bien là où nous avons vécu.
Bienvenu et mon fils David tentent de retracer l'emplacement de notre immeuble et de la boutique de Madame Gilles. J'ai en mains les 2 photos de l'époque, nous ne sommes pas d'accord sur les emplacements. Moi je revois très bien les endroits, c'était juste une mauvaise prise de vue. Voilà ! la photo de l'épicerie a été prise d'ici, je me plante là, j'insiste. Bon, nous sommes d'accord, heureusement qu'il nous reste cette courbe comme point de repère. Devant le 23/25, mon fils prend une photo de Bienvenu et de moi. Bienvenu me prend en photo devant cette grille à code digital, il pense déceler une émotion de ma part, c'est raté, je ne comprends même pas ce que je fais là, mais je ne laisse rien paraître.
Inutile de vous dire que je n'ai pas retrouvé ma mère à sa fenêtre du 3ème étage, dans la cour, me lançant une pièce pour acheter des bonbons sur le chemin de l'école. Pas de vision de ma cour, de mon escalier ni de moi assise sur les premières marches de votre escalier.
Mon dieu que tout est froid dans cette rue, les anges ne risquent pas de s'y aventurer.
Les mots qui conviennent à cette nouvelle rue du Pressoir sont horreur, laideur, froideur, ghetto.
Que les personnes habitant actuellement cette rue et qui pourraient lire mon billet ne s'offusquent pas, que toutes ces personnes me pardonnent et tant mieux pour eux si ces habitants se plaisent à cet endroit. Cette rue n'est plus la mienne, tout au moins cette nouvelle rue du Pressoir.
1422514610.JPGDans tous les cas, c'est mon coup de gueule, c'est mon choix et c'est mon droit. Je suis pour la liberté d'expression. Moi je préfère garder en mémoire l'ancienne rue du Pressoir où nous pouvions, Guy, moi et tous les autres, vivre en toute liberté et comme le dit si bien Guy Darol, les uns avec les autres, les uns chez les autres.
La belle vie en somme. Ceux qui pourraient en douter, à mon avis, se trompent. Ces mots n'engagent que moi.
Juste un conseil, Monsieur Darol, s'il vous prenait l'envie de venir sur Paris, allez plutôt rendre visite à Bienvenu Merino, détournez votre route de la rue du Pressoir. Il n'y a rien à voir et ça vous évitera de perdre votre temps.
Un peu dur ce récit sur la rue de notre enfance, cher Guy, mais j'en prends la responsabilité et je ne remercie pas tous ceux qui ont contribué à la destruction de notre rue. Mon Général et Monsieur Malraux, avec tout le respect que je vous dois, vous qui dormez dorénavant auprès des anges, je me permets tout de même de dire que cette destruction totale à coups de boules d'acier et de bulldozers, était une monumentale erreur. L'erreur est humaine dit-on, celle-ci est énorme. Il n'est pas toujours nécessaire de démolir, il est parfois possible de rénover. Ce beau café Les Lauriers Roses à l'angle de la rue des Couronnes et du boulevard de Belleville, avec ses grosses colonnes en pierre, lui aussi, disparu.
Ensuite, je préfère passer à la suite, nous avons remonté la rue des Couronnes, la rue Bison est toujours là, la rue Vilin n'a plus rien à voir avec la rue que nous avons connus, au bout de cette rue, les Jardins de Belleville, les escaliers ont été conservés, c'est malgré tout joli mais à quel prix. Combien d'expulsions et combien d'immeubles détruits pour cette réalisation.
Où est le Belleville et Ménilmontant de mon enfance. Les bals du 14 juillet où tout le monde se retrouvait, dans les rues, pour danser, au son de l'accordéon, jusqu'à tard dans la nuit. Eh oui ! même rue du Pressoir nous dansions, c'était la fête, la rue était joyeuse. A 4 ans je me revois devant notre immeuble, je chantais et je dansais " Le bal à Doudou" de Jacques Hélian. A tous ceux qui pourraient penser que je suis ringarde et bien pas du tout, je peux écouter du Jacques Hélian mais aussi Raphaël ou suivre la Star'Ac. Je suis très large d'esprit.
Jo Privat avait raison, effectivement : "Ils ont cassé le berceau de notre enfance".
Je vais faire en sorte d'oublier ce que je viens de voir. Mille excuses Monsieur Bienvenu Merino si je vous ai un peu déçu, mais faire semblant, ça, je ne sais pas le faire. Je vous remercie pour cet agréable après-midi passé en votre compagnie. Je vous assure que nous nous reverrons prochainement.
Après avoir pris congé de Bienvenu, en repartant je me suis arrêtée sur le pont du chemin de fer, rue des Couronnes, sur l'autre pont, rue de la Mare. L'école de garçons rue Henri Chevreau existe encore, l'escalier de l'impasse Piat aussi.
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Je retourne dans mes rêves, je retourne dans la rue de mon enfance. Eh ! les copains, on se voit samedi, je vous attends, nous n'allons pas refaire le monde mais seulement notre vraie rue du Pressoir, cette rue où toute notre bande se retrouvait. Nous allons remonter le temps. Retracer notre rue comme elle était avant. Danielle, Liliane, Christian, Claude et vos conjoints, préparez-vous pour samedi et nos délires, comme toujours.
D'autres vont nous manquer, Jacky, Nancy le retient, Bernard, 10 ans que je ne t'ai pas vu et toi Yves, plus de nouvelles ; Roland, tu manques à ma vie, même si tu étais mon pot de colle lorsque nous étions petits ; toi le p'tit Bernard, bientôt 43 ans que tu nous as quitté, tragiquement, un jour d'été 1965 ; toi Michel, tu es le jumeau manquant depuis 1997. A toi Daniel, je dédie ce récit, toi qui durant 26 ans de vie commune commençais les phrases que moi je  terminais.Tes fous rires me manquent mais je me débrouille sans toi, tu ne comprendrais pas qu'il en soit autrement.
Donc, mon cher Guy, je termine ce récit en attendant samedi où nous allons faire un bond dans le passé, replonger dans nos souvenirs. Reste à savoir ce qu'il sortira de notre boîte à malices.
A suivre ... Josette Farigoul

Commentaires

  • Le message de Josette Farigoul est poignant, bouleversant. Sa douleur, ici, si bien exprimée, va peut-être, j'ai dit, peut-être, emmener les "vainqueurs" du délogement et des casseurs de rêve,d'hier et ceux d'aujourd'hui, de notre beau patrimoine, à les faire réfléchir un peu sur le déluge qu'ils ont fait subir aux habitants de ce quartier à la fin des années soixante, en les privant tout simplement du bonheur et
    livrant aux promoteurs leur territoire et tout ce que pouvait comporter, vivre ici
    en parfaite harmonie,avec les générations
    passées et celles, qui après la guerre,reconstruisaient l'avenir pour les générations futures.
    Bienvenu Merino

  • Bravo pour les souvenirs que vous avez de ce quartier si fabuleux…je suis né en 1946, au 23 passage Deschamps et angle de la rue du Pressoir (19). Je suis allé à l'école maternelle rue des Maronites en 1950-1951-1952. Puis à l'école située 16 rue Julien Lacroix de 1952 à 1959. Mes parents sont arrivés Passage Deschamps en 1929. J'ai quitté Ménilmontant comme tant d'autres fin 1965… C'est 20 ans de ma vie…
    J'avais un frère et trois soeurs, tous sont nés là de 1930 à 1950. Les anecdotes seraient trop nombreuses à raconter.
    Peut-être deux ou trois:
    Le livreur (postillon) avec ses deux chevaux qui livrait le vin, la limonade la bière… et les concierges qui ramassaient le crotin, pour les plantes….
    Le marchand de lait et de fromage de chèvre (avec ses chèvres Passage Deschamps !!!) Il faut l'avoir vu.
    Le "père Pierre" premier clochard dont je me souviens, qui chantait été comme hiver "vive le vent"et qui disait être le
    fils de la "GOULUE".................
    Merci.

  • Merci, Marchand, de nous remettre en mémoire le livreur postillon et ses 2 chevaux, ce livreur s'arrêtait chez madame Gilles tout comme le marchand de lait, ce lait que madame Gilles nous servait avec une mesure dans nos pots en aluminium.
    Nous étions voisins, nous nous sommes probablement croisés. Savez-vous que Guy Darol a créé un site dédié à notre rue et quartier ? Vous pourriez peut-être, si vous le désirez, nous livrer quelques unes de vos petites histoires ? Sacré quartier que le notre, de toutes nationalités et de toutes confessions religieuses, à cette époque nous vivions en parfaite harmonie.
    Josette

  • Je vous invite, en effet, à consulter notre site entièrement dédié à la rue du Pressoir et qui s'intitule, aussi simplement que possible, PARIS, RUE DU PRESSOIR : http://ruedupressoir.hautetfort.com/
    Au plaisir de vous y retrouver.

  • Mr Marchand,josette,je viens de prendre connaissance de votre commentaire.Ce qui est incroyable!
    c'est que j'ai eue une conversation téléphonique, avec mon frère,il y a deux jours et nous avons parlé
    de ce fameux postillon, il y avait deux chevaux robustes attelés, et le postillon tenait les rênes.
    Mon frère me disait qu'il devait avoir une tenue bordeaux et noire, et qu'il avait un chapeau noir,
    haut de forme.
    Alain Bajon, a fréquenté la maternelle rue des Maronites, puis l'école des garçons, de la rue Julien
    Lacroix.Départ, dans les années 1958-59.Monsieur Marchand, il était à peu près en même temps que vous
    à l'école, à la différence près, c'est que lorsque nous sommes partis, il avait 11 ans et demi.Cela
    a été une déchirure, pour lui aussi.
    Nicole.

  • La mémoire ne me faisant par encore "trop" défaut, je me souviens que la rue du Pressoir comptait plus de 12 bistrots.
    Dont les plus célèbres "pour moi"
    Delmas,
    Julien,
    O-20-100-O plus connu "chez Frédo" tenu par M. Mme Delors après la guerre,
    chez Roche,
    l'étoile de l'est,
    chez "Jean" au 31 rue du Pressoir,
    au "T.P.L.G" (tout pour la gueule)
    etc..
    je me souviens du professeur de l'atelier de bois qui était monsieur Petit.
    Mais j'ai quand même un "trou" de mémoire concernant un professeur d'atelier de fer rue Julien Lacroix, impssible de me rappeler son nom ?
    Qui peut m'aider.
    Merci et cordialement. Jean-Claude Marchand

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