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  • EVERYTHING IS POLITICAL ❘ 4. UN PAYSAGE TOUJOURS CHANGEANT

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    La chance, c’est de sortir les bonnes cartes. Pas d’intellos dans mon milieu. Des métallos, ça oui. Balayeurs de rue, éboueurs, poseurs d’antennes. Ma mère est concepige. Peintres pas du tout sortis des Beaux-Arts, maçons. Plongeurs d’arrière-salle. Serveurs, loufiats, valets de pied. Anciens chemineaux, cheministes. Ramoneurs, petits et grands. Laveurs de carreaux, de sols, de cheveux. Des livres mais pour le décor. Cache-flacons. Faux elzévirs. Folios de carton.

    Qu’est-ce qui tend la main ? La rue.

    Son flot, son flux, son brassage. Les échanges rapides à partir d’un simple mot, d’un signe.

    La chance, ce sont les connivences, le mystérieux désir. Ce qui pousse au-delà de la norme fixe, ouvre des portes que rien n’indique.

    Dans les années 1970, la communauté – car nous vivons ensemble, brassés – est une babel heureuse (Roland Barthes). C’est l’utopie effectuée des mélanges de classes, de langues, de signes. Pas ce que la doxa a vulgarisé sous la forme d’un pandémonium de corps entre eux, abouchés, frottés. De la jouissance il y avait, mais dans des exposés déviants, des ruptures de codes. Délires.

    Toutes ces nuits en cataractes, sans jamais se frotter au possible. Pour se lâcher, pour le plaisir de lâcher mots et paradoxes. Comme de l’abstract music, des champs de notes, océans de sons.

    Crispur est un projet mappemondial, subversif. Pas de mâle dominant. Pas de genre au-dessus de la mêlée.

    On s’est fait hors-school. D’abord avec les écrivains d’actions. Ceux qui appelaient au schproum, à la guerre prolongée grandiose, au grand combat. On est passé ensuite aux agitateurs de formes, issus de Sade & Céline, Gadda, Cummings, Pessoa. Qui dézinguent le monde via l’image pieuse : papamaman, couple moteur, lutte des classes. Qui désamorcent les proses encaustiquées, narrations lisses, très artisanalement patinées. Qui livrent à la déchetterie les chromos, tout mot sans détonateur.

    La mêlée du moment se nomme théorie matérialiste-dialectique de la connaissance et son porte-voix est Mao. Un temps, on se prend au jeu, filet dans lequel s’ébroue Philippe Sollers – dont nous apprécions Lois et H – qui chante la méthode : "Ce qui est révolutionnaire « dévore » ce qui est réactionnaire" *. Dériveurs en quête des brûlots qui assaisonnent l’huile sur le feu, nous fréquentons les édifices de la coopération intellectuelle. Au 72 boulevard de Sébastopol, la librairie Le Phénix menée par Régis Bergeron est un relais de la Chine. Nous y achetons (mais oui !) les brochures de Mao Tse-Toung publiées par les Editions en Langues Etrangères. Dans Décision du Comité central du Parti communiste chinois sur quelques questions touchant le travail actuel à la campagne, l’homme de barre déplore le manque d’intérêt du prolétariat vis-à-vis de la théorie marxiste de la connaissance. Il appelle à l’étude sacrée de la détermination marxiste pour éviter les erreurs. Les camarades ne doivent plus ignorer pour « faire bien leur travail, contribuer de toutes leurs forces à édifier un grand et puissant pays socialiste et enfin aider les masses opprimées et exploitées du monde en vue d’accomplir le noble devoir internationaliste qui nous incombe ». On y croit passionnément, un peu, pas du tout.

    Dominique de Roux au style jaspé-chiné accentue le lyrisme de Sollers. "Mao, maître des eaux remonte le fleuve des bleus mahométans un peu verdâtres, bleus de Chine venus de Perse". L’admirateur de Pound-Gombrowicz brusquement exagère. Ce grand style mis à l’ombre du tout venant, escamoté par les pseudonymies du verbe, auteur de L’Harmonika-Zug, de Maison Jaune, débloque à fond. Il met sur un même plan de travail Mao et Pound. Il dit (la formule n’est pas mal) que Lénine est "le crachat parfumé de Bakounine". Son tort : s’émouvoir en glissant des comparaisons comme l’archet sur le nerf de bœuf. Sollers-de Roux n’additionnent pas les vies soustraites. Ils voient en Mao le poète, une encre provenue du charbon de sapin, un libérateur de la forme et des formes.

    Dominique de Roux : "Les sages descendaient le Fleuve Jaune, fendaient le Bleu du martin-pêcheur, bleu fouetté de la mer, avec beaucoup de ciel. Les Hommes aux grands fronts, représentant le Livre" **.

    Nous trouvons l’alchimie déplacée. La poésie, si l’on accorde à ce mot des effets chaotiques, est bien, selon nous, indissociable de démolition. Il n’y a pas de poésie sans destruction. Si la poésie est inexpugnable, jamais le poète n’encercle. Ou sinon, c’est la messe, "la plus désolée des basse-cour que connaisse l’humanité, et où règnent uniquement bluff, mensonge, snobisme, bêtise et mystification" ***.

    Crispur, à la fin de sa fulgurante vie, appuyée en nouveau sous-titre d’un Gestes pour l’insurrection des langages défend la parole dangereuse. Pas de programme pour anéantir directement les forces de l’ennemi : artillerie à longue portée, gaz toxiques. "Abolir toute forme hiérarchique de l’expression suppose pour Crispur la destruction de tout genre littéraire et la fusion pratique/théorie. Cette convergence ne revendique nullement une belle harmonie. Elle tente de s’inscrire dans la rupture, l’écart" ****. Guy Darol


     

    * Philippe Sollers, Sur le matérialisme – De l’atomisme à la dialectique révolutionnaire m>, 1974.

    ** Dominique de Roux, Le Gravier des vies perdues, 1985.

    *** Witold Gombrowicz, Contre les poètes, 1988.

    **** in Guide de la France des luttes, 1974.

     

  • EVERYTHING IS POLITICAL ❘ 3. LA VOIE

     

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    C’est un parcours que nous portions en nous. Tracé par de malsaines lectures. Celles qui permettent de tenir face à l’institution scolaire. Face aux œuvres imposées qu’il est impossible d’aborder de plain-pied. Racine, Corneille nous étaient jetés en pâture à l’âge de 14 ou 15 ans. On y aurait ajouté Malherbe, on était sûr de nous détourner à jamais de l’espace littéraire. Au fond, c’est cela que nous recherchions en soulevant les jupes des libraires, en grivelant à l’étal des Prisus. On espérait l’aigre des mots, des phrases à torgnoler les maîtres, des textes vengeurs et sales. Semblables à nos boules puantes.

    On finissait par trouver.  Comme la fenêtre que l’on pousse pour passer de la classe à la cour. Issue de secours. Rampe d’escalier à chevaucher vite. Comme de sécher, fuguer, voler. On cherchait le sel. Plus de textes pralinés, ponctués proustien. On finissait par magiquement trouver : Lautréamont, Mallarmé, Albert-Birot, Tzara, Breton, Reverdy. Nous savions le chemin à suivre, la voie de passage.

    L’école suggérait une ligne sagittale, droite. Nous trouvions la spirale, le déplacement courbe. Un paysage toujours changeant. Guy Darol

     

  • EVERYTHING IS POLITICAL ❘ 2. LE PLAN

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    Nous suivions distraitement les objurgations des meneurs. Si l’on participait à des esclandres, à des émeutes, c’était presque toujours en arrière ou de côté. Ceux que j’entends aujourd’hui revendiquer des fracas de vitrines n’étaient pas mes alliés. La violence m’a toujours été antinomique. Et pourtant, il en est qui mériterait de succomber noyés sous des flots de crachats.

    Je préférais la lutte des mots. Pas ceux qui signifient, telle une déclaration de guerre, qu’il faut suivre une meute. La lutte des mots, c’était plutôt le désir d’embrouiller. L’envie d’énoncer des formules qui ne mènent à rien. Impossible donc à emboîter. Qui ne finiraient jamais dans la boîte à idées d’un filou publicitaire. Qu’on ne transformerait pas en marchandise de salon.

    Le plan consistait à faire tomber les règles de préséance. Par exemple, nous décidions que la poésie était un libelle, qu’une image photographique valait un concept. La pensée était libre du chemin qu’elle prenait, jouant ainsi un tour aux spécialistes, aux gardiens des catégories, aux représentants des genres établis. Le roman n’existait plus. La poésie moins encore. Denis Roche l’avait assez dit : "La poésie est inadmissible. D’ailleurs elle n’existe pas."

    La guérilla n’était plus armée de boulons mais de mots effervescents et qui roulaient de Guy Debord à Ezra Pound, niant la supériorité d’un domaine sur un autre. Les penseurs significatifs (Barthes, Baudrillard, Foucault) justifiaient nos méfiances. Tout pouvoir est savoir. Il fallait ainsi miner les rhétoriques dominantes, lacérer le smoking des langues, effrayer les mandarins en produisant l’élan qui franchit les barrières.

    Cela donnerait des revues, périodiques incertains, vendus à la criée comme les brûlots des Communeux. En 1974, nous apprenions la mort de Salvador Puig Antich, militant du Mouvement Ibérique de Libération, garrotté dans une prison de Barcelone. Toute une soirée, à la croisée des rues Saint-Séverin et de la Harpe, nous avons hurlé l’horreur jusqu’à briser nos voix. Quelques-uns se pressaient la gorge en gueulant. Nous portions des masques blancs pour signifier notre place aux côtés des victimes de la mort programmée. Viva la muerte était le haro crié par Milan Astray, général franquiste. Cette sentence, on l’aboyait à l’envers. A l’endroit, on jurait la joie insurgée de vivre avec le s mots de Jean-Pierre Duprey, d’Antonin Artaud. La publication que nous laissions contre 3 francs s’appelait Crispur et était sous-titrée Notices pour une insurrection de l’écriture.

    Il n’y avait selon nous* qu’une seule voie (de passage, traversière) pour nuire aux paroles établies. Grossièrement, elle se nommait poésie. À la condition toutefois qu’elle vienne de poètes prônant le désordre ainsi que le concevait André Laude**. Guy Darol


    * Nous, c’est-à-dire Christian Gattinoni, Henri Martraix, Bernard Raquin , Mouse et Anymaousse

    ** André Laude, Joyeuse Apocalypse, 1974 ; Liberté couleur d’homme, essai d’autobiographie fantasmée sur la terre et au ciel avec Figures et Masques, 1980. On lira avec profit, Les compagnons du Verre à soif, François Vignes, 2002.

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  • EVERYTHING IS POLITICAL ❘ 1. LA CONTRE-CULTURE, ENCORE

     

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    Les années 1970 furent, pour beaucoup d’entre nous, le temps de la rébellion et de l’écart. Nous envisagions des dérives pour briser les entraves, rompre les chaînes sémiotiques. Il s’agissait alors de vivre en marge, c’est-à-dire à côté de ce monde que l’on regardait comme perdu. Nous étions ailleurs. Et l’on était sauvés.

    Des bandes se constituaient, animées de désirs obliques. L’époque étant passée d’abattre le jeu adverse, ces bandes bricolaient des énoncés pour oiseaux rares. Il importait de confondre les langages et d’annuler les exclusions.

    Tout cela se produisait sans bruit, en dehors des curiosités habituelles qui allaient au prix du brut, au suicide d’Allende, à l’affaire du Watergate et, finalement, à la mort du vieux monde. Nous réalisions de petites choses – fanzines, plaquettes ... – dans ce climat d’indifférence si caractéristique des jours sans lendemain.

    Puisque nous avions gravement répondu à l’appel de Sartre visant à différencier l’homme du brin d’herbe ("L’homme est d’abord un projet qui se vit subjectivement, au lieu d’être une mousse, une pourriture ou un chou-fleur" *) et que cela n’avait rien donné, nous voulions engager nos vies autrement. L’action ne serait plus dans le déploiement du verbe assertif. L’homme de la rue cesserait de craindre nos colères qui cassent tout.

    Nous avions un nouveau programme : détruire les cloisons épaisses qui séparent savoirs et pratiques. C’est de ce dépiècement qu’allait jaillir le monde neuf. Un monde sans portes verrouillées, mirifique château d’air où se comprennent le physicien et le poète, l’artiste et le philosophe, le nomade et le sédentaire.

    Il faut bien admettre, tout à fait globalement, que ce programme a échoué. Certes, Berlin a vu tombé son mur. Philosophie et poésie n’ont point disparu. Et si les signes se mêlent entre eux c’est souvent à l’intention de tribus, filles des bandes d’autrefois.

    Alors fallait-il mener une guerre sans fin contre le Capitalisme ? Fallait-il que les mains restent armées afin d’annihiler jusqu’au dernier les tycoons de la finance ? L’histoire parlera. À moins que l’humanité toute entière ne s’évapore dans les nuages de feu du profit. Car c’est bien cela qui domine. Les machines à créer du manque l’ont emporté sur celles à produire du désir. La vie de beaucoup d’entre nous – et nous hésitons à écrire la survie – tient sur des balances d’irréel où l’êtreté n’a plus cours dès lors que le Capital a la cote. C’est lui, comme dans les souvenirs de ceux qui se rappellent le vieux monde, qui hiérarchise l’important et fait passer les hommes bien après la charrue. Ce qui retournerait Sartre dans son étui mortuaire, lui qui fonda l’existentialisme sur l’évidence que "l’homme a une plus grande dignité que la pierre".

    Doit-on, pour respirer un peu, demander le retour de Clément Duval et de la RAF (Rote Armee Fraktion qu’il ne faut pas confondre avec la Royal Air Force, comme aimait à le dire en riant Félix Guattari) ? On s’interroge en se palpant la région de l’occiput. Sommes-nous des assassins ? Il n’est jamais résulté de ma haine du Capitalisme une pétition pour l’incendie des palais et des banques. Je n’ai pas écrit un seul mot qui convoque des rassemblements destinés à une mise à mort. Mon cœur a trop battu aux pulsations pacifistes de Louis Lecoin et de Mouna pour que mes nerfs brusquement craquent. Qui a célébré Joseph Delteil ignore le maniement du nunchaku de combat et de la grenade à fragmentation.

    Somme toute, je maintiens que nous avions raison de choisir l’écart. Attaquer le World Trade Center ne coïncide pas avec le plan. Les dévastations moléculaires qui viendront à bout du système n’ont rien à envier aux stratégies de guerilleros. Il n’y aura pas une goutte de sang. Pas de luxation. Pas d’entorse. Guy Darol


    * Jean-Paul Sartre, L’Existentialisme est un humanisme, 1970.

     

  • LOUIS MERINO, PEINTRE

    Il ne suffit pas d’emporter l’adhésion d’autrui par notre éloquence pour faire triompher la vérité. Si nous nous servons de la séduction, de la rhétorique ou de la flatterie afin de masquer la faiblesse de nos thèses, nous pouvons persuader les autres, mais pas les convaincre. La conviction suppose en effet que celui qui prend parti pour une idée soit lui-même convaincu de la validité de la position qu’il défend. Je connais Louis Merino, mon frère, depuis plus d’un demi-siècle. Vie réelle, vraie, sans artifice, sans théâtre aussi, ni comédie, jour après jour, années après années, sans relâche de travail et d’abnégation presque quotidien. Ce dont je suis sûr, c’est que Louis, le peintre, y croit. Je dirais de mon frère, le démiurge Louis,  qui en Grec, désigne l’ouvrier, l’artisan, celui qui travaille de ses mains. Nous connaissons tous, l’acteur Louis Merino, le comédien talentueux, généreux, le Buster Keaton du Théâtre, dans « Les évasions de Monsieur Voisin » mis en scène par Jacques Nichet et création du Théâtre de l’Aquarium, à la Cartoucherie de Vincennes ; le Premier Ministre espagnol Luis Carrero Blanco, en voltige , dans « La Passion du général Franco » d’Armand Gatti; le professeur, dans « Marabout », « La Trilogie du Nicaragua », pièce sur la torture, de Bruno Boëglin ; Paolo, dans la « Trilogie de la Villégiature » de Carlo Goldoni, au Théâtre de Nanterre-Les Amandiers, mis en scène par Jean Louis Benoit,  etc. Mais là, je parle du peintre, qui donne forme à la matière inorganisée en façonnant ainsi son univers. Louis nous fait une démonstration, à la fois témoignage pictural et outil d’une pensée, je dirais assez rigoureuse, qu’il met en scène sur la toile. Le voilà, peintre. Il n’est pas né peintre mais il le devient depuis quelques années. Il peint des ciels. A ce qui a été  dit : « Si le ciel est le séjour des divinités ; il est aussi le séjour des bienheureux qui viennent les rejoindre ».  Mais peu importe ce discours ! Croire ou ne pas croire ! Je connais bien mon frère, sur ce sujet,  mais s’il a réfléchi à cela, des choses existentielles, son  outil, aujourd’hui, la peinture, le guide vers les ciels. Dans un sens général, le ciel est le symbole des aspirations les plus élevées de l’homme, de la perfection de l’esprit.  Du ciel jaillit la lumière  qui nous éclaire et nous guide. Peindre un ciel est chose difficile. Picasso disait qu’un ciel était  impossible à peindre, et  que les peintres du dimanche s’obstinaient à peindre des ciels, alors que cela était impossible. Si nous distinguons le ciel atmosphérique du ciel religieux ce ne fut pas le cas dans plusieurs traditions qui le voyaient comme une coupole ou une voûte. A la crainte des désastres naturels issus du ciel, orages, foudre, cyclone… s’ajoutait alors la terreur que cette voûte ne soit mal soutenue et ne s’écroule réellement. De certains de ces ciels, on reçoit la lumière, donc, être admis à l’initiation. De façon générale, la lumière est le signe de la connaissance, opposée à l’ignorance. Parfois, dans ses ciels, apparaît une lune, aussi riche en symboles que le soleil ; la lune s’en distingue parce qu’elle ne fait que refléter une lumière qui n’est pas la sienne et qu’elle est soumise à un cycle qui détermine sa forme ou son apparition. J’observe le peintre face au chevalet où est posé le châssis avec sa toile tendue. En trois coups de brosse, le violet apparaît sur la toile. Ce violet résulte de la combinaison du rouge et du bleu ; il allie ainsi la puissance active du rouge avec la sagesse réflexive du bleu. Et il est le point  d’équilibre entre la passion et la réflexion, entre la terre et le ciel. Ce violet, n’oublions pas, a la couleur de la robe des évêques et du cœur des églises, le Vendredi saint. Le peintre Louis Merino le sait. Voyons un peu où il veut en venir.  Selon la mythologie, allaitée par Héra, Héraclès laisse tomber quelques gouttes de lait qui vont former la voie lactée. Se détachant clairement sur le fond du firmament, la voie lactée a inspiré de nombreux poètes. Pour les Incas, elle est le grand fleuve du ciel où le dieu Tonnerre puise la pluie. Et pour les Aztèques, elle est un serpent blanc dévoré chaque jour par l’aigle du soleil. Elle est aussi  le chemin des oiseaux, la couture du ciel ou encore la trace des pas d’un dieu chasseur ou des skies de l’ours, en rapport avec la Grande Ourse. Mais dans toutes les cultures, elle est la voie qui relie le monde céleste et le monde terrestre. On peut parler presque d’exploit en observant  chacun des ciels de Louis : «  Terres rouges d’Aveyron », «Coucher du soleil », « Le Ramage », « Mélancolie », « Tourment », « Terre de Feu », « Rencontre des éléments », « Figuration », « Ciel de Brest », « Espoir », « Nuages bleus », « Crépuscule », « Jardin dans le ciel », « Clair de lune dans l’Aveyron », « Impression de ciel », «Vision ésotérique », « Ciel capitale », ce ciel de Paris, vu au travers d’une petite lucarne de son atelier, là-haut au 7e ciel, je veux dire au septième étage, par l’escalier de service infligeant au peintre, à chaque escalade, un violent effort,  et je sais qu’il doit vraiment y croire, pour renouveler ces efforts aussi  intensifs, mais comme tout homme qui travaille, je  sais qu’il est récompensé, ce que Louis Merino, peintre,  mérite. Cela dit, pour le premier exploit. Le second exploit, est de mettre tous les ciels, tous, dans le train en partance pour Rodez. Et de là, de cette petite gare S.N.C.F. où  il est si souvent arrivé, fier, en terre non promise, des hommes et des femmes vont  acheminer ses œuvres par la petite route, qui mène à la très belle ville de Conques, où ils seront montrés au public, comme un présent, une reconnaissance aux Aveyronnais qui l’ont toujours bien accueilli. Bienvenu Merino

     

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    EXPOSITION DES PEINTURES DE LOUIS MERINO

    et

    délicats coups de pinceaux sur porcelaines

    de

    Françoise de Renéville

    Photographies de Denis Mathieu

    Centre culturel - Mairie de Conques

    12320

    25 juillet - 25 août

    2009

    Vernissage le 25 juillet

    18h