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rue du pressoir

  • JO PRIVAT ❘ CLEMENT LEPIDIS

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    Jo Privat au temps de la bâche à jonc

    Il me fit : « Quand j’aurai replié mes gaules, j’aimerais que tu fasses un tour du côté de la rue de Lappe, des fois que le Balajo existe encore. » Cela me fit un coup dans le sac. J’eus une grosse larme et c’est en pensant qu’il y avait une énorme marge avant qu’il ne prenne la tangente que la deuxième se retint de couler.

    L’avenir ne l’a pas démenti. Mon père a replié ses gaules. C’était en septembre zéro cinq.

    Depuis mutine lurette, une image s’impose entre moi et le reste du pauvre monde. Cette image est un crève-cœur et un vade-mecum. La scène se passe rue de Ménilmontant, non loin des Pyrénées. Je suis au Cours Préparatoire à l’école Jeanne d’Arc (mes origines sont bretonnes et vaguement saint-sulpiciennes), mon père me tend les bras à la sortie des classes. En un clin d’œil, je suis juché sur ses épaules d’homme mahousse et nous dévalons la pente bucolique qui englobe le ciel et la terre. De mon perchoir, je vois Pantruche, la tour Eiffel et le soleil qui glisse dans sa poche de velours rouge. Papa chante une valse en mineur. Mes bras autour de son cou, j’enfonce ma tête (déjà de linotte) dans ses plumes d’oiseau. Bientôt nous tournerons du côté de la rue du Pressoir et la vie, toute la vie, se fichera bien de compter les heures. Munificente comme l’image d’un homme (paysan-marin-forgeron) qui porte un rêve sur ses épaules.

    Mon père taquinait la boîte à frissons. Il était toupilleur à la Boule Rouge, au Balajo. C’est là, un dimanche, qu’il décida ma mère pour l’aventure de toute une vie. Il me disait souvent : « Jo Privat, c’est le bon dieu et c’est pour ça qu’il a sa place sur le balcon du Balajo ».

    Maintenant qu’il a tourné la dernière page de son petit livre, je peux dire que je connais Jo Privat (1919-1996), le « Gitan blanc », et presque sur le bout des doigts.

    Il demeurait tout près de chez nous, rue des Panoyaux. Notre quartier est une dédicace à Bacchus. J’ai écouté sa Préférée, sa Zingara, tous ses hymnes aux cœurs simples et à l’accent manouche. C’est grâce à lui que je découvris Clément Lépidis (1920-1997). Avec Clément Lépidis, je ne suis jamais loin de Belleville, jamais loin de la rue de Ménilmontant et papa se tient debout, juvénile et joyeux. Ses mains qui fendent un air de muguet et d’accordéon m’arrachent au pavé herbeux. Je redeviens, il redevient, nous redevenons l’alpiniste à la neige éternelle qui ne sait pas qu’au bout de la pente le chasseur énumère ses proies. Guy Darol

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    Clément Lépidis

    Clément Lépidis – Bellevillois –

    né de père grec et de mère

    française, autodidacte.

    A pratiqué de nombreux métiers

    avant de se vouer à la littérature : photographe,

    modéliste en chaussures, câbleur

    radio, représentant en produits de

    beauté, commis d’agent de

    change à la Bourse de Paris, etc.

    Premier roman : La Rose de

    Būyūkada, publié à 44 ans chez

    Julliard dans la collection « Les

    Lettres Nouvelles » de Maurice

    Nadeau.

    Deux cycles intéressent l’auteur :

    l’un directement lié à la France et

    à Paris plus particulièrement,

    l’autre à la Méditerranée.

    Voyage souvent en Espagne et en

    Grèce. Il lui reste encore une

    vingtaine de livres à écrire

    surtout des romans –  dont les

    titres, les personnages et les

    arguments sont prêts. Le dernier

    s’intitulera : Mourir !

    _________

    Autoportrait in Des dimanches

    à Belleville, ACE éditeur,

    avril 1984

    Œuvres de Clément Lépidis

    Aux éditions du Seuil

    La Fontaine de Skopelos

    Le Marin de Lesbos

    L’Arménien

    Les Émigrés du soleil

    La Main rouge

    La Rose de Buyukada

    La Conquête du fleuve

    Cyclones

    L’Or du Guadalquivir

    Les Oliviers de Macédoine

    Chez d’autres éditeurs

    L’Amour dans la Ville, éditions du Toro

    Belleville, en collaboration avec E. Jacomin, éditions Henri Veyrier

    Le Mal de Paris, en collaboration avec Robert Doisneau, éditions Arthaud

    Belleville au cœur, éditions Vermet

    Mille Miller, éditions Ramsay

    Marchés de Paris, en collaboration avec S. Weiss, éditions ACE

    Des Soleils à Hokkaido, éditions Vermet

    Montmartre, en collaboration avec J.-M. Leri, éditions Henri Veyrier

    Des dimanches à Belleville, éditions ACE

    Un itinéraire espagnol, éditions Christian Pirot

    Monsieur Jo, éditions Le Pré Aux Clercs

    Les Bals à Jo, éditions Le Sémaphore

    Je me souviens du 20ème arrondissement, éditions Parigramme

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    A propos de Jo Privat

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    Ecouter

    Manouche Partie, 1960

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  • HENRI RACZYMOW

    « Parce que chez eux, rue Bisson, faut dire, c’était pas brillant. C’était même franchement moche. Elle existe plus, aujourd’hui, la rue Bisson de ce temps-là, non plus que la rue Vilin ni la rue Dénoyez, à peine la rue Ramponeau, la rue Lesage, la rue Julien-Lacroix ni de Tourtille ni de Pali Kao ni du Sénégal. Vachement exotique par là, tu voyageais les doigts dans le nez et pour pas un rond. Ou même si elles existent encore ces saletés de rues, c’est plus les mêmes, plus du tout les mêmes.» Henri Raczymow

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    En traçant les contours de ma géographie sentimentale, je m’étais arrêté sur la rue du Pressoir, espérant compléter le puzzle avec les pièces que me tendraient mes visiteurs. Tout mon savoir sur cette rue (dont le nom subsiste, onomastique fantôme désignant un fragment de Paris converti en ghetto après le passage des bulldozers) reposant entièrement sur mes souvenirs, ceux de ma mère, j’en appelai (Robinson du temps enfui) aux témoins des années 1950-1960. Je citai, dans ce billet à la ressemblance d’un avion de papier, quelques écrivains ayant vécu dans ces parages (Georges Perec, Clément Lepidis, Louis Chevalier) et vous me fîtes cadeau de Raymond Queneau, de Jacques Réda, de Jacques Yonnet. Ceux-là témoignaient du changement voire de la destruction sans pour autant évoquer ma rue du Pressoir. Je continue à chercher sans désespérer de trouver d’autres voix, d’autres signes. J’ai relu Joseph Bialot (Belleville Blues, Autrement, 2005) puis Henri Raczymow.

    S’ils ont marché, c’est évident, sur mon trottoir, ils ne disent rien du café André, de l’épicerie de Madame Gilles. Leurs livres prononcent  le nom de la rue des Couronnes mais ne s’arrêtent pas sur le Café Tabac, avec belle terrasse, qu’il suffisait de tourner pour pénétrer mon domaine. medium_Numeriser0010.2.jpgHenri Raczymow est né en 1948. Ses parents habitaient au « 71, rue de la Mare deuxième étage au fond du couloir à droite ». Ce tendre évocateur de Belleville (Avant le déluge, Phileas Fogg, 2005), il me plaît de songer qu’il a enjambé mes exploits, lorsque sur le boulingrin de bitume, je poussais les billes d’argile, seul, toujours seul. Et à croupetons. Il avait douze ans Henri Raczymow. Je le vois bien exactement, ses culottes courtes à revers, le cheveu bref et calamistré. Je le vois bien exactement tenant son frère Alain, d’une main d’aîné. Je suis accroupi à l’endroit où le macadam est beaucoup fissuré. Mes billes ne risquent pas de se perdre dans le caniveau où coule une eau rapide. Ses souvenirs me ressemblent avec de grandes secousses en plus, horreurs d’exil et de déportation. Mais le quartier qu’il décrit (Belleville années 1950 est donné en sous-titre) me conforte en chaleur. Chaleur génésique du pêle-mêle. La vie pluriethnique et le babel des langues. Ce livre imagé où l’on peut se glisser rue Vilin, rue Bisson, rue Fessart, dans une cour de la rue Julien-Lacroix, a la puissance du grand œuvre. Henri Raczymow est en quelque sorte le Calet du vingtième arrondissement de Paris. Mais il possède un pneuma qui ne ressemble à rien. Sauf, à certains endroits, au souffle d’un promeneur à reculons. Je pense souvent à André Hardellet en le lisant. Celui de La Promenade imaginaire et de Donnez-moi le temps. Ceci, dans Reliques (Gallimard, 2005) : « Alors, elle est où, la vie, en vérité ? Vous l’avez vue, vous ? Vous l’avez vue passer par ici et repasser par là ? De quel manteau était-elle vêtue ? Ah bon, elle était toute nue ? Et alors, elle est dans le temps ou pas dans le temps ? »

    Et tout le reste qu’il faudrait mettre en exergue, et pas seulement à propos de Belleville, mais aussi de ce combat permanent que l’on mène, bien obligé, contre les bulldozers (toutes formes) qui écrabouillent le souvenir, puis le cœur et finalement nos pauvres petits squelettes. Guy Darol

  • EUGENE DABIT ❘ LE VIEUX BELLEVILLE

     

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    Citée par le grand historien de Paris qu'était Louis Chevalier (il y vécut), décrite par Jacques Hillairet dans son Évocation de Paris en trois volumes, la rue du Pressoir n'apparaît que rarement dans les pages de la Littérature. Clément Lépidis ne l'oublia pas et nous ne l'avons trouvé (pour le moment) sous aucune autre plume. Comme si on en faisait le tour. Serait-elle un hameau perdu de Belleville ? Un obscur chemin vigneron ? Avec Eugène Dabit, populaire auteur de Petit Louis, d'Hôtel du Nord, nous n'en sommes jamais loin. Mais c'est surtout dans Faubourgs de Paris que son odeur transpire. Là, le romancier fraie des voies, ouvre des portes et nous marchons dans son sillage parmi les souvenirs de ce que fut la rue du Pressoir et ses environs avant démolition. On y retrouve le cinéma Cocorico, les cafés Le Point du Jour, La Vielleuse « où s'alignent dix billards qu'entourent dès six heures les joueurs en bras de chemise. » Voici La Bellevilloise, Les Folies-Belleville, le ciné Floréal. « Fracas des autobus, rumeurs ; enseignes, réclames étincelantes (...) Les trottoirs ne sont pas assez larges, on marche sur la chaussée. » La rue de Belleville et sa ruée nous sont décrites dans un luxe d'images et de sons. On croirait une fenêtre ouverte tant la vie est palpable. « A Belleville, on trouve peu de fonctionnaires, peu d'employés. Dès qu'ils peuvent, singeant leurs chefs, ils vont s'installer à l'ouest de Paris. » Eugène Dabit poursuit de sa lumière ouvriers, apprentis, manœuvres. « C'est ici qu'on naît, vit et meurt ; qu'on travaille et qu'on aime, sur sa terre natale. » Pour Dabit, Belleville n'a de racines que parisiennes. Avec lui, la couleur des rues est celle de la suie mais tous les visages resplendissent. Pour peu, on se croirait ailleurs, dans quelque cambrousse. Du reste l'herbe y pousse. La végétation se rebelle contre le macadam. Guy Darol

     

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    LIRE

    EUGÈNE DABIT

    FAUBOURGS DE PARIS

    GALLIMARD, Collection L'Imaginaire


    CONSULTER

    FAUBOURGS DE PARIS AUX EDITIONS GRANDS CARACTERES

  • JOSETTE FARIGOUL ET BIENVENU MERINO EN VISITE RUE DU PRESSOIR

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    Nous étions, Bienvenu Merino et moi, au rendez-vous fixé à 11H30 au café Le Ménilmontant.
    Donc, aujourd'hui 9 avril, nous avons, avant de nous diriger vers la rue du Pressoir, déjeuné ensemble dans ce café, lieu de rendez-vous.
    Après plus de 41 ans, j'allais retourner sur les traces de mon enfance et de mon adolescence, là, où j'ai vécu jusqu'à notre expulsion. Je ne veux pourtant pas revoir ce jour du 2 décembre 1966, jour de notre déménagement où mes parents, mes soeurs et moi sommes partis pour un lieu inconnu.
    1587510337.JPGAccompagnée de Bienvenu et de mon fils David, je suis partie pour ce périple en remontant, tout d'abord, la rue de Ménilmontant jusqu'à la rue Julien Lacroix, sur la gauche. Nous descendons cette rue, Église notre Dame de la Croix, sur notre droite, dressée là, toujours aussi belle, avec son escalier monumental où tous les ans j'aimais à regarder le cortège de communions descendant les marches revêtues pour cette occasion d'un tapis rouge déroulé.
    Sur la gauche, l'ancienne place du Liban, renommée aujourd'hui Place Maurice Chevalier où se dresse l'arbre de mon enfance. Je n'en voyais qu'un, erreur, il y en a plusieurs mais celui-ci est le plus gros.
    Nous faisons une escale rue Etienne Dolet, mon école est toujours à la même place, cette école que j'ai fréquentée de 1954 à 1962. Bienvenu prend une photo de moi devant cette grande porte en bois. La porte est entrouverte et je peux apercevoir cette escalier qui montait aux classes.
    Nous revenons sur nos pas afin de rattraper la rue des Maronites, nous passons devant l'école maternelle, celle de votre jeune enfance, mon cher Guy.
    Puis, bientôt sur notre droite, la rue du Pressoir. Alors là, je crois rêver, c'est plutôt l'horreur. Je n'ai aucune émotion puisque je ne reconnais rien, mais alors rien de rien. Pour sûr ils ont tout rasé. Je pense même avoir déçu Bienvenu par mon manque d'émotion. Je n'ai rien à dire si ce n'est que cette rue est d'une laideur à faire pâlir Des blocs de béton plantés là, c'est plutôt de la rage intérieure que éprouve.  Il est honteux d'avoir fait de cette rue si vivante jadis, un ghetto. Elle est entourée de grilles hautes... des bâtiments dans tous les sens. Aucun intérêt, je ne suis pas certaine d'y retourner un jour.
    Envolés la boutique de Madame Gilles, le grand garage, le coiffeur chez Vincent, le café de la mère Andrée, ce même café où le 5 juillet 1965 j'ai croisé, pour la première fois, le regard d'un jeune homme qui plus tard allait devenir mon mari, lui qui arrivait de Pelleport. Difficile pour les copains, ce type-là n'était pas de chez nous. Toi, Daniel qui commençait dans le métier d'ascensoriste, parachuté rue du Pressoir pour monter les ascenseurs des immeubles qui, déjà, commençaient à défigurer notre rue.
    Nous continuons à remonter la rue du Pressoir, nous sommes maintenant devant le 23/25, je ne dirai pas devant notre immeuble, tellement c'est laid. Il reste malgré tout une chose, la courbure. A cet endroit, je comprends que nous sommes bien là où nous avons vécu.
    Bienvenu et mon fils David tentent de retracer l'emplacement de notre immeuble et de la boutique de Madame Gilles. J'ai en mains les 2 photos de l'époque, nous ne sommes pas d'accord sur les emplacements. Moi je revois très bien les endroits, c'était juste une mauvaise prise de vue. Voilà ! la photo de l'épicerie a été prise d'ici, je me plante là, j'insiste. Bon, nous sommes d'accord, heureusement qu'il nous reste cette courbe comme point de repère. Devant le 23/25, mon fils prend une photo de Bienvenu et de moi. Bienvenu me prend en photo devant cette grille à code digital, il pense déceler une émotion de ma part, c'est raté, je ne comprends même pas ce que je fais là, mais je ne laisse rien paraître.
    Inutile de vous dire que je n'ai pas retrouvé ma mère à sa fenêtre du 3ème étage, dans la cour, me lançant une pièce pour acheter des bonbons sur le chemin de l'école. Pas de vision de ma cour, de mon escalier ni de moi assise sur les premières marches de votre escalier.
    Mon dieu que tout est froid dans cette rue, les anges ne risquent pas de s'y aventurer.
    Les mots qui conviennent à cette nouvelle rue du Pressoir sont horreur, laideur, froideur, ghetto.
    Que les personnes habitant actuellement cette rue et qui pourraient lire mon billet ne s'offusquent pas, que toutes ces personnes me pardonnent et tant mieux pour eux si ces habitants se plaisent à cet endroit. Cette rue n'est plus la mienne, tout au moins cette nouvelle rue du Pressoir.
    1422514610.JPGDans tous les cas, c'est mon coup de gueule, c'est mon choix et c'est mon droit. Je suis pour la liberté d'expression. Moi je préfère garder en mémoire l'ancienne rue du Pressoir où nous pouvions, Guy, moi et tous les autres, vivre en toute liberté et comme le dit si bien Guy Darol, les uns avec les autres, les uns chez les autres.
    La belle vie en somme. Ceux qui pourraient en douter, à mon avis, se trompent. Ces mots n'engagent que moi.
    Juste un conseil, Monsieur Darol, s'il vous prenait l'envie de venir sur Paris, allez plutôt rendre visite à Bienvenu Merino, détournez votre route de la rue du Pressoir. Il n'y a rien à voir et ça vous évitera de perdre votre temps.
    Un peu dur ce récit sur la rue de notre enfance, cher Guy, mais j'en prends la responsabilité et je ne remercie pas tous ceux qui ont contribué à la destruction de notre rue. Mon Général et Monsieur Malraux, avec tout le respect que je vous dois, vous qui dormez dorénavant auprès des anges, je me permets tout de même de dire que cette destruction totale à coups de boules d'acier et de bulldozers, était une monumentale erreur. L'erreur est humaine dit-on, celle-ci est énorme. Il n'est pas toujours nécessaire de démolir, il est parfois possible de rénover. Ce beau café Les Lauriers Roses à l'angle de la rue des Couronnes et du boulevard de Belleville, avec ses grosses colonnes en pierre, lui aussi, disparu.
    Ensuite, je préfère passer à la suite, nous avons remonté la rue des Couronnes, la rue Bison est toujours là, la rue Vilin n'a plus rien à voir avec la rue que nous avons connus, au bout de cette rue, les Jardins de Belleville, les escaliers ont été conservés, c'est malgré tout joli mais à quel prix. Combien d'expulsions et combien d'immeubles détruits pour cette réalisation.
    Où est le Belleville et Ménilmontant de mon enfance. Les bals du 14 juillet où tout le monde se retrouvait, dans les rues, pour danser, au son de l'accordéon, jusqu'à tard dans la nuit. Eh oui ! même rue du Pressoir nous dansions, c'était la fête, la rue était joyeuse. A 4 ans je me revois devant notre immeuble, je chantais et je dansais " Le bal à Doudou" de Jacques Hélian. A tous ceux qui pourraient penser que je suis ringarde et bien pas du tout, je peux écouter du Jacques Hélian mais aussi Raphaël ou suivre la Star'Ac. Je suis très large d'esprit.
    Jo Privat avait raison, effectivement : "Ils ont cassé le berceau de notre enfance".
    Je vais faire en sorte d'oublier ce que je viens de voir. Mille excuses Monsieur Bienvenu Merino si je vous ai un peu déçu, mais faire semblant, ça, je ne sais pas le faire. Je vous remercie pour cet agréable après-midi passé en votre compagnie. Je vous assure que nous nous reverrons prochainement.
    Après avoir pris congé de Bienvenu, en repartant je me suis arrêtée sur le pont du chemin de fer, rue des Couronnes, sur l'autre pont, rue de la Mare. L'école de garçons rue Henri Chevreau existe encore, l'escalier de l'impasse Piat aussi.
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    Je retourne dans mes rêves, je retourne dans la rue de mon enfance. Eh ! les copains, on se voit samedi, je vous attends, nous n'allons pas refaire le monde mais seulement notre vraie rue du Pressoir, cette rue où toute notre bande se retrouvait. Nous allons remonter le temps. Retracer notre rue comme elle était avant. Danielle, Liliane, Christian, Claude et vos conjoints, préparez-vous pour samedi et nos délires, comme toujours.
    D'autres vont nous manquer, Jacky, Nancy le retient, Bernard, 10 ans que je ne t'ai pas vu et toi Yves, plus de nouvelles ; Roland, tu manques à ma vie, même si tu étais mon pot de colle lorsque nous étions petits ; toi le p'tit Bernard, bientôt 43 ans que tu nous as quitté, tragiquement, un jour d'été 1965 ; toi Michel, tu es le jumeau manquant depuis 1997. A toi Daniel, je dédie ce récit, toi qui durant 26 ans de vie commune commençais les phrases que moi je  terminais.Tes fous rires me manquent mais je me débrouille sans toi, tu ne comprendrais pas qu'il en soit autrement.
    Donc, mon cher Guy, je termine ce récit en attendant samedi où nous allons faire un bond dans le passé, replonger dans nos souvenirs. Reste à savoir ce qu'il sortira de notre boîte à malices.
    A suivre ... Josette Farigoul

  • AUJOURD'HUI, LA RUE DU PRESSOIR

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    Hier, la rue du Pressoir
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    Aujourd'hui, la rue du Pressoir
    Photographie Bienvenu Merino

    Ce n'est pas un paysage en ruine mais la conséquence du plan de rénovation urbaine, tel que Louis Chevalier dans L'Assassinat de Paris en a étudié les prémisses. A la manière d'un palimpseste, des constructions se sont substituées aux immeubles érigés au milieu du XIXème siècle où logeaient en parfaite harmonie parisiens de souche et migrants ainsi qu'en témoignent les récits bellevillois de Clément Lépidis. En prévision du retour de Josette Farigoul sur les lieux de son enfance abandonnés par la contrainte de l'expulsion en 1966, Bienvenu Merino a imaginé ce texte d'anticipation où se mêlent l'effroi et la résignation. Le mercredi 9 avril 2008, Josette Farigoul accompagnée de son fils et de Bienvenu Merino ont effectué le voyage. Un pélérinage diront certains mais peut-on parler de catharsis, de guérison lorsque l'on vient contempler l'effacement de sa propre histoire, la rectification pure et simple d'un passé inconfortable mais heureux. A propos de ces transformations brutales menées à coups de boules de fonte et de bulldozers, il convient de consulter Courrier International (www.courrierinternational.com) qui dans son numéro 906 (Dossier Paris épinglé par la presse étrangère) revient, sous la plume d'Andrew Hussey sur la destruction du vieux Paris au motif qu'il regorgeait de vagabonds, de voyous, d'alcooliques, de déviants et d'anarchistes, "tous les exclus de la société qui n'avaient rien à perdre et s'accommodaient très bien du chaos le plus total."  Refuge des "classes dangereuses" (locution inventée et définie par Louis Chevalier, le meilleur spécialiste de l'histoire de Paris), Belleville-Ménilmontant devait disparaître, comme on éradique le risque de peste, la menace du complot révolutionnaire toujours vif. Guy Darol

    Le retour à la maison

    Le soleil  la neige  la pluie

    Multitudes des rues grisées

    Le retour triomphal en secret

    Le parfum du marronnier

    Elle est revenue au berceau de sa reine enfance

    Elle  se tait de ne rien pouvoir dire

    Elle va de par les rues des souvenirs

    Etoufée d’émotion

    Et fragile

    Dans  sa robe pâle elle est plus belle que tout au monde

    Elle s’arrête un pas, devant Notre Dame de la Croix

    Et continue encore des pas et des pas

    Et

    «  Voilà je suis arrivée »

    Elle veut dire mais elle ne dit pas

    « La maison est là ! » Elle dit

    Mais elle se reprend

    « Était là ! »

    Elle montre du doigt

    Elle regarde, s’approche

    Regarde ou était sa maison

    Debout   en   silence,   elle   se   rappelle

    ‘La maison abrite la rêverie et protège le rêveur, elle permet de rêver en paix.

    Il n’y a pas que les pensées et les expériences qui sanctionnent les valeurs humaines. A la rêverie appartiennent des valeurs qui marquent l’homme et la femme en sa profondeur. La rêverie a même un privilège d’autovalorisation. Elle jouie directement de son être. Alors, les lieux où l’on a vécu la rêverie se restituent eux-mêmes dans une nouvelle rêverie. C’est parce que les souvenirs des anciennes demeures sont revécus comme des rêveries que les demeures du passé sont en nous impérissables’

    Josette Farigoul  est venue

    Emue

    Elle repart émue

    Sans que personne ne sache rien.

    Ménilmontant le 9 avril 2008

    Bienvenu Merino



     

  • HISTOIRE D'UN PRENOM

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    J'ai lancé ma bouteille à la mer pour notre petite réunion entre copains. Il faut juste que tout le monde soit disponible un certain samedi.
    J'ai téléphoné à deux d'entre eux hier, ils se chargent de retenir une date qui correspondrait à tous.
    Je sais déjà que mon copain Claude et sa femme (ne l'oublions pas car elle nous supporte depuis 35 ans qu'elle est mariée avec lui) sont de sorties durant les trois semaines à venir. J'aimerais bien que cette réunion se fasse au mois d'avril. Nous verrons, ils vont me recontacter puisque nous nous réunirons chez moi.
    Je compte beaucoup sur Claude car il habitait plus vers le bas de la rue  après le passage Deschamps et je sais qu'il a beaucoup de souvenirs en tête.
    Je suis sûre que nous allons pouvoir remonter la rue du Pressoir presque sans encombre. Il suffit de se mettre à plusieurs. Hier, lorsque j'ai téléphoné à mon amie, elle m'a rafraîchi la mémoire sur un bâtiment situé à côté de chez elle et que j'avais oublié, maintenant je le vois très bien.
    Plus je regarde la photo où vous êtes avec vos parents et plus j'ai l'impression de reconnaître, principalement, votre père.
    L'escalier sur le blog me fait penser au mien. Je descendais les 3 étages à califourchon, sachant que c'était le vide avec la cave rn bas, un peu inconsciente. Un peu un garçon manqué. Pour être manqué, ça je l'étais. Ma mère m'a très souvent appelé Georges. Je vous dis, j'ai toujours eu beaucoup de chance ! je n'avais pas de prénom à ma naissance. Mes parents étaient persuadés que je serais un garçon qui se prénommerait Georges. Oh ! la surprise.  Comme je suis née au 25, c'est le médecin, bien embarrassé, qui m'a trouvé mon prénom. On l'appelle comment ? Georgette ? Ce prénom ne plaisait pas à ma mère (encore heureux, déjà que je n'aime pas Josette mais Georgette faut pas déconner!) et bien Josette ? Oh oui ! répondit ma mère. Et voilà comment ce prénom de Georges m'a poursuivit jusqu'à la mort de Maman en 1984. J'ai toujours pris ça pour une marque d'affection car quand elle en avait après moi, elle m'appelait Josette et ne me reprochait pas d'être une fille. En plus, mes parents n'ont eu que des filles.  Deux autres après moi, en 1953 et 1955. Elles m'appelaient Georges dans n'importe quels lieux ce qui pouvait porter à confusion lorsque j'étais jeune fille et même mariée. Je voyais parfois des gens me regarder avec des yeux ronds, se demandant si je n'étais pas un travesti. Je n'y prêtais même plus attention. Sauf parfois en voyant la tête des gens. Ah oui ! elle m'a appelé Georges. Ce prénom (que je n'aime pas particulièrement) ne m'a pas empêché de vivre. George Sand était bien une femme. Josette Farigoul
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  • LOUIS CHEVALIER ❘ L'ASSASSINAT DE PARIS

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    Professeur au Collège de France où il enseigna l'histoire de Paris, Louis Chevalier (1911-2001) rédigea plusieurs ouvrages sur la capitale dont celui-ci, une philippique contre l'entreprise de démolition emmenée par le couple De Gaulle/Malraux.

    Destruction programmée à partir de 1955-1958, le plan consiste (sous prétexte d'insalubrité) à déplacer des populations mixtes, pluri-ethniques, harmonieuses, dans les lointains d'une banlieue ou  vers des ensembles parisiens déconnectés de toute vie de quartier.

    Publié en 1977, L'Assassinat de Paris décrit le processus qui consiste à supprimer de la carte de Paris des rues, des "ilôts" au prétexte de la nécessité d'un nouveau Paris dont nous remarquons aujourd'hui le modus vivendi.

    Et c'est l'un des très rares livres à évoquer la rue du Pressoir où l'honorable Louis Chevalier vécut. Et peut-être saura-t-on m'en dire plus ? Guy Darol

    L'Assassinat de Paris

    Louis Chevalier

    Editions Calmann-Lévy, 1977

    Editions Ivréa, 1997

  • JACQUES HILLAIRET ❘ RUE DU PRESSOIR

     

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    Ce que nous savons des origines de la rue du Pressoir, nous le devons à Jacques Hillairet, historien du Vieux Paris qui publia, en 1951, une histoire en trois volumes dont la spécificité fut de dater les rues, en précisant des toponymies, en révélant un peu de miel évanoui qu'avec Josette Farigoul et Bienvenu Merino nous tâchons de revivifier.

    Il faut aller à la page 347 du troisième tome (dans l'édition de 1951) pour arriver jusqu'à la rue du Pressoir. On y entre au chapitre De la Barrière de Ménilmontant à la Porte de Ménilmontant. Un parcours qui emprunte la rue de Ménilmontant (à partir du n°1) en suivant la Salle Graffard, le bal des Grands Pavillons, celui des Barreaux Verts. Nous arrivons rue Julien-Lacroix (soit une partie de l'ancien Chemin des Couronnes, indiqué en 1730) et passons devant le bal de l'Elysée-Ménilmontant. Voici la rue des Maronites (ex-rue de Constantine jusqu'en 1867) qui "reçoit la rue du Pressoir, ouverte en 1837".

    Bals, guinguettes attirant les promeneurs du dimanche, gargotes où le vin coule à flot, vignes, sentiers à travers champs composent un univers dédié à Bacchus à la fin du 19ème siècle. Ce dont témoignent avec beaucoup de transparence les noms des rues du Pressoir ou des Panoyaux. Guy Darol

    Jacques Hillairet

    Evocation du Vieux Paris

    Illustrations de Boisvert

    Les Editions de Minuit, 1951

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    Sous le titre Connaissance du Vieux Paris, Jacques Hillairet a proposé dès 1956 une édition abrégée de son panorama en trois volumes. Connaissance du Vieux Paris est un ouvrage régulièrement réédité. De même que l'on trouvera, aux Editions de Minuit, de Jacques Hillairet, son Dictionnaire historique des rues de Paris, régulièrement mis à jour.

    Jacques Hillairet

    Connaissance du Vieux Paris

    Editions Payot & Rivages, 1993

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    Le village de Belleville
    en 1846
    où  s'insère la rue du Pressoir
  • LE BALLON ROUGE FLOTTE RUE DU PRESSOIR

     

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    Le Ballon Rouge, 1956

    Depuis que nous nous sommes retrouvés, plus de quarante ans après, nous entretenons une correspondance par mails qui aboutit à sauver de l'oubli des images, des piétons de Paris. Chaque jour ou à peu près, Josette Farigoul désensevelit. Des rues effacées de ma mémoire reprennent vie, des visages passent de l'invisible au visible.

    Dans un billet publié sur ce blog il y a jolie lurette, j'évoquais la couleur de la rue du Pressoir (Paris,vingtième arrondissement) et je tâchais de faire entendre les bruits qui sonnaient à mes oreilles d'enfant. Je vécus 23-25 rue du Pressoir de 1954 à 1960 et ce fut mon âge d'or. J'ai raconté le mélange des êtres, la générosité, les portes toujours ouvertes. Durant cette période j'ignorais que vivait tout près de moi et à portée de mes souvenirs futurs une jeune Josette, née en 1948, qui demeura dans ce quartier jusqu'à l'expulsion ordonnée par les maîtres de l'époque, le couple De Gaulle-Malraux.

    J'ignorais que l'immeuble de mon enfance serait sauvée des ruines par un être si habité qu'il contient plus de souvenirs que je n'en aurai jamais. Josette ranime les couloirs, les cages d'escaliers. Elle fait parler des paliers, des fenêtres. Ses phrases réalisent le mouvement. Un film s'écrit grâce à elle. Le film des petites choses vraies. Un cinéma fait de passants, de silhouettes rapides d'où partent des rires, aussi parfois des cris et des pleurs.

    Chaque matin, je retrouve Josette Farigoul dans ma messagerie et c'est un parfum de jeunesse qui embaume mon bureau. Chaque jour je rejoins la rue du Pressoir, notre embarcadère lumineux.

    Hier, nous nous promenions rue de Ménilmontant, rue Oberkampf. Nous allions au cinématographe. Au Ménil Palace, au Cythea, au Cocorico du boulevard de Belleville. Séances dominicales qui occupaient l'après-midi.

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    Le Ménil Palace, 1955
    Photo H. Guérard

    Aujourd'hui, Josette évoque Le Ballon Rouge, le film d'Albert Lamorisse datant de 1956 où jouaient Renaud et David Séchan, les deux frères jumeaux nés quatre ans plus tôt. Le fameux ballon vire-voltant dans le ciel de Ménilmontant, Josette Farigoul l'a vu, de ses yeux vus. Et je ne parle pas du film qu'elle connaît par coeur. Mais de cette sphère remplie d'air qui vint toquer à sa fenêtre. Et pourtant le moyen métrage de Lamorisse était déjà sorti en salle. L'objet du film, le fil du souvenir flottait toujours. Lisez plutôt :

    "Le Ballon Rouge,  je l'ai visionné. J'ai bien vu au générique Edmond Séchan. J'ai effectivement pensé que c'était peut-être de la famille de Renaud. Par contre je n'ai pas reconnu le chanteur.
    Savez-vous que ce ballon rouge a existé ? Lorsque je suis allée sur votre site pour la première fois je me suis dit "mais c'est mon ballon", sauf que le mien était beaucoup plus gros.
    C'était un matin, très tôt avant de partir pour l'école. Il faisait très froid. Le linge à la fenêtre était complètement gelé, il se serait cassé comme du verre. De la fenêtre de mon 3e, j'ai aperçu un énorme ballon, que j'ai toujours vu rouge. Je pense que j'avais 10 ans. C'était donc en 1958. Certainement un ballon publicitaire (de la réclame à ce moment là).  Avec ma mère, à l'aide d'un balai, nous avons réussi à le ramener jusqu'à la fenêtre, je voulais absolument ce ballon. Le seul petit problème c'est qu'il ne passait pas par la fenêtre, j'ai dû le laisser repartir. Peut-être est-il parti vers la rue Vilin. Je me suis toujours souvenue de ce ballon énorme. Coïncidence bien sûr, mais la couleur et l'année correspondent. J'aimais voir aussi dans le ciel,  les réclames que les avions écrivaient. On ne voit plus tout cela." Josette

     

  • LE BALLON ROUGE ❘ DERNIER DOMICILE CONNU ❘ PARIS VINGTIEME ARRONDISSEMENT/JUNG

     

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    Il y a des jours où les fameuses coïncidences significatives repérées par Carl-Gustav Jung se précipitent en cascatelle. Ce dimanche-là, j'emmenai ma fille (âgée de 7 ans) voir Le Ballon Rouge d'Albert Lamorisse au cinéma. Elle verrait ainsi les hauts de Ménilmontant tels que je les connus à l'âge de 7 ans. Et elle vit :  la façade de l'école où je fis mon apprentissage de lecteur, le 96 et sa plate-forme qui accueillait les contemplatifs, les terrains vagues et passages étroits qui composaient, à la fin des années 1950, le décor sinueux de ma Babel. Elle vit aussi Renaud qui deviendrait le chanteur que l'on sait, drôle et séditieux puis ...


    Le soir était tombé. Vint ce temps mort (d'après le repas) où l'on hésite entre lire et s'affaler devant l'écran de télévision. Je m'affalai devant Dernier Domicile Connu, le film de José Giovanni datant de 1970. Je l'avais vu à sa sortie mais avais oublié qu'il était en partie une dérive parisienne guidée par Lino Ventura alias Marceau. Un moment, je me retrouvai au bas de la rue des Couronnes. Marceau avait franchi le 18, un portail qui donnait sur les décombres de la rue du Pressoir que les boules de fonte venaient tout juste de pulvériser.

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    La rue du Pressoir est cette artère légèrement flexueuse qui relie la rue des Couronnes à la rue des Maronites. Dans la courbe, au 25, se trouvait l'entrée de l'immeuble où je vécus jusqu'à mes 7 ans.

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    Je finis par me coucher, habité d'images de gravats et de sucre (l'onctueuse et aigrelette nostalgie) et saisis le livre à mon chevet. Celui que j'allais terminer s'intitulait Les Parisiens. Cette étude de Louis Chevalier, professeur au Collège de France et auteur de L'Assassinat de Paris, subversif ouvrage, finissait sur ces mots :

    "Un dimanche après-midi d'automne. Le hasard fait que j'achève du côté de Belleville ce livre commencé il y a sept ou huit ans. Une foule va et vient,  qui ne ressemble pas à celle d'alors, toute une Méditerranée exubérante et joyeuse qui submerge la tristesse kabyle. Le café de la rue du Pressoir n'est plus là, où, dans la tabagie des fins de journée, nous prêtions l'oreille aux propos et aux bruits du faubourg : s'il en reste quelque chose, c'est peut-être ce caillou de belle et bonne pierre qu'un gamin pousse du pied au bas de cet édifice de béton."

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