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jean-jacques pauvert

  • JEAN-PIERRE MARTINET

     

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    J’ai lu La Somnolence dès que possible, c’est-à-dire à parution. Le roman publié en 1975 par Jean-Jacques Pauvert était à la hauteur de mes attentes, celles que récompensent généralement les romans d’Hubert Haddad, d'Yves Elléouët ou les récits d’Yves Martin. Il y a chez Jean-Pierre Martinet (1944-1993) cette vision du dedans d’où s’extirpent des personnages à double face, sortes de fugitivus errans dont le présent est dans le songe. La mort est un sujet de prédilection chez l’auteur de Jérôme (Le Sagittaire, 1978) et le chemin pour s’y rendre se nomme éventuellement folie. Je dis folie mais peut-être vaudrait-il mieux calligraphier en tremblant chaque lettre du mot hallucination. Avec Jean-Pierre Martinet, quand l’hallucination va, tout va. Et il est peu d’écrivains depuis Gérard de Nerval ou Xavier Forneret qui possèdent à ce point le don d’évanescence, la magie qui fait se multiplier les visages, surtout quand ils sont flous.

    Adolphe Marlaud, le traversier de La grande vie, nouvelle parue en 1979 dans la revue Subjectif, est un homme dont la vie plonge sur un cimetière. Il demeure rue Froidevaux, dans un immeuble voisin du terminus « qu’aimait tant Strindberg ». Il est absorbé par une femme engloutissante, sentimentale. Elle lit Max Du Veuzit, Guy Des Cars, Gilbert Cesbron, Didier Decoin. Dans cette nouvelle où l’on flirte avec les glaires et le glas, il fait froid comme dans la vie à zéro degré. Il n’y a rien à se mettre sous la dent, rien à espérer qui soit mieux que la vie. Pas un gramme de sucre à lécher. Des cendres et le granit des tombes. Bien sûr il est question d’Henri Calet comme dans Nuits bleues, calmes bières, une brève histoire d’ivresse préférable à la stabilité de la marche. Ici, le narrateur n’a qu’un seul pays et c’est le zinc, sa « carte du tendre ». Il est seul et mutique et lit d’un trait Emmanuel Bove en buvant vite, en buvant beaucoup.

    Il est question d’Yves Martin qui fut un compagnon de virées plus ou moins nyctalopes mais aussi de Louise Brooks. D’ailleurs on y parle de Bartleby, d’Henry James et de Legs Diamond, chère aux mirettes de Martinet.

    « La bière l’aidait à supporter l’horreur de sa condition. Putain de mort. Aussi sale que la vie, finalement. » Dans l’un et l’autre de ces livres, Éric Dussert et Alfred Eibel nous aident à suivre le parcours. Un parcours rapide en trois romans et un essai avec ci et là quelques cailloux lâchés dans la ville, des perles devrais-je dire, rubis d’éternité plutôt car Jean-Pierre Martinet est un écrivain dont on se souviendra pourvu que l’on me croie.

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    DE JEAN-PIERRE MARTINET

    La Somnolence, Jean-Jacques Pauvert, 1975

    Un Apostolat d’A. T’Sertevens, misère de l’utopie, Alfred Eibel, 1975

    Jérôme, Le Sagitaire, 1978

    Ceux qui n’en mènent pas large, Le Dilettante, 1986

    L’Ombre des forêts, La Table Ronde, 1986

    La grande vie, L’Arbre Vengeur, 2006

    Nuits bleues, calmes bières suivi de L’orage, Finitude, 2006

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    EDITIONS FINITUDE

    EDITIONS L'ARBRE VENGEUR

    EDITIONS LE DILETTANTE

     

  • JEAN-MARC DONNAT EVOQUE THEO LESOUALC'H

     

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    Il y a quelques jours, le 28 novembre, j'ai eu l'occasion de me libérer un peu d'un poids de tristesse au travers de ces quelques mots : Théo est mort... C'était un homme de 78 ans, malgré son âge le terme de vieux ne lui convenait pas, bien droit, bien mince, ses cheveux longs jusqu'au milieu du dos. Il allait de son pas d'ermite et il me fascinait. Il me parlait de gens, de pays, de temps que je n'ai pas connu mais qui font rêver: Bombay, le mime Marceau, Colombo, Tokyo, Yoko Ono, Mishima ... Avec Alain, nous allions le voir, nous parlions des heures, il nous racontait sa vie ses voyages en auto stop, la Turquie, l'Iran, la Suède, l'Italie... Il avait écrit des livres, il nous les montrait. Ses éditeurs étaient Jean-Jacques Pauvert, Christian Bourgeois... Son nom : Théo le Soualc'h, né en 1930 à Paris, mort le 28 Novembre 2008, aux environs de 10 heures du matin au mas brûlé, Font de Rouve 30340 ROUSSON.

    Google connait bien Théo, écrivain underground des années 60. Il n'aimait pas beaucoup Jack Kerouac, son presque exact contemporain, son alter égo du nouveau monde. Il le trouvait larmoyant, en appelant à sa mère toutes les trois pages de ses livres. Voilà l'homme un peu situé. Son univers c'était les voyages, la littérature, le théâtre d'avant garde (ah! les happening de Yoko Ono!). Nous avions le sentiment de connaître quelqu'un pour le moins spécial.

    Théo est mort, je le sais bien, parce qu'Alain et moi, nous l'avons trouvé tout à l'heure au milieu de ses chats. Froid. Étendu par terre, le feu encore tiède dans sa cheminée, le thé pas bu sur sa minuscule table de travail. Il avait finalement l'air beaucoup plus paisible que les masques crispés qu'il fabriquait. Belle mort sans souffrance, sans avoir conscience de l'arrivée de la faucheuse. Le SAMU appelé, nous cherchons des traces de la nièce qu'il avait évoqué. Carnet d'adresse. L'abécédaire de Théo était sinon extraordinaire, au moins "relevé", pour lui c'était A comme Alfredo Arias, L comme Jorge Lavelli, S comme Barbet Schroeder... Je n'ai retenu que ceux-là et je suis sûr d'en avoir manqué et des meilleurs, suite à mon inculture chronique. Entre-temps, les gendarmes sont arrivés, un médecin est en route, le Maire vient voir... Nous pouvons partir, un dernier tour dans le jardin fantastique du mas brûlé... Les murs deviennent sculptures, la serre à la forme d'un œuf. Beau.

    Une dernière anecdote : Milieu des années cinquante Bangkok, Théo rencontre une jeune femme (pré)nommée Marayat. Ils passent du bon temps sous l'oeil complaisant du mari... Glauque oui, mais quelques mois plus tard sort un livre et dix ans plus tard, un film, ce sera Emmanuelle de Just Jaeckin. Leur histoire. Le mari, attaché d'ambassade est connu, sinon reconnu, dans le monde littéraire sous le nom d'Emmanuelle Arsan. Sacré Théo ! J'aurais tant aimé parler encore et encore avec toi, par exemple du Leaving Theatre que tu connaissais si bien (ta bibliothèque me l'a dit). Mais tu as bien fait de mourir ainsi, je ne te voyais pas en maison de retraite et là, je sais de quoi je parle. Jean-Marc Donnat

  • JEAN GOURMELIN

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    JEAN GOURMELIN : L'UN DES

    DESSINATEURS LES PLUS IMPORTANTS DU XXe SIÈCLE

    REVIENT SUR LE DEVANT

    DE L’ACTUALITÉ

    À L’OCCASION

    DE LA PARUTION PRÉVUE

    D’UN ALBUM

    COMMÉMORATIF DE SON ŒUVRE

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    85 ans dont 75 au service du dessin et de l’illustration

    Né en 1920, Jean Gourmelin, âgé en 2006 de 86 ans, s’avère l’un des principaux dessinateurs du XXe siècle. Son œuvre dessinée est rentrée désormais dans l’Histoire de l’Art, notamment dans celle des aquarellistes et des dessinateurs de presse et d’humour. Neuf albums édités de 1968 à nos jours, des catalogues d’expositions, des années de collaboration à quelques grands titres de la presse kiosque, notamment Le Point (pendant 13 ans), en témoignent.

    Les éditions Michel Champendal ont programmé un album à paraître intitulé « Jean Gourmelin, une Vie, une Œuvre » car elles estiment qu’il est temps de rendre un hommage ante-mortem à celui qui fut l’un des grands professionnels de son époque.

    Jean Gourmelin dessine avec passion depuis l’âge de cinq ans.

    Un rapide survol biographique nous permettra de mieux approcher l’œuvre, qui intéresse directement nos contemporains.

    Jean Gourmelin naît à Paris le 23 novembre 1920 dans une famille modeste. Unique enfant, il commence à dessiner avec passion dès l’âge de cinq ans et il rencontre, à l’école, un professeur de dessin qui lui donnera confiance en lui. Il vivra les quinze premières années de sa vie à Paris.

    1935 : ses parents quittent Paris pour Vendôme où son père s’établit en tant que grainetier. Deux ans plus tard (Jean Gourmelin est alors âgé de 17 ans), le peintre Charles Portel l’initie à la technique du papier peint, de la gravure sur bois et du pochon. D’abord exécutant, il devient rapidement concepteur pour la maison Nobilis.

    1938 : première participation, à 18 ans, à une exposition collective intitulée « Balzac », au Musée de Vendôme.

    1940 : à vingt ans  il retrouve Paris et s’inscrit aux « Arts Décoratifs » à l’Atelier jandin : il se destine sans succès au professorat de dessin.

    1945 : il entre - pour vingt-trois ans de collaboration - dans l’atelier du célèbre verrier Max Ingrand (il y a travaillera notamment avec Michel Serre, qui  deviendra lui aussi un dessinateur d’humour célèbre). On peut reconnaître, sur les vitraux de la cathédrale de Rouen son style inimitable. C’est donc le « Directeur du Bureau des Dessins  des Ateliers Max Ingrand, passage Tenaille à Paris » qui est à l’œuvre, notamment et également dans les chapelles des châteaux d’Amboise et de Blois.

    1951 : il a trente et un ans et Maximilien Vox lui confie des « reportages dessinés » pour quelques revues dont il a la direction artistique : le dessinateur de presse Jean Gourmelin débute sa carrière internationale.

    1961 : il a quarante et un ans et il rencontre son grand ami l’écrivain Jacques Sternberg, ce qui le destine à consacrer son dessin « non à l’esthétisme mais à l’idée ». Ce qui marque le début de son œuvre historique.

    1962 : son premier dessin paraît dans la revue « Bizarre », une revue qui fut créée par l’éditeur Eric Losfeld puis reprise par son collègue Jean-Jacques Pauvert. Il s’agit du numéro vingt-trois.

    1963 : remarqué par son fondateur Louis Pauwels, dont il deviendra ami, il débute une collaboration qui sera longue et fructueuse avec la revue et les éditions « Planète » (dès le numéro dix).

    1966 : il a quarante-six ans et dessine les décors et les costumes de « Le Golem », un film de J. Kerchbron et Louis Pauwels.

    1967 : première exposition personnelle à la parisienne galerie « Le Tournesol » : très grand succès. Il est remarqué par le Tout-Paris, les éditeurs et les confrères dessinateurs, ce qui l’encourage à l’indépendance professionnelle.

    1968 : il abandonne le vitrail, vit (et vivra) désormais du dessin, en compagnie de son épouse femme au foyer, de sa fille et de son fils. Cette année-là, il illustre, dans France-Soir, alors un quotidien encore très important, les « Chroniques » de son ami Jacques Sternberg.

    1969 : il a quarante-neuf ans et sort le premier de ses neuf albums de dessins intitulé « Gourmelin », aux éditions Planète, avec une magnifique préface de Louis Pauwels pleine d’intelligence, de finesse et de tact. Le voilà lancé dans son domaine de prédilection. Il reçoit le Grand Prix de l’Humour Noir, bénéficie d’une exposition à la galerie Christiane Colin et rencontre Julien Green.

    1970 : à cinquante ans, il crée les décors et les costumes du film « L’Homme qui Rit » de J. Kerchbron, d’après l’œuvre théâtrale de Victor Hugo.

    1971 : 51 ans. Exposition « L’Humour à travers les âges » à la Bibliothèque nationale alors rue de Richelieu.

    1972 : il expose une fois encore à la galerie Christiane Colin et publie aux éditions André Balland un nouvel album de dessins intitulé « Pour Tuer le Temps ».

    1973 : il collabore désormais régulièrement avec la presse (il restera treize ans au sommaire du magazine « Le Point » et travaillera également au « Figaro ») et réalise décors et costumes pour le film « Président Faust » de J. Kerchbron et Louis Pauwels. Il publie une collection d’assiettes peintes, de nos jours fort recherchée.

    1975 : il a 55 ans. Une exposition à la galerie « La Galère » et la publication d’un nouveau recueil de dessins intitulé « Le Hasard » aux éditions André Balland adviennent. Il réalise les décors et les costumes du film « La Grande Trouille » de Pierre Grunstein.

    1976 : l’émission télévisuelle « Fenêtre sur », réalisée par M. Honorin sur la chaîne A2, lui est consacrée.

    1977 : il réalise des affiches pour les spectacles de Robert Hossein ainsi que les décors de « Néfertiti », une pièce d’Andrée Chedid.

    Les années qui suivent, il continue de dessiner pour la presse kiosque, de réaliser des albums de dessins et d’exposer, notamment à Créteil, à Genève et à Bruxelles (en 1882 ce sera à Taiwan).

    Il participe à de nombreux évènements culturels de la fin du siècle passé, notamment à l’émission télévisuelle « Tac au Tac » qui réunit régulièrement sur un plateau et en direct des dessinateurs d’envergures nationale et internationale qui improvisent collectivement. Cette émission obtiendra un très vif succès.

    En l’an 2000, âgé de quatre-vingt ans, Jean Gourmelin, du fait d’une vue chancelante, cessera de dessiner et de peindre. Ce qui ne l’empêchera pas d’exposer. Il est actuellement l’ami des plus grands dessinateurs de France, et parmi eux son supporter de toujours : Bernhard Willem Holtrop dit Willem.

    En conclusion, nous pouvons affirmer, sans crainte de nous tromper, que l’œuvre de Jean Gourmelin fait désormais partie intégrante du panorama culturel historique de la France. Cet artiste est non seulement un maître dans ses domaines (l’Insolite et le Fantastique), mais il a influencé et influence nombre de ses confrères plus jeunes que lui. Pas un Français de plus de cinquante ans qui ne connaisse donc reconnaisse ses dessins du premier coup d’œil, pas un contemporain de moins de cinquante ans qui ne soit intrigué par cette œuvre forte. Il est vrai que tout l’imaginaire des lecteurs et amateurs d’art occidental est baigné de l’œuvre de Jean Gourmelin : ses dessins sont parus dans la plupart des anthologies de la revue « Planète » (il y a même illustré « les Chefs-d’œuvre de l’Epouvante »), dans Zoom, Le Point, Hara-kiri, Plexus, Charlie Mensuel, Pilote, Elle, Les Lettres Françaises, Caractère, France Soir, Le Monde, Le Figaro et Le Matin de Paris, pour n’en citer que quelques-uns parmi les plus renommés. Par ailleurs, que ce soit dans les réseaux de la bibliophilie à petits tirages ou de ceux, à très gros tirages ceux-là, des Clubs du Livre, Jean Gourmelin a illustré les œuvres d’Arthur Rimbaud, de Gaston Leroux, de Pierre Benoît, de Daniel de Foe (son « Robinson Crusoë »), de Guy de Maupassant (« Bel Ami »), de Julien Green, de Claude Klotz (« Les Innommables »), de Lovecraft et de Jacques Sternberg. Jean Gourmelin a également dessiné de nombreuses couvertures de livres, notamment de livres de poche. Louis Pauwels, Robert Sabatier, Jacques Sternberg, Philippe Soupault, Pierre Cabanne, François Cavanna (un de ses amis), Frédéric Vitoux, Julien Green et Yvan Audouard du « Canard Enchaîné », liste non exhaustive, ont écrit sur lui et sur son œuvre prolifique (Jean Gourmelin fut très productif).

    Michel Champendal, éditeur, le lundi 25 septembre 2006