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folk

  • LIRE LA MUSIQUE 19

    Entre 2009 et 2012, Lire la musique, ma chronique (transverse) fut publiée dans Le Magazine des Livres aujourd'hui disparu. En voici le feuilleton complet.


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    LES NEUF DÉCENNIES DU FOLK

     

    Philippe Robert et Bruno Meillier sont deux vigies des océans de musique. Le premier est l’auteur de nombreuses sommes ouvrant des voies depuis les rivages buissonneux de la pop et du rock vers des trésors souvent oubliés. Le second fut le saxophone du groupe Etron Fou Leloublan. Il est l’organisateur-programmateur du festival Musiques Innovatrices à Saint-Étienne et le label-manager de la structure de distribution Orkhêstra International qui est l’une des sources les plus sûres pour qui cherche à s’abreuver en raretés (jazz, rock, musiques savantes, traditionnelles, improvisées). À eux deux, ils sont capables de déplacer des montagnes, notamment celles qui résultent de l’accumulation des poussières recouvrant les zones de la vraie musique.

    Ils viennent de tracer la seule route qu’il convient de suivre pour découvrir le vaste palais du folk, un monument dont les premières pierres furent posées en 1927. Tel un parcours chronologique, Folk & Renouveau, déroule, année après année, l’histoire d’un mouvement issu de la rencontre des sea shanties, des chants indiens et des cantiques de la tradition méthodiste évangélisatrice. Une pâte musicale chansonnée par les fermiers US qui deviendra une multitude de façons dont les artisans se nomment Woody Guthrie, Joan Baez, Bob Dylan, Buffy Sainte-Marie ou encore Bert Jansch. Ceci n’est pas un panorama, nous disent Philippe Robert et Bruno Meillier, en s’excusant de ne pas être exhaustifs. Certes, il faudrait bien des volumes pour couvrir toutes les pages de la folk music. Tout de même, voici quelque chose de suffisamment grand pour connaître le mouvement sous tous ses aspects à partir de la famille chantante des Carter jusqu’aux perpétuateurs, de Joanna Newsom à Simon Finn qui vient de faire paraître un nouveau disque, Through Stones (Ten To One/Orkhêstra International). Les Lillois auront la chance de pouvoir l’entendre à La Malterie (42 rue Kuhlman), le 22 février.


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    Parmi les quelques cent soixante noms cités dans ce livre, il en est un que nous aimons particulièrement. Michael Hurley, né en 1941 à Bucks County (Pennsylvanie), est un homme de la route de l’école Kerouac. Il a dix-sept ans lorsqu’il entreprend sa dérive à travers l’Amérique. En 1964, il est signé sur le label Folkways (celui-là même qui précisa les carrières de Pete Seeger, de Woody Guthrie et de Dock Boggs). La légende veut que First Songs fut enregistré sur un magnétophone à cassettes ayant appartenu à Leadbelly, figure à rixe du temple folk. La vérité veut que Michael Hurley fit débouler le folk dans la musique psychédélique. D’où le mirobolifique Have Moicy ! (1976) réunissant un héroïque buveur de bière et les Unholy Modal Rounders de Peter Stampfel. Écoutez "Fooey Fooey", cet hymne country qui mêle le sentiment à la farce des dériseurs sensés. Et lisez Paroles des chansons de Michael Hurley, un tour de force de traduction réalisé par Marie Frankland précédé d’un éloge du rock critic Byron Coley. Qu’est-ce que ces chansons ? Un déversement d’images loufdingues accompagnant la dérive, une suite de signaux sur le bord de la route : hiboux, loups-garous, anges déchus, pourceaux oubliés, homme vert pâle, flammes dans le prisme du Knockando, bière grasse, revenant mort, vaisselle empilée et désespoir. Une allégorie d’humour fuligineux. Dans ce magnifique livre cousu main, Michael Hurley a calligraphié dix-neuf de ses chansons. Il y avait Arthur Cravan dans l’Anthologie de l’humour noir établie par André Breton (cette Bible du meilleur des mondes !). Le pape noir n’y aurait-il pas insinué Michael Hurley, poète et dessinateur extravagant ? Je me demande. Je le crois. Guy Darol

     

    FOLK & RENOUVEAU

    UNE BALADE ANGLO-SAXONNE

    Philippe Robert et Bruno Meillier

    Éditions Le Mot et le Reste

    360 p., 23 €

     

    PAROLES DES CHANSONS DE MICHAEL HURLEY

    Bilingue, traduction de Marie Frankland

    Éditions L’Oie de Cravan

    48 p., 14 €

  • FAT FREDDY'S DROP ❘ BASED ON A TRUE STORY ❘ 2005

     

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    Comme le purple haze des voyages versicolores, le fat freddy's drop désigne un acide qui permet de repeindre sans effort la chapelle Sixtine. Le septet de Joe Dukie propulse l'imagination dans des contrées assurément psychédéliques sans qu'il soit utile de recourir au chaudron lysergique. Il suffit de se détendre au son reggae dub de cette suave musique d'intérieur pour atteindre des sensations voisines de ce que l'on nomme communément le bonheur. Based On A True Story est un très bon premier album né à Wellington  (Nouvelle-Zélande) des amours d'un singer songwriter ayant eu un grand-père confondu avec la légende de Duke Ellington et de l'underground saga comix de Gilbert Shelton : The Fabulous Furry Freaks Brothers. Drôle de mélange me direz-vous. L'origine de ce combo qui met en avant cuivres et claviers est aussi trouble qu'est limpide sa musique (totalement vénérée par Gilles Peterson), à la condition toutefois que l'on admette certaines interférences. La force de cet album est de puiser dans les capillaires qui allient folk et soul, roots et électronica, ambiances éthérées nostalgia (façon Wax Tailor) et funk drum'n'bass réussi (manière Treva Whateva). Guy Darol

     

    FAT FREDDY'S DROP

    Based On A True Story

    (Kartel/Discograph)

    CONSULTER

    FAT FREDDY'S DROP

  • LAURENT GIRARD AKA MELODIUM

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    Laurent Girard aka Melodium ne donne jamais de concert. Sa musique (laptop au début) est d’intérieur et elle vise l’intérieur des êtres. Après La Tête Qui Flotte (Autres Directions In Music, 2005), un moment de très calme electronica, Music For Invisible People confirme Melodium, odyssée solitaire dans les espaces de la mélancolie pop.

    medium_Numeriser0017.4.jpgAlbum de haute solitude composé lors d’un séjour sur l’île d’Oléron, Music For Invisible People garde la ligne flexueuse. On reconnaît immédiatement la marque, comme un voyage au-dessus des abîmes. Mais un voyage dans un module souple. Le siège est onctueux. Les commandes sont dans le cœur du voyageur. Et c’est une circulation magique, une complicité par les ondes, la musique de Laurent Girard aka Melodium nous fait ressentir l’élévation, une petite poussée vers le haut qui envoie en l’air. Et il y a un peu de cela dans Music For Invisble People, un peu du duo Air, un peu de l’ex-Grandaddy, un peu de l’infinie possibilité des pianos et guitares jouets (Pascal Comelade) et dans la voix, l’évanescence de Robert Wyatt.

    MELODIUM

    MUSIC FOR INVISIBLE PEOPLE

    AUTRES DIRECTIONS IN MUSIC/LA BALEINE

    Sortie : 15 novembre 2006

    ECOUTER MELODIUM

    VOIR ET ENTENDRE MELDIOM

    www.autresdirections.net

    www.myspace.com/autresdirectionsinmusic

    www.myspace.com/melodium

    Et voici ce que j’écrivais dans Muziq # 4 à propos de La Tête Qui Flotte :

    MELODIUM

    LA TÊTE QUI FLOTTE

    AUTRES DIRECTIONS IN MUSIC/MUSICAST

    medium_Melodium_5.jpgL’une des plus belles sensations acoustiques de l’année. Melodium alias Laurent Girard vient de confectionner un rare masterpiece avec les moyens du bord. Multi-instrumentiste (mini-disc portable y compris) ingénieux, Melodium ne jaillit pas de nulle part. Après avoir signé chez Active Suspension et Disasters By Choice, il livre avec Anaemia (publié chez Audio Dregs) un recueil remarqué en 2004. La Tête Qui Flotte est le résultat d’une exploration musicale au grand air. En effet, sur plusieurs plages, cet Angevin malin enregistre, en forêt ou dans la prairie, des guitares folk, des flûtes de collège, des masses cognant un billot, des claquements de doigts ou encore des tapes sur la couture du pantalon. Fan de cordes, il digitalise des violons, faute de pouvoir engager d’authentiques concertistes. L’album est par ailleurs nourri par des guimbardes, melodicas, xylophones, balafons, également des claviers qui humectent les yeux. Cette perfection sonore évoquera pour certains (notamment sur « Baromètre Mental ») les arrangements de Yann Tiersen. Ailleurs, on croirait entendre, il est vrai, des inédits de Boards Of Canada ou de Skyphone. En vérité, Melodium ne nous accorde que deux comparaisons : Max Richter et Plaid, longues figures du style downtempo. À mon avis, La Tête Qui Flotte est une pièce considérable dans l’histoire des musiques électro-acoustiques et un grand moment de pop raffinée. Un vrai souci pour les têtes de classe de l’electronica harmonieuse, genre Air, par exemple. Guy Darol