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alain bashung

  • LIRE LA MUSIQUE 5

    Entre 2009 et 2012, Lire la musique, ma chronique (transverse) fut publiée dans Le Magazine des Livres aujourd'hui disparu. En voici le feuilleton complet.


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    MILLE BASHUNG

     

    Musiciens consanguins, Serge Gainsbourg et Alain Bashung seront bientôt unis dans une même célébration par le chorégraphe Jean-Claude Gallotta. L’homme à la tête de chou, artefact sonore édité en 1976, décrivant les bûches d’une « petite shampouineuse assez chou » et les embûches d’un cœur bouillant, prendra chair et envol sur la scène de la Maison de la Culture de Grenoble dès le 12 novembre, prélude à une tournée aux cinq coins de la France, avec une halte conséquente au Théâtre du Rond-Point. Dans le même temps, À perte de vue, coffret composé de 27 CD, révélera la totalité de la discographie officielle de Bashung, augmentée de deux albums réalisés avec Chloé Mons, de bandes originales de films, d’enregistrements public, d’inédits, de raretés. Tout Bashung ou presque. Ce serait sans compter avec l’exercice biographique dont rend compte la librairie depuis la disparition du compositeur-interprète le 14 mars 2009. Et l’on aurait tort de croire que l’exégèse en restera là. Dans son monumental Gainsbourg, le pointilleux Gilles Verlant dénombrait, neuf ans après la mort de l’à-quoi-boniste, une vingtaine de coups de gapette. On peut prédire que l’édition ne fera pas moins  pour nous repaître d’Alain Bashung.

     

    Pour l’heure, trois volumes avec et sans grumeaux détaillent l’œuvre et la vie d’un homme qui nagea longtemps au large avant d’atteindre les rivages de la notoriété. Bashung s’impose en 1980 avec le succès de Gaby oh Gaby, après voir sué le perfecto à l’usine de Dick Rivers dont il fut l’arrangeur. Cette gloire acquise à l’obstination ne le rend pas ivre de facilité. Plutôt qu’enfiler les couloirs à smash hit, Bashung bifurque, emprunte des voies flexueuses, préfère la révolution permanente au roucoulant train-train. C’est ce parcours d’obstacles que dessine Marc Besse dans un ouvrage patient, tissé au cours de huit années et résultant de deux cents heures de conversation. Une sorte d’exploit physique, effusif, fraternel. On ne trouve rien à redire.

     

    De Patrick Amine, auteur d’Une vie, une déflagration (Denoël, 1985), livre d’entretiens avec Louis Calaferte, j’attendais qu’il nous mène au-delà de William Burroughs et de la méthode du cut-up, j’espérais qu’il glisse de Philip K. Dick à Jean Tardieu auquel rendait hommage Mortel battement/Nocturne, poème figurant sur l’album Organique de Zend Avesta. Bashung, magicien de la sphère sonore, a si souvent montré sa dilection pour les hardiesses verbales, nous étions curieux de connaître sa bibliothèque. Le livre de Patrick Amine est une biographie condensée, nourrie de précieux témoignages (Arman Méliès, Boris Bergman, Jean Fauque, Marc Hollander, Patrice Bollon, Hervé Di Rosa…) et de discussions avec un Bashung dont la connaissance musicale s’étend à des contrées secrètes où l’évocation d’Emmanuel Bove et d’Albert Marcœur force la plus saine curiosité.

     

    Pierre Mikaïloff, auteur de sommes talentueuses dédiées à Françoise Hardy et Bernard Cantat (Éditions Alphée), transcende le genre. Son Vertige de la vie est une réussite d’écriture. Composée dans un style qui est celui de l’empathie, cette biographie approche Bashung par des routes intérieures. Buddy Holly, Johnny Cash, Léo Ferré (trois cartes majeures dans son jeu) conduisent ici à Antonin Artaud dont il était assurément issu. Guy Darol

     

    BASHUNG(S), UNE VIE, Marc Besse, Éditions Albin Michel, 336 p., 20 €

    ALAIN BASHUNG, MONSIEUR RÊVE ENCORE, Patrick Amine, Éditions Denoël, 215 p., 13,50 €

    BASHUNG, VERTIGE DE LA VIE, Pierre Mikaïloff, Éditions Alphée/Jean-Paul Bertrand, 445 p., 21,90 €

  • DIGITAL AUDIO TEPR

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    Si le rap est un pandemonium, Tanguy Destable alias Tepr figure parmi les dieux de l’Hadès. Après le sombre, très sombre, The Deadly Master Of Rappers From Hell, il livre une suite enflammée. Côte Ouest est une invitation à remuer sur les braises du hip-hop le plus chaud du moment. Moitié d’Abstrackt Keal Agram, un duo actif dans le renouvellement d’un genre ciselé par Dr. Dre, Timbaland et les Neptunes, Tepr fait partie de ces têtes de proue qui ont modifié l’esthétique du hip-hop à la suite de DJ Shadow.
    Difficile d’inclure ce maître du laptop dans une mosaïque. Il défend une culture très mixte où le rock bilieux de Chokebore tolère l’électronica elliptique de Clouddead. Mais il semble que l’intérêt qu’il porta longtemps aux raffinements plaintifs de Boards Of Canada aient buté sur un retour de flammes. Sans tourner le dos au style cérébral et tourmenté de son premier album, Tepr glorifie désormais l’union des corps en mouvement et la dialectique gyrovague des dancefloors. Après avoir sévèrement électrisé le Festival Astropolis, il s’explique sur sa démarche que l’on qualifiera, vous l’avez compris, de sautillante. Tepr n’aime pas (mais alors du tout) se faire agrafer. Son prochain opus, assurément, trouera le filet des pêcheurs de gros.


    Qu’est-ce que Tepr ? Un hip-hop mutant post-sérialiste ou une nouvelle aube pour la house ?


    Ni l’un ni l’autre. C’est mon envie de travailler seul à l’élaboration de ma musique, qu’elle soit électronique ou non. Bon, là, il se trouve que ce que je fais est électronique.


    La nonchalante mélancolie qui traversait votre précédent opus évoquait le minimalisme de Philip Glass, le cinémagisme de Ryuichi Sakamoto ou encore les micropolyphonies de György Ligeti, auriez-vous bradé ces nobles références contre des petites frappes de la musique populaire et quelles en sont les icônes ?


    Ce sont des influences que je revendique toujours mais en ce moment, j’ai besoin de sentiments directs, d’où mon respect pour beaucoup de producteurs actuels qui arrivent en une boucle à te faire rentrer une chanson dans la tête pour les trois mois à venir. Quelqu’un comme Jacques LuCont (Les Rythmes Digitales) est très fort pour ça ainsi que Feadz d’une certaine manière. Mais plein d’artistes m’ont marqué ces dernières années, M Oizo, Jackson, Diplo, Timbaland, Errorsmith … ces mecs cherchent vraiment à faire avancer les choses. Mais les anciens sont toujours d’actualité. Et j’ai toujours envie de courir les bras en l’air quand j’écoute « Kids In America » de Kim Wilde.


    Côte Ouest est plutôt secouant. La musique y joue vite. Les rythmes sont saccadés. Faut-il conclure que vous ne vous adressez plus aux mélomanes studieux avachis dans un sofa pourpre ?


    A travers ma musique, je m’adresse essentiellement aux filles. Après les avoir fait pleurer dans leur chambre avec The Deadly Master, le but de Côte Ouest est de faire surgir des cascades de sentiments digitaux dans leurs cœurs et surtout de les faire danser.


    A l’exemple de Paul D. Miller alias DJ Spooky, docteur ès lettres que vous avez fréquenté, vous êtes diplômé des Beaux-Arts, qu’est-ce que ça injecte dans votre musique ?


    Au départ, un côté un peu « intello-bleep-expérimental-chiant » mais j’en suis revenu et je ne regrette pas du tout cette période. J’ai fait cinq ans de Beaux-Arts, c’était cool, ça me laissait le temps de faire mes concerts et j’avais des bourses. La belle vie.


    À propos de fréquentation, vous avez accompagné Alain Bashung, Rodolphe Burger, The Herbaliser, qu’est-ce qu’un rappeur de l’enfer a à voir avec ce beau linge ?


    Burger, Bashung, The Herbaliser, même si je ne suis pas fan de tout (mis à part Bashung), il faut reconnaître que ces artistes aiment créer des rencontres musicales et c’est tout l’intérêt de la démarche « créatrice » : aller chercher la confrontation pour mieux avancer. Mais The Herbaliser ne sont définitivement pas mes amis.


    Après avoir travaillé avec David Gauchard, metteur en scène d’un Hamlet très electronica, avez-vous des projets multimedia d’envergure ou des envies complètement folles ?


    Je dis stop à l’overdose d’images. On ne peut plus voir un live sans se taper des vidéos avec des pixels ou des images de bâtiments en super 8. Quand je viens voir un mec jouer en live, je suis pas au cinéma. J’ai vu tellement peu de trucs qui m’ont plu que mon jugement est assez dur à ce sujet. Il faut arrêter de nous vendre ce concept comme LE FUTUR. Il n’y a rien de plus fait et refait que de coller une image sur de la musique. C’est heureusement en train de changer avec des mecs comme Gangpol und Mit, Pfadfindedrei & Modselektor …


    ECOUTER :


    « The Deadly Master Of Rappers From Hell » (Idwet/La Baleine)

    « Hamlet » (Idwet/La Baleine)

    « Côte Ouest » (Idwet/La Baleine)

    SEE :

    www.myspace.com/tepr

    http://tepr.free.fr

    www.idwet.com

    www.chez.com/wart

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