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  • LA SOEUR DE L'ANGE ♯11 ❘ A QUOI BON L'ANIMAL ? ❘ PRINTEMPS 2012

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    La livraison printanière de La Soeur de l'Ange vient de paraître autour de l'intitulé A quoi bon l'animal ?

    Elle rassemble des textes de William Blake, Lucrèce, Charles Nodier, Marylène Patou-Mathis, Corine Pelluchon, Michel Host, Yannis Constantinidès, Jean-Luc Moreau, Alain Jugnon, François Cornée-Villatte, Tristan Garcia, Thierry Gontier, Patrick Llored, Sandrine Willems, Sarah Vajda, Marc Kober, Lionel Mirisch, Luc Lang, Thierry Maré et un entretien de Patrick Tort avec Marc Kober.

    La rubrique "Silhouettes" décrit les figures de Beatrix Potter (Emmanuelle Ly), Wild Man Fischer (Guy Darol) et Ernst Jünger (Hugues Rabault).

    La rubrique "Héros de pages et d'écrans" livre un texte de Remy de Gourmont : Emma Bovary et le bovarysme.

    La rubrique "Rhizome(s)" propose Pactiser avec le "diable" de François Cornée-Villatte.

    La rubrique "Pour quitter" publie des Fables persanes traduites par Soha Safai.

     

    LA SOEUR DE L'ANGE

    Editions Hermann

    Rédacteur en chef

    Jean-Luc Moreau

    Comité de rédaction

    Didier Bazy, Yannis Constantinidès, Guy Darol, Michel Host, Marc Kober, Thierry Maré, Jean-Luc Moreau, Sarah Vajda

    Abonnement pour deux numéros : 36 € (France), 40 € (Union européenne)

     

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  • PACOME THIELLEMENT ❘ TOUS LES CHEVALIERS SAUVAGES

     

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    Pacôme Thiellement ❘ Photographie Dom Garcia



    Suivant la mécanique d’une pensée empruntant à Alfred Jarry et à René Guénon, mécanique dont on peut dire qu’elle aurait fait tousser Philippe Muray, Pacôme Thiellement fait l’éloge du rire seppuku tel que l’incarne selon lui l’équipage d’Hara-Kiri puis de Charlie (version princeps) dans leurs déversements de lave brûlante. L’humour relève selon lui de « l’éthique samouraï », autrement dit d’une lutte sans merci contre les idoles. En extrême-orientalisant son propos, Pacôme Thiellement entend montrer que le rire, à l’Occident du monde, a cessé d’être grinçant dès lors qu’il s’est arrangé avec les puissants. Célébrant le seul humour qui vaille (celui des Choron, Reiser, Willem, Vuillemin mais aussi Chaval, Bosc, Maurice Henry, également Copi, Zouc Monthy Python), dans la mesure où il est digne de Mishima ou de la déesse Kâlî, il établit un rapprochement entre le rire et la guerre, boutant hors de cette dialectique les amuseurs sans danger que représentent les leaders de « la véritable contre-révolution du comique, l’avant-garde de la provocation officielle », à savoir Gérard Jugnot, Thierry Lhermitte, Christian Clavier, ce trio de pseudos Pieds Nickelés responsable de la mort de l’esprit Hara-Kiri. Inutile de préciser qu’il s’attaque à mains cloutées aux tenanciers de l’actuel Charlie qui n’ont plus rien de bête et méchant. Il en appelle, chaudement, à se retremper dans le bain de l’humour noir et de ses Princes-sans-rire qu’André Breton mit en exergue. On est drôle différemment quand on s’en prend, avec Jonathan Swift, Lacenaire, Jean-Pierre Duprey ou encore Jacques Vaché, à la « sentimentalité sur fond bleu ». Poussant jusqu’au bout sa théorie contre la rhétorique du pouvoir (et l’humour selon lui est bien une catapulte), il invite à lorgner vers deux figures, celle d’Andy Kaufman et de Toyama Koichi, ce dernier préfigurant la nouvelle ère du rire, « agressivement drôle ». Pour conclure sa philippique, Pacôme Thiellement prévient : « Nous devons être plus forts que la drôlerie et plus drôles que la violence ». La dérision n’a aucune place dans ce livre totalement décapant. Guy Darol

     

    TOUS LES CHEVALIERS SAUVAGES, TOMBEAU DE L’HUMOUR ET DE LA GUERRE, Pacôme Thiellement, Éditions Philippe Rey, 192 p., 17 €


     

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    LES EDITIONS PHILIPPE REY





  • CHANSONS TOMBEES DE LA LUNE

     "Le génie, c'est l'enfance retrouvée à volonté", 

    Baudelaire

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    Arthur ne peut pas s’endormir. La Lune attire son regard vers la fenêtre de sa chambre. Au milieu du jardin, un tourne-disque monumental dresse son pavillon vers le ciel. L’étrange objet n’est pas si effrayant. Le garçon s’en approche et découvre la présence d’un petit personnage. Le Sélénite aimable lui raconte son aventure. Son vaisseau est tombé en panne alors qu’il faisait des loopings dans l’espace. Et il a atterri dans le terrain de jeu d’Arthur. Le moyen de le faire repartir est très inattendu. L’engin ne carbure pas à l’essence mais à la musique. Le tourne-disque passe des airs qu’Arthur devra simplement fredonner. Suivent neuf historiettes qui auraient pu sortir des chapeaux de Tim Burton, de Jean Tardieu ou encore d’Edward Lear. Neuf chansons hypnotiques (tout de même, il faut bien retourner se coucher !) tournées par les voix d’Arnaud Le Gouëfflec et d’ooTiSkulf, les guitares de John Trap et les instruments-jouets de Chapi Chapo. Une draperie sonore entremêlant dragons miniatures, dinosaures, monstres en papier mâché et une fille qui court plus vite que les garçons. Le charme opère. Musique de haute envolée et paroles finement jardinées composent ce beau livre (avec CD) illustré par Laurent Richard  et destiné aux enfants rêveurs (à partir de 3 ans) pour qu’ils ne s’endorment plus sur des berceuses décérébrantes. Guy Darol

     

    CHANSONS TOMBÉES DE LA LUNE, Arnaud Le Gouëfflec, Chapi Chapo, John Trap, Laurent Richard, Éditions L’Église de la Petite Folie , 36 p., 14 €

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    CHANSONS TOMBÉES DE LA LUNE

    L'ÉGLISE DE LA PETITE FOLIE


    Monsieur Fantôme


    Les dinosaures


    On joue à se faire peur


    Qui a éteint la lumière ?





  • MARC BERNARD A SARCELLES

    Marc Bernard.JPGIl n’est pas remonté de l’oubli aussi durablement qu’Emmanuel Bove, Henri Calet ou Raymond Guérin mais l’opiniâtreté de Stéphane Bonnefoi et l’enthousiasme d’éditeurs comme Le Dilettante et Finitude parviennent à nous le rendre vivant. Marc Bernard (1900-1983) qui mourut chez le docteur Paradis est un écrivain forgé à l’optimisme qui se fit lui-même dans un monde où l’on est garçon de course à douze ans, fraiseur à quinze. Il se fait remarquer en 1929 avec la publication de Zig-Zag, chez Gallimard, puis enchaîne les succès en obtenant le Prix Interallié pour Anny (1934) puis le Goncourt (1942) avec Pareils à des enfants …, récit bien émouvant d’une enfance marquée par « le drame réel ». Auteur d’une vingtaine d’ouvrages, Marc Bernard fut aussi journaliste, et d’abord à Monde, hebdomadaire d’information littéraire, artistique, scientifique, économique et sociale, qui aligne dans son comité directeur les noms d’Albert Einstein, Maxime Gorki et Upton Sinclair. D’obédience communiste, le journal réunit des écrivains parmi lesquels Henry Poulaille. Dans les colonnes de Monde, Marc Bernard déclare qu’il existe un art prolétarien. Il défendra cette position en fondant, en 1932, avec Poulaille et Tristan Rémy, le Groupe des écrivains prolétariens.

     

    Mais c’est le romancier ayant exploré chaque centimètre de la ville de Nîmes (il y est né) dont on se souvient de façon plus nette. Dans son Histoire de la littérature française, Jacques Brenner le présente comme celui qui fit de Nîmes « le personnage principal d’un triptyque romanesque, Les Vivants et les Morts. » Comme il est dit par ce fin connaisseur des Lettres, Marc Bernard « n’a pas choisi un personnage conducteur pour la promenade à laquelle il nous invite. » Nîmes en est le centre et la circonférence. Marc Bernard est fait d’encre et de sang nîmois. On ne se doutait pas qu’un enfant du pays puisse un jour explorer, avec autant de science et d’humanité, Sarcelles, ville nouvelle.

     

    À la demande de Jean Duché, son éditeur, il s’installe trois mois durant dans ce grand ensemble, alors coruscant, et rédige un livre publié en 1963 selon la seule méthode qui est la sienne, celle de l’immersion fraternelle. « Je ne voulais rien affirmer que je n’aie connu personnellement », souligne-t-il dans sa préface. Il habite allée Jacques-Rivière, à côté de voies urbaines portant les noms de Paul Claudel, Marcel Proust et Paul Valéry. André Gide y a sa place. Tout est impeccable dans ce paysage tracé au cordeau et qui embaume la campagne voisine où pousse le froment, le seigle et des arbres fruitiers. Il semble que le bonheur y soit possible. Le logement est une divinité où l’ouvrier « se déchausse sur le seuil comme s’il entrait dans une mosquée. » C’est une ville pilote où l’on flâne et où l’on s’initie, aux heures perdues, à la reliure, au tissage et à la vannerie. « Le pain sarcellois a une légèreté, un croustillant, un doré qui en font un délice, une invention moderne. » Tout est bon au goût et sublime aux yeux.

     

    Aux abords de la ville nouvelle, le vieux Sarcelles, avec ses murs croûteux et ses cours délabrées, dégage une impression de basse-fosse. On ne regrette pas de quitter ses ruelles méandreuses pour rejoindre la cité « rigoureusement ordonnée, hérissée de tours. » La culture y est invitée qui permet aux Sarcellois d’aller à la rencontre de Henry de Monfreid, de Christiane Rochefort, de Pierre Gascar, d’entendre Jean Vilar parler théâtre. On y organise des expositions consacrées à Van Gogh et à Albert Camus. La ville nouvelle est l’emblème de la culture qui vient au peuple. « On se prend à rêver que ceux qui s’en écartaient parce qu’elle leur semblait inaccessible, en la trouvant à leur porte, au bout de la rue, au centre de la cité, seront tentés de la mieux connaître. » L’architecte Labourdette prévoit même, parmi ses constructions à venir, la création d’un laboratoire afin de faire naître des vocations scientifiques.

     

    Mais la ville blanche n’est pas tout à fait le Jardin d’Éden et Marc Bernard ne manque pas d’en montrer les aspects boiteux. Un chapitre sur la délinquance expose des faits qui coïncident avec ceux d’aujourd’hui. Son enquête lui fait découvrir qu’on y brise des lampadaires, des vitres de voitures, des fenêtres, des étalages. « On lance la pierre et l’on file sur des semelles de vent, dans la nuit. » Des bandes s’affrontent, surin au poing. Une jeune caissière est violée par quatre garçons, puis rançonnée. La vie n’est pas toujours belle à Sarcelles et Marc Bernard prévoit les lézardes et le chaos dans cette prose chaleureuse, une prose de proximité, qui fait de ce témoin suprême, un voyant au grand cœur. Guy Darol

    SARCELLOPOLIS, Marc Bernard, Éditions Finitude, 221 p., 17 €


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  • PHILIPPE PARINGAUX ❘ IT'S ONLY ROCK'N'ROLL ET AUTRES BRICOLES

     

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    _photo.jpgA moins que vous ne possédiez les 81 premiers numéros de Rock & Folk, ce livre est un compagnon nécessaire. Philippe Paringaux qui en fut le rédacteur en chef y composa, entre 1968 et 1973, de véritables fresques qui ne devaient rien à la musicologie car elles étaient instruites par une écoute et un regard sensibles.  Ses modèles d'écriture, il les avait trouvés dans Jazz Magazine et principalement en lisant Alain Gerber. Il inventera une nouvelle langue pour évoquer Frank Zappa, Miles Davis, le Festival de Bath, les Beatles, Moondog ou encore Otis Redding, celui par lequel il entrera en littérature. Car c'est bien de cela qu'il s'agit. Philippe Paringaux est un lecteur passionné et son bagage considérable devait transporter toutes les fines plumes du XIXème siècle. C'est un constat que l'on fait en suivant le fil de ses phrases qui s'origine dans une bibliothèque. Jacques Colin qui lui succédera dans les années 1980 rappelle la puissante impression qu'avait produit sur lui Rose Poussière de Jean-Jacques Schuhl et Femina Marquez de Valery Larbaud. Ses Bricoles qui ne tenaient guère compte de l'actualité musicale témoignent de son intention : Philippe Paringaux se vivait d'abord comme un écrivain. Rock & Folk était son scriptorium. Guy Darol


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  • RAYMOND GUERIN ET CURZIO MALAPARTE


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    Curzio Malaparte à Capri


    raymond-guerin.jpgIl faut un ciel bleu, un soleil comme une forge et l’oisiveté en traversin pour goûter pleinement au récit de Raymond Guérin. Une aventure à peu près immobile mais vécue en altitude, à hauteur de Curzio Malaparte et de sa casa « Come Me », voici ce que nous conte l’auteur de L’Apprenti, le mirifique inventeur de La Confession de Diogène. On nous le réveilla en même temps que Bove, Calet, Forton, Gadenne, Hyvernaud, Paroutaud. C’était au temps des années 80, celui de la new wave mais aussi de la revue Les Grandes Largeurs qu’emmenaient Dominique Gaultier et Guy Ponsard et ils nous emmenaient loin. De cette époque où l’on ressuscitait des morts, nous ne sommes guère descendus de la hune où se voit très bien chaque réapparition de Raymond Guérin.

    Alors qu’il vient de publier Parmi tant d’autres feux…, l’écrivain qui sans cesse se dérobe à la sanction d’une étiquette – son style est celui d’un Protée – se rend à Capri, pour trois semaines, à l’invitation du solitaire capriote. Solitaire mais fort entouré, Curzio Malaparte est l’homme de la Technique du coup d’État qui se fit bâtir en 1937 un palais céleste sur la pointe de Massullo où viennent se détendre ou se ressourcer Churchill, Rossellini, Moravia ou encore Le Corbusier. Ce dernier ne trouvera jamais de mots assez exclamatifs pour décrire l’impression que lui fait cette villa en forme de parallélépipède que Jean-Luc Godard nous a permis de visiter et de revisiter dans son film Le Mépris.

    En mars 1950, Raymond Guérin franchit le seuil de la villa gratte-ciel muni de carnets et de crayons valant une caméra légère. Tout nous est montré et d’abord chacune des pièces sans miroirs et les murs où sont accrochés Matisse et Chirico, Zadkine et Delaunay. Surtout, deux écrivains se rencontrent qui livrent des points de vue sur l’écriture et sur les hommes. À 52 ans, Malaparte avoue sa préférence pour « la société des bêtes » et L’Âne d’Or d’Apulée. Il explique que ses maîtres sont ceux « qui battirent en brèche tous les illuminismes : Montaigne, Voltaire, Montesquieu, Stendhal. » L’éblouissant auteur de Kaputt et de La Peau se fait admirateur qui dit envier Guérin d’avoir écrit ses livres dans un « style dru et fruité. » Tout est fondant dans ce récit, juteux à souhait, solaire, et l’on se croit à chaque page l’hôte d’un magicien qui nous persuade que l’Italie est « féodale, familiale, fétichiste et fasciste. » Pour Guérin, il s’agit de crever un abcès de mensonges afin que Malaparte nous devienne transparent. Ce livre, en effet, s’élabore alors que le romancier et polémiste capriote est perçu comme un satrape vivant au milieu de ses bayadères, si possible vêtu de culottes de velours pivoine et chaussé de sandales vertes. Du côté de chez Malaparte a pour vertu de nous présenter un habitant du ciel sous l’aspect d’un simple. Et c’est ainsi que Guérin est grand ! Guy Darol


    DU CÔTÉ DE CHEZ MALAPARTE, Raymond Guérin, Éditions Finitude, 124 p., 13,50 €


     

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