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  • HISTOIRE D'UN PRENOM

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    J'ai lancé ma bouteille à la mer pour notre petite réunion entre copains. Il faut juste que tout le monde soit disponible un certain samedi.
    J'ai téléphoné à deux d'entre eux hier, ils se chargent de retenir une date qui correspondrait à tous.
    Je sais déjà que mon copain Claude et sa femme (ne l'oublions pas car elle nous supporte depuis 35 ans qu'elle est mariée avec lui) sont de sorties durant les trois semaines à venir. J'aimerais bien que cette réunion se fasse au mois d'avril. Nous verrons, ils vont me recontacter puisque nous nous réunirons chez moi.
    Je compte beaucoup sur Claude car il habitait plus vers le bas de la rue  après le passage Deschamps et je sais qu'il a beaucoup de souvenirs en tête.
    Je suis sûre que nous allons pouvoir remonter la rue du Pressoir presque sans encombre. Il suffit de se mettre à plusieurs. Hier, lorsque j'ai téléphoné à mon amie, elle m'a rafraîchi la mémoire sur un bâtiment situé à côté de chez elle et que j'avais oublié, maintenant je le vois très bien.
    Plus je regarde la photo où vous êtes avec vos parents et plus j'ai l'impression de reconnaître, principalement, votre père.
    L'escalier sur le blog me fait penser au mien. Je descendais les 3 étages à califourchon, sachant que c'était le vide avec la cave rn bas, un peu inconsciente. Un peu un garçon manqué. Pour être manqué, ça je l'étais. Ma mère m'a très souvent appelé Georges. Je vous dis, j'ai toujours eu beaucoup de chance ! je n'avais pas de prénom à ma naissance. Mes parents étaient persuadés que je serais un garçon qui se prénommerait Georges. Oh ! la surprise.  Comme je suis née au 25, c'est le médecin, bien embarrassé, qui m'a trouvé mon prénom. On l'appelle comment ? Georgette ? Ce prénom ne plaisait pas à ma mère (encore heureux, déjà que je n'aime pas Josette mais Georgette faut pas déconner!) et bien Josette ? Oh oui ! répondit ma mère. Et voilà comment ce prénom de Georges m'a poursuivit jusqu'à la mort de Maman en 1984. J'ai toujours pris ça pour une marque d'affection car quand elle en avait après moi, elle m'appelait Josette et ne me reprochait pas d'être une fille. En plus, mes parents n'ont eu que des filles.  Deux autres après moi, en 1953 et 1955. Elles m'appelaient Georges dans n'importe quels lieux ce qui pouvait porter à confusion lorsque j'étais jeune fille et même mariée. Je voyais parfois des gens me regarder avec des yeux ronds, se demandant si je n'étais pas un travesti. Je n'y prêtais même plus attention. Sauf parfois en voyant la tête des gens. Ah oui ! elle m'a appelé Georges. Ce prénom (que je n'aime pas particulièrement) ne m'a pas empêché de vivre. George Sand était bien une femme. Josette Farigoul
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  • LE THE DES ARPENTEURS ❘ DENIS COLIN

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    Note d’intention

    Après dix-sept années passées à développer un univers authentiquement singulier à travers l’exploration minutieuse des potentialités structurelles, orchestrales et imaginaires d’un trio désormais entré dans l’histoire du jazz et des musiques improvisées européennes, Denis Colin se lance dans l’aventure d’une nouvelle formation.
    Nommée La ‘Société des Arpenteurs’, élégante façon d’indiquer une certaine continuité dans la rupture en conservant l’image caractéristique de l’arpenteur (ce musicien voyageur toujours en quête de nouveaux territoires…) et d’affirmer le caractère convivial d’une structure ‘’communautaire’’, ouverte à tous les désirs et toutes les propositions - cet ensemble à l’orchestration élargie, ambitieuse et parfaitement iconoclaste offre au clarinettiste les moyens d’un véritable renouveau de son inspiration.

    Résolument tournée vers la jeunesse, ouverte à toutes les familles et tendances du jazz hexagonal, la Société des Arpenteurs entend prolonger et incarner à sa façon l’univers musical composite de Denis Colin, compositeur et arrangeur inclassable frayant son chemin dans ces zones frontières indécises entre jazz moderne, musiques improvisées, folklore imaginaire et domaine contemporain. Mais c’est certainement cette façon nouvelle et décomplexée qu’ont ces jeunes musiciens de jouer résolument le ‘’jeu du jazz’’, sans arrière-pensée ni distanciation ironique, qui aujourd’hui fait la différence et propulse la musique du clarinettiste dans une autre dimension. Plongeant sans retenue aux racines du jazz (le swing, la soul, la danse, la transe le chant) Colin invente avec la Société des Arpenteurs une musique sensuelle et lyrique, d’un extrême raffinement dans sa façon d'agencer l'improvisation à des cadres formels mouvants, jouant avec virtuosité sur la précision de la ligne et la lisibilité des plans, sans jamais sacrifier l’énergie ni la spontanéité. Rappelant au passage à ceux qui en douteraient encore qu’il est sans nul doute un des musiciens français possédant aujourd’hui les liens les plus directs et les plus forts avec la musique afro-américaine dans tous ses états, Denis Colin s’offre un bain de jouvence et impose d’emblée la Société des Arpenteurs comme l’une des formations les plus fraîches et spontanément séduisantes du paysage musical européen.

    Pour célébrer ce renouveau et en marquer en quelque sorte le printemps (le premier temps…), Denis Colin et sa Société des Arpenteurs ont décidé d’investir le Studio de l’Ermitage, un dimanche par mois, à l‘heure du thé, à partir du 30 mars, pour quatre rencontres exceptionnelles. Osant l’utopie douce et euphorique de la confusion des genres, invitant littérature, cinéma d’animation et musique à mettre en commun leurs propriétés pour se contaminer les uns les autres (chaque discipline venant interroger, compléter, envahir, transformer, continuer le discours de l’autre), Denis Colin et ses compagnons proposent de réinventer de manière ludique et conviviale le rendez-vous traditionnel du concert en rendant tout son sens à l’idée de rencontre. Organisés en trois parties distinctes (trente minutes consacrées à la lecture de textes littéraires par un comédien ; quinze minutes à la projection d’un court-métrage d’animation signé Florence Miailhe, complice de longue date du compositeur ; et une heure au concert de la Société des Arpenteurs), ces spectacles conçus comme des plateformes artistiques interdisciplinaires verront ainsi se succéder sur scène des artistes de tous horizons et de toute obédience, ayant en commun, au-delà de leurs différences, une même foi dans l’intelligence, la beauté et le partage. Convoquant Rabelais et Shéhérazade, Avishai Cohen et Anna Politkovskaïa, ces rendez-vous n’ont qu’une ambition : que les idées chantent, les images dansent et la musique parle…

     

    Stéphane Olliver

    Studio de l'Ermitage

    8, rue de l'Ermitage

    75020 Paris

    06 68 86 88 88

    www.deniscolin.com

     

  • LOUIS CHEVALIER ❘ L'ASSASSINAT DE PARIS

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    Professeur au Collège de France où il enseigna l'histoire de Paris, Louis Chevalier (1911-2001) rédigea plusieurs ouvrages sur la capitale dont celui-ci, une philippique contre l'entreprise de démolition emmenée par le couple De Gaulle/Malraux.

    Destruction programmée à partir de 1955-1958, le plan consiste (sous prétexte d'insalubrité) à déplacer des populations mixtes, pluri-ethniques, harmonieuses, dans les lointains d'une banlieue ou  vers des ensembles parisiens déconnectés de toute vie de quartier.

    Publié en 1977, L'Assassinat de Paris décrit le processus qui consiste à supprimer de la carte de Paris des rues, des "ilôts" au prétexte de la nécessité d'un nouveau Paris dont nous remarquons aujourd'hui le modus vivendi.

    Et c'est l'un des très rares livres à évoquer la rue du Pressoir où l'honorable Louis Chevalier vécut. Et peut-être saura-t-on m'en dire plus ? Guy Darol

    L'Assassinat de Paris

    Louis Chevalier

    Editions Calmann-Lévy, 1977

    Editions Ivréa, 1997

  • JACQUES HILLAIRET ❘ RUE DU PRESSOIR

     

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    Ce que nous savons des origines de la rue du Pressoir, nous le devons à Jacques Hillairet, historien du Vieux Paris qui publia, en 1951, une histoire en trois volumes dont la spécificité fut de dater les rues, en précisant des toponymies, en révélant un peu de miel évanoui qu'avec Josette Farigoul et Bienvenu Merino nous tâchons de revivifier.

    Il faut aller à la page 347 du troisième tome (dans l'édition de 1951) pour arriver jusqu'à la rue du Pressoir. On y entre au chapitre De la Barrière de Ménilmontant à la Porte de Ménilmontant. Un parcours qui emprunte la rue de Ménilmontant (à partir du n°1) en suivant la Salle Graffard, le bal des Grands Pavillons, celui des Barreaux Verts. Nous arrivons rue Julien-Lacroix (soit une partie de l'ancien Chemin des Couronnes, indiqué en 1730) et passons devant le bal de l'Elysée-Ménilmontant. Voici la rue des Maronites (ex-rue de Constantine jusqu'en 1867) qui "reçoit la rue du Pressoir, ouverte en 1837".

    Bals, guinguettes attirant les promeneurs du dimanche, gargotes où le vin coule à flot, vignes, sentiers à travers champs composent un univers dédié à Bacchus à la fin du 19ème siècle. Ce dont témoignent avec beaucoup de transparence les noms des rues du Pressoir ou des Panoyaux. Guy Darol

    Jacques Hillairet

    Evocation du Vieux Paris

    Illustrations de Boisvert

    Les Editions de Minuit, 1951

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    Sous le titre Connaissance du Vieux Paris, Jacques Hillairet a proposé dès 1956 une édition abrégée de son panorama en trois volumes. Connaissance du Vieux Paris est un ouvrage régulièrement réédité. De même que l'on trouvera, aux Editions de Minuit, de Jacques Hillairet, son Dictionnaire historique des rues de Paris, régulièrement mis à jour.

    Jacques Hillairet

    Connaissance du Vieux Paris

    Editions Payot & Rivages, 1993

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    Le village de Belleville
    en 1846
    où  s'insère la rue du Pressoir
  • L'ESCALIER DU PARADIS ❘ RUE DU PRESSOIR

     

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    Chaque jour, Josette Farigoul anime ce très vieux film dont les bobines ne tournaient plus. Ses souvenirs, ceux de ses soeurs, précisent le contour des images floues. Et le mouvement opère.

    Je croyais voir (l'entrecroisement des sensations),  depuis les fenêtres du 4ème étage, une cour pavée, flanquée de bâtiments artisanaux. Peut-être même y avait-il quelques cabanes, identiques à celle que Willy Ronis fixa sur la pellicule, rue des Cascades. J'entendais monter de cette cour des pépiements d'oiseaux, des caquètements plutôt. J'y voyais des lapins, serrés dans leurs clapiers. Tout cela n'exista que dans mon imagination, l'imagination d'un enfant qui passait ses vacances, chaque été, dans la ferme bretonne de ses grands-parents au milieu des veaux, des vaches, des cochons. Aussi des poules. Rue du Pressoir ne traversait pas un hameau. Je le crus longtemps. Sans doute s'agit-il là de souvenirs anténataux. Qui sait ?

    Josette mène l'enquête avec une grande opiniâtreté. Savez-vous qu'elle est parvenue à faire bouger l'enfant de cinq ans au débouché de la cage d'escalier ?

    "Revenons à notre élevage de lapins ou de poules. Dans vos rêves ! Ma soeur, qui a huit ans de plus que moi, me dit qu'il n'y avait aucun bâtiment bas et elle ne voit pas d'élevage. J'ai aussi envoyé un mail à cette amie d'enfance qui habitait passage du Pressoir, nous allons voir si elle se rappelle de quelque chose.
    Par contre, ma soeur avait, au 4 ème étage, deux copines, Roselyne et Jeannette. Elles étaient très souvent chez leurs grands-parents qui occupaient l'appartement à côté de chez vous. Elle se rappelle qu'elle voyait souvent un tout petit garçon qui rentrait avec sa maman et qui courait dans le couloir. Eh oui, Monsieur Darol, c'était vous."
    Me voici  courant dans le couloir aux murs marrons, écaillés, crayeux. Maman est venue me chercher à la sortie de l'école, rue des Maronites. Elle me tient fermement la main jusqu'à l'entrée de l'immeuble. Mais au pied de la cage d'escalier, je suis libre. Attention quand même, il est interdit de taper du pied. Surtout, ne pas se faire remarquer, ne jamais déranger les voisins. Je grimpe à pas feutrés. A chaque palier, j'attends maman. Qu'il fait sombre ! Au quatrième étage, le couloir est éclairé par une fenêtre qui donne sur une courette où l'on étend le linge. A gauche, la porte de chez Régina. J'irai la retrouver tout à l'heure. Elle me serrera contre sa poitrine généreuse. J'entendrai battre son coeur et ses mots rouleront, ses mots d'un autre pays, Israël. Lorsque j'ai découvert, bien récemment, la musiques klezmer de Denis Cuniot, c'est à toi que j'ai pensé immédiatement, à toi Régina de mon coeur, ma seconde maman. Tu es au paradis, à présent, le paradis de la rue du Pressoir. Je ne m'arrête pas. Je cours. Je regarde la vasque où coule l'eau courante. Je t'attends maman. Viens maman ! Je t'attends. Un jour, je serai grand et je pourrai atteindre la sonnette. Papa qui sait tout faire, tout tout tout, a posé une sonnette sur la porte de bois clair. C'est un bouton noir. Si on le tourne, il craque. Plus tard, je ferai craquer le bouton et papa ouvrira la porte. Là, je me contente d'attendre. Car je n'ai pas le droit de crier : "Ouvre, ouvre-moi papa! On est là !". Non, je dois patienter en regardant, au fond du couloir, ce mystérieux escalier, étroit, très étroit qui mène à l'étage supérieur. Un appendice vers le ciel. Une sorte d'échelle qui mènerait au paradis. Il y a un étage au-dessus où je ne suis jamais allé. Guy Darol

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    Le petit Guy
    Agnès et Joseph, mes parents
  • LE BALLON ROUGE FLOTTE RUE DU PRESSOIR

     

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    Le Ballon Rouge, 1956

    Depuis que nous nous sommes retrouvés, plus de quarante ans après, nous entretenons une correspondance par mails qui aboutit à sauver de l'oubli des images, des piétons de Paris. Chaque jour ou à peu près, Josette Farigoul désensevelit. Des rues effacées de ma mémoire reprennent vie, des visages passent de l'invisible au visible.

    Dans un billet publié sur ce blog il y a jolie lurette, j'évoquais la couleur de la rue du Pressoir (Paris,vingtième arrondissement) et je tâchais de faire entendre les bruits qui sonnaient à mes oreilles d'enfant. Je vécus 23-25 rue du Pressoir de 1954 à 1960 et ce fut mon âge d'or. J'ai raconté le mélange des êtres, la générosité, les portes toujours ouvertes. Durant cette période j'ignorais que vivait tout près de moi et à portée de mes souvenirs futurs une jeune Josette, née en 1948, qui demeura dans ce quartier jusqu'à l'expulsion ordonnée par les maîtres de l'époque, le couple De Gaulle-Malraux.

    J'ignorais que l'immeuble de mon enfance serait sauvée des ruines par un être si habité qu'il contient plus de souvenirs que je n'en aurai jamais. Josette ranime les couloirs, les cages d'escaliers. Elle fait parler des paliers, des fenêtres. Ses phrases réalisent le mouvement. Un film s'écrit grâce à elle. Le film des petites choses vraies. Un cinéma fait de passants, de silhouettes rapides d'où partent des rires, aussi parfois des cris et des pleurs.

    Chaque matin, je retrouve Josette Farigoul dans ma messagerie et c'est un parfum de jeunesse qui embaume mon bureau. Chaque jour je rejoins la rue du Pressoir, notre embarcadère lumineux.

    Hier, nous nous promenions rue de Ménilmontant, rue Oberkampf. Nous allions au cinématographe. Au Ménil Palace, au Cythea, au Cocorico du boulevard de Belleville. Séances dominicales qui occupaient l'après-midi.

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    Le Ménil Palace, 1955
    Photo H. Guérard

    Aujourd'hui, Josette évoque Le Ballon Rouge, le film d'Albert Lamorisse datant de 1956 où jouaient Renaud et David Séchan, les deux frères jumeaux nés quatre ans plus tôt. Le fameux ballon vire-voltant dans le ciel de Ménilmontant, Josette Farigoul l'a vu, de ses yeux vus. Et je ne parle pas du film qu'elle connaît par coeur. Mais de cette sphère remplie d'air qui vint toquer à sa fenêtre. Et pourtant le moyen métrage de Lamorisse était déjà sorti en salle. L'objet du film, le fil du souvenir flottait toujours. Lisez plutôt :

    "Le Ballon Rouge,  je l'ai visionné. J'ai bien vu au générique Edmond Séchan. J'ai effectivement pensé que c'était peut-être de la famille de Renaud. Par contre je n'ai pas reconnu le chanteur.
    Savez-vous que ce ballon rouge a existé ? Lorsque je suis allée sur votre site pour la première fois je me suis dit "mais c'est mon ballon", sauf que le mien était beaucoup plus gros.
    C'était un matin, très tôt avant de partir pour l'école. Il faisait très froid. Le linge à la fenêtre était complètement gelé, il se serait cassé comme du verre. De la fenêtre de mon 3e, j'ai aperçu un énorme ballon, que j'ai toujours vu rouge. Je pense que j'avais 10 ans. C'était donc en 1958. Certainement un ballon publicitaire (de la réclame à ce moment là).  Avec ma mère, à l'aide d'un balai, nous avons réussi à le ramener jusqu'à la fenêtre, je voulais absolument ce ballon. Le seul petit problème c'est qu'il ne passait pas par la fenêtre, j'ai dû le laisser repartir. Peut-être est-il parti vers la rue Vilin. Je me suis toujours souvenue de ce ballon énorme. Coïncidence bien sûr, mais la couleur et l'année correspondent. J'aimais voir aussi dans le ciel,  les réclames que les avions écrivaient. On ne voit plus tout cela." Josette

     

  • 23-25 RUE DU PRESSOIR ❘ PARIS ❘ VINGTIEME ARRONDISSEMENT

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    23-25, rue du Pressoir

    Voici le 23-25 de la rue du Pressoir (vingtième arrondissement de Paris) par où j'allais et venais, chaque jour, à partir de 1954, année de ma naissance. C’est mon pays, le pays natal. Avec son peuple, plus ou moins oublié. L’immeuble fut détruit (le quartier dans sa globalité) et ses habitants sans que l’on se soucie vraiment de l’effet produit par le choc d’une boule de fonte sur l’esprit d’un être, trop petit être sans doute, insignifiant le croyaient-ils.

    Je fus l’un de ceux obligés de fuir. Il le fallait. Vers nulle part. Exode en temps de paix. Nous devions quitter le pays. Un pays sans frontières, avec ses cœurs multicolores, ses ethnies, ses croyances si peu pesantes. Nous vivions sur un même palier, portes ouvertes.

    Cette locution on la pratique de nos jours, comme un jeu de mots. Portes ouvertes n’était pas, à la fin des années cinquante, une attitude, un challenge. On vivait ainsi, les uns avec les autres. Y compris, les uns chez les autres. C’était la vie, n’est-ce pas ?

    Je me doutais qu’en jetant une boutanche à la mer me reviendrait un oiseau. Je savais, un jour ou l’autre, qu’un ange agiterait ses ailes. Je viens de vivre ce moment de grâce. Comme si tout espoir était permis. Une leçon, non ?

    Je viens de connaître la grâce (subversive) qui bouscule le train-train du mensonge. Avec Josette Fariboul, ma voisine du 25 de la rue du Pressoir, la vérité se fortifie. Il fallait, somme toute, liquider le brouillage des couleurs. Il fallait unifier. Le couple De Gaulle/Malraux n’avait d’autre objet que la réalité d’un Paris unifié. Pas de couleurs ! Rien que que les vibrations chromatiques d’un peuple arraché à son abattoir. Mes parents venaient (expulsés tout comme) de Bretagne.

    Josette Farigoul a lu mon billet sur la rue du Pressoir. Elle y a vécu. Elle témoigne :

    « J'ai lu que vous habitiez au 25 rue du Pressoir, moi aussi j'habitais au 25 de cette rue, que de souvenirs en lisant votre article. J'ai d'ailleurs le livre de Willy Ronis et de Clément Lépidis mais effectivement personne ne parle de notre rue du Pressoir. Je suis née au 25 en 1948 et j'y suis restée jusqu'à l'expulsion en 1966. Vous parlez du café chez Andrée, c'est dans ce café que j'ai rencontré mon mari en juillet 1965. L'épicerie de Madame Gilles, sa boutique était rouge, j'y allais tous les jours, elle nous faisait crédit. A cette époque la vie n'était pas facile. Il y avait aussi le coiffeur Vincent, le garage MARCHADIER, je crois. Dans la cour, le matelassier. J'aimais bien le regarder travailler. Passage Deschamps, la mère fouillis et au coin, le café chez FREDO. Notre concierge NICOLE. Au mois de novembre j'ai retrouvé une amie d'enfance, par l'intermédiaire de Copains d'avant, elle habitait passage du Pressoir, dans la diagonale du 25. Nous allions ensemble à l'école rue Etienne Dolet. Nous nous envoyons des mails depuis. Elle possèderait une photo du 25 rue du Pressoir et du garage. Elle va me la faire parvenir. Quel dommage de ne pas avoir de photos de notre rue. J'ai bien essayé de chercher mais je ne trouve pas. Je suis toujours en relation avec mes amis d'enfance de la rue du Pressoir. Nous sommes toujours présents pour les bons et les mauvais moments. Nous organisons des repas de temps en temps et à tous les coups nos conversations partent en délire sur la rue du Pressoir. Nous nous remémorons toutes ces bêtises d'adolescent que nous avons fait.
    Que de beaux souvenirs  que je n'ai jamais oubliés
    .
    Je vous adresse mes sincères salutations.
    Josette FARIGOUL


    Cher Guy,

    Merci pour votre réponse qui m'a bouleversée, principalement lorsque vous parlez de votre mère.  J'ai, à ce moment- là, pensé à mes parents qui sont partis bien trop tôt. Je dois vous avouer que j'ai pleuré devant mon ordinateur en lisant votre message.

    Il est certain que nous nous sommes croisés et que je connaissais, probablement, vos parents. Je connaissais tout le monde, j'ai très souvent fait des courses pour beaucoup de personnes, je gagnais quelques petites pièces pour acheter un pain, surtout en fin de mois. Mes parents avaient pas mal de problèmes.

    Je ne sais pas si vous vous souvenez que de temps en temps nous retrouvions, devant nos portes, des échantillons de lessive, savonnette Bébé Cadum, café etc... Votre mère s'en rappellera certainement. Et bien, si comme beaucoup de locataires elle ne trouvait rien devant sa porte, je peux bien l'avouer 50 ans après, c'est que j'étais passée par là en faisant tous les étages dans le noir. Pas de quoi en être fière.

    Donc vous, vous habitiez dans l'escalier face à la porte d'entrée. Moi, j'étais dans la cour, au 3ème étage, il n'y avait que trois étages de ce côté là. Logiquement vous étiez au 23 et moi au 25. J'étais souvent assise au bas de votre escalier, nous n'avions pas le droit de jouer dans la cour. J'étais aussi, souvent, dehors devant la porte. C'est pourquoi je dis que nous nous sommes déjà vus et même vos parents car nous devions dire bonjour à tous les locataires que nous croisions. A cette époque, c'était bonjour Monsieur ou bonjour Madame mais jamais un  simple bonjour en passant.

    Je me rappelle de petits garçons jouant aux billes devant le garage. Moi je jouais aux osselets ou aux cartes.

    Vous avez peut-être connu les jumeaux qui étaient plus de votre âge (1955) et qui habitaient un peu plus haut au dessus de chez Vincent, le coiffeur, après le café chez Andrée. Les jumeaux jouaient souvent dans le caniveau lorsque l'eau coulait, pieds nus en sandales, même en hiver. Ils s'appelaient Christian et Michel Choutier. Michel est décédé, bien trop jeune, en 1997. Christian, je le vois toujours avec ses soeurs qui sont mes amies d'enfance.

    Comme dit mon fils, nous, nous n'aurons jamais de tels souvenirs ni cette nostalgie que vous avez de votre quartier. Effectivement, comme vous le dites si bien, notre enfance a été sévèrement maltraitée du fait de cette destruction. "Ils ont cassé le berceau de mon enfance", quelle belle phrase de Jo Privat ! Je crois que nous pensons tous la même chose.

    Dans le livre de Clément Lépidis, Je me souviens du 20e arrondissement, à la page 79, photo rue de la Mare, en arrière plan, nous voyons une femme avec son cabas et  deux enfants. Cette femme est la mère de cette amie que j'ai retrouvée au mois de novembre, les deux enfants, cette amie Claudie et sa soeur. Claudie m'avait dit "regarde bien, dans son sac on voit une bouteille". Elle connaissait bien sa mère. A cette époque, malheureusement, l'alcool était présent dans beaucoup de familles. La pauvreté aussi mais sans jamais se plaindre.

    Je pensais que de votre côté il y avait 5 étages mais dans ce cas, si il y avait eu 5 étages, comment de la fenêtre de ma chambre au 3ème étage et bien sûr lumière éteinte, aurais-je pu voir les Baert, de votre côté au dernier étage à droite au fond du couloir, se battre pour à la fin se réconcilier en s'embrassant. J'en rigole encore car c'était très souvent et la bagarre se terminait toujours de la même manière. J'avais 13 ou 14 ans lorsque je les épiais et j'attendais le dénouement.

    Je crois qu'elle habitait au 1er toujours de votre côté, on l'appelait la Chinoise, mais il me semble qu'elle n'était pas Chinoise, c'était son mari qui était Chinois, elle m'envoyait acheter des sangsues, si je me souviens bien, chez l'herboriste, rue des Couronnes.

    Au rez-de-chaussée, sur la photo du 25 on voit leur fenêtre, là habitaient les Dilouya. Sur cette même photo, la fenêtre au dessus du garage, c'était chez Cocotte, pourquoi on l'appelait Cocotte, je ne sais pas. Il faisait de la couture, un Juif qui avait bien failli être arrêté pendant la guerre. Juste avant l'arrivée des Allemands, il s'était caché sur la terrasse du garage. C'était tellement le merdier sur cette terrasse qu'il n'avait pas eu de mal pour se cacher. Maman était à sa fenêtre, elle avait vu Cocotte se cacher et tout de suite, après, les Allemands arriver. Ce pauvre Cocotte était connu du quartier car il avait tellement été traumatisé que, certaines nuits, il entrait en crise, se mettait à hurler pensant que les Allemands revenaient, il clouait des planches à sa fenêtre pour les empêcher de rentrer chez lui. Le lendemain matin on voyait notre Cocotte déclouer les planches. Tout était rentré dans l'ordre jusqu'à la prochaine fois. Maman m'avait raconté son histoire car ses cris en pleine nuit faisaient peur et je ne comprenais pas pourquoi il clouait des planches à sa fenêtre, la nuit, pour les enlever le lendemain. Il nous aimait bien mes soeurs et moi, il nous offrait souvent des bonbons, certainement par reconnaissance, sans jamais avoir reparlé de cette histoire ni lui ni ma mère.

    Il y a eu de sacrées histoires dans nos immeubles. Mais que de beaux souvenirs.

    L'endroit qui me faisait peur c'était  cette espèce de couloir entre l'escalier et la loge de concierge, un couloir très sombre qui me permettait d'aller chez Madame Gilles lorsque la boutique était fermée. Je n'aimais pas passer par là.

    Sans parler, de mon côté, dans la cour, celui du rez-de-chaussée qui en se suicidant au gaz aurait pu faire sauter l'immeuble. Madame Paulette qui sur la cinquantaine, peut-être plus, exerçait, encore, le plus vieux métier du monde, comme elle rentrait vers 2 ou 3 heures du matin, elle m'appelait pratiquement tous les jours pour faire ses courses. Une fois par semaine je lui achetais Intimité et Akim. Des souvenirs et des noms qui restent ancrés dans ma mémoire et pourtant j'avais 10 ou 12 ans.

    Mon nom de jeune fille est IDOUX, nous étions 4 filles. Les 4 filles du père Idoux comme certains locataires disaient.

    Même si la vie n'était pas facile pour tout le monde quelle belle époque. J'ai dans la tête plein de souvenirs du temps où j'ai vécu Rue du Pressoir. Après l'expulsion plus rien n'était pareil. Ma mère qui chantait tout le temps et commençait à 6 heures du matin n'a plus jamais chanté lorsque nous sommes arrivés vers la porte de Bagnolet. Tout était cassé.

    Vous trouverez aussi une photo de la boutique de Madame Gilles et la façade de l'immeuble qui vous rappellera quelque chose, je pense. Par contre quand nous voyons l'immeuble en construction, notre rue n'a plus rien à voir avec ce que nous avons connu.

    Amicalement et un grand bonjour à votre maman.

    Josette

     

    Cher Guy,

    C'est encore avec beaucoup d'émotions que je lis votre réponse, pour un petit garçon si jeune, je trouve que vous vous rappelez de beaucoup de choses. Vous en parlez si bien, les mots sont très beaux, c'est aussi votre métier. Moi je n'ai qu'un certificat d'études car il fallait travailler très jeune pour aider nos parents. Les épreuves nous font grandir. J'ai beaucoup de souvenirs en mémoire car la vie était très dure. Durant 20 ans, je n'ai pu écouter la chanson de Daniel Guichard "Mon vieux" chanson pourtant que j'adore ainsi que Daniel Guichard, mais j'ai dû attendre 1991 ou 1992 pour aller le voir à l'Olympia. J'ai malgré tout pris sur moi lorsqu'il l'a chantée. Depuis, les rares fois où il passe à Paris ou a Rouen, puisque j'habite dans l'Eure, près de Rouen, je vais le voir.

    Cette chanson me rappelle trop mon père sauf qu'il n'avait pas un vieux pardessus râpé mais un veston et sa musette avec sa bouteille, mais chut !!! qu'il n'a pas pris le même autobus de banlieue mais le métro à Couronnes. Certainement qu'avant de prendre son métro il s'arrêtait "Aux lauriers roses" et tout au long de cette chanson, je le reconnais.

    Effectivement vous étiez certainement cet enfant qui jouait dans le caniveau devant le garage. Les mamans aimaient bien surveiller leurs enfants de leur fenêtre. Je devais jouer la comédie pour pouvoir jouer devant la porte comme je disais car de la cour, maman ne pouvait pas me surveiller.

    Je vais demander à mon amie que je viens de retrouver  48 ans après et qui elle habitait passage du Pressoir, si elle se rappelle d'une dame qui gardait des enfants.

    Oh oui, que ce couloir et cet escalier étaient sombres. De mon côté il y avait une fenêtre à chaque palier mais une cave qui faisait très peur. J'arrive encore à rêver de cette cave et de la cour.

    Certainement que cette Régina, je la connaissais aussi, malheureusement je ne me souviens pas des noms.

    Il est vrai que la télévision c'était magique. Nous avons eu la télé, j'avais 12 ans, donc en 1960, en fin d'après-midi si je me rappelle bien, lorsque l'image apparut c'était Rintintin. Super !

    On était, malgré tout, souvent seuls.  Les parents ne laissaient pas, effectivement "traîner" leurs enfants. Je me suis rattrapée, un peu, vers mes 15 ans.

    En regardant le fil de ma vie, je me dis que j'ai toujours travaillé, au début pour aider mes parents, par la suite avec mon mari, qui avait une entreprise d'ascenseurs et qui est parti, bien trop tôt, en 1993, tué par le stress, d'un infarctus, en quelques minutes. Puis après, avec mon fils, ils ont tous compté sur moi, et moi je vis quand ? Je crois surtout que j'ai la vie que j'ai choisie.

    Comme vous le dites si bien, à la fin, en parlant du 23/25 "un pays en somme". Exactement, moi je dis toujours : nous sommes comme les pieds noirs, nous avons la nostalgie de notre pays.

    Comme beaucoup de personnes ayant vécues dans ce quartier, nous avons tous un point commun "la nostalgie de ces belles années"

    Et bien, après toutes ces  évocations, je vais pouvoir me mettre au travail.

    Bien amicalement,

    Josette

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  • PARIS ❘ RUE DU PRESSOIR ❘ VINGTIEME ARRONDISSEMENT

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    23-25, rue du Pressoir

    Là que je vécus dans les années 1950. L’immeuble qui se situait au 23-25, dans l’unique courbure, lorsqu’on vient de la rue des Couronnes serait qualifié aujourd’hui de lépreux.

    Il s’élevait sur quatre étages et sa façade grise, écaillée, me semblait somptueuse. Mes parents occupaient un deux pièces aux fenêtres bleu azur qui donnaient sur un quadrilatère barré à l’est par la rue Julien Lacroix. Appuyé sur une rambarde, je pouvais observer une cour pavée où picoraient des poules. Et je pouvais entendre le grognement de cochons parqués dans une cahute bancale. Au pied de l’immeuble, un garage, ouvert sur la rue, offrait un espace de bitume craquelé que j’allais quelquefois rejoindre pour y pousser mes billes ou, dans le caniveau, quelque frêle esquif de papier.

    Le bâtiment a été rasé en 1967 et tout ce quartier, hétérochrome, mixte, a depuis été recouvert par de blêmes volumes aux angles aigus. Là, je fus éduqué par le peuple du monde. Maurice, le chapelier, me faisait essayer des casquettes enfantines et Régina qui possédait un téléviseur m’invitait, ma tête enfouie contre son cœur qu’elle avait gros, à regarder les aventures d’Ivanhoé. Leurs portes étaient toujours ouvertes.

    Tout devait disparaître selon les projets d’embellissement et de blanchoiement voulus par de Gaulle que conseillait André Malraux. Cependant que ce dernier avait démontré dans son œuvre qu’il n’avait rien à dire sur Paris. Une phrase de ses Antimémoires atteste seulement sa connaissance des « moineaux qui attendaient les chevaux des omnibus au Palais-Royal ». Contre toute attente, c’est bien lui qui ordonne la tabula rasa. Il est le déclencheur des boules de fonte qui aplatissent, le 27 février 1969, les Halles enchantées par Guy Debord, Julien Duvivier, André Hardellet, Hubert Juin, Claude Seignolle et la chanteuse Damia.

    J’ai cherché, dans les livres d’Henri Calet, Clément Lépidis, Georges Perec (citoyens de mon périmètre), un souvenir de la rue du Pressoir. Fiasco. Et sachez que mes rayons amassent, année après année, centaines de volumes sur la Ville Lumière. Un jour, je proposerai ici, une bibliographie flâneuse.

    Aujourd’hui, je ressens (tristesse des regards dans le rétroviseur) le besoin d’évoquer ma rue au tracé demeuré exact mais à l’environnement saccagé. Ivan Chtcheglov, grand inspirateur de la dérive continue, en butte contre « la passion de l’oubli », avait décrit dans Formulaire pour un urbanisme nouveau (in Ecrits retrouvés, éditions Allia), l’autre pays, celui de mes rives d’enfance. Pour ne pas oublier, jamais, je recommande L’Assassinat de Paris, ouvrage qui mit en danger son auteur parce qu’il y dénonçait fermement l’attentat porté, en 1958, par le général de Gaulle contre le Pantruche ouvrier. Livre savant, précis, mélancolique (Louis Chevalier, camarade de khâgne de Georges Pompidou fut professeur au Collège de France), L’Assassinat de Paris narre l’histoire d’une démolition et la fin des quartiers bruissants de vies simples.

    Enfin, page 242, il parle des « exilés de Belleville », déplacés par contrainte vers les banlieues neuves (bâties de tours aujourd’hui pilonnées) et qui regrettent « l’inconfort de la rue du Pressoir ».

    Initialement publié en 1977 aux éditions Calmann-Lévy, réédité vingt ans plus tard chez Ivrea, ce livre est à découvrir de toute urgence. Et permettez-moi de remercier (ceci comme un blog à la mer) celles et ceux qui connurent (années 1950) ce quadrilatère pluriethnique, compris entre les rues des Maronites et des Couronnes, pour les commentaires qu’ils pourraient m’adresser, nourris de colères et de tendres souvenirs. Peut-être avons-nous, ensemble, humé l’air de la rue du Pressoir. Régina, Maurice, Joseph, je vous embrasse là où vous êtes. Guy Darol

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  • ODEURS/RAMON PIPIN ❘ THEATRE DU ROND POINT

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    En concert unique le 6 mai 2008 au Théâtre du Rond-Point

    • réservation : 01 44 95 98 21
    • 2bis avenue Franklin D. Roosevelt 75008 Paris

    Avec Ramon Pipin, Clarabelle, Laurent de Gaspéris, Jean-Michel Kajdan, Tapofon, Superbranlo, Jean-Philippe Goude, Rita Brantalou, Sharon Glory, Shitty, La Pliure et le Choeur de l'Orchestre de Chambre de Bonn.

    Ramon Pipin et sa horde aromatique n’éprouvaient pas un besoin urgent d’utopie. Ils voulaient exhaler un parfum de rebiffe, secréter des chansons suffisamment crues pour qu’on ne les confonde pas avec des hymnes à la morale et au bon goût, ces deux enfants de la bêtise et de l’ennui, selon Francis Picabia qui s’y connaissait en distribution de peaux de bananes.
    Entre 1979 et 1985, Odeurs attira les plus louches sympathies : Coluche, Desproges, Choron, zèbres mal bigarrés mais qui, unis dans une même boue, composent ensemble un ferment de révolte torboyautante.
    Les cinq albums d’Odeurs témoignent d’une impétuosité sarcastique efficace. On s’attaque aux plaies de l’époque (toujours actuelles) sans jouer les voyous voyants. Des chansons comme Laval qui rit, Rock Haroun Tazieff, On a été féconds ou L’amour sans les dents sont autant d’éclats de rire mélangés à de la poudre de fulmicoton. Odeurs dénonce la compromission, les manipulations génétiques, la malbouffe, l’environnement sacrifié sans prétendre au brûlot situationniste. Modestes mais hautains, ils livrent sur scène des spectacles qui donnent à ce mot ses lettres authentiquement pailletées. Bondissant et luxurieux, puissamment rythmé, Odeurs est le seul groupe à avoir fusionné les influences de W.C. Fields et de Brian Wilson, de Cami et de Steve Reich, l’humour capricant et la fertilité musicale.
    Ce concert en acoustique et en 75W saupoudré d’incongruités devrait sceller une ultime communion extatique avec les empesteurs originaux, sans oublier son lot de coussins péteurs
    .
    Guy Darol

    Sortie de l'anthologie Odeurs/Ramon Pipin, volume 2 (4 CD), en avril 2008 (FGL Music).

    www.theatredurondpoint.fr/

    http://odeurs.homedns.org/

  • LE GROGNARD ❘ SOLITAIRE OU SOLIDAIRE ?

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    « Chacun, marchons pour notre joie. » Zo D’axa

    Stéphane Beau m'a offert le redoutable privilège de co-animer avec lui le n°5 de sa revue le Grognard, un numéro spécial intitulé Solitaire ou solidaire ? On y remue les « boues chaudes et rassurantes de l’illusion, des illusions … » « illusion démocratique, illusion fraternitaire et égalitaire, illusion de la valeur morale du travail etc … Illusions, illusions, illusions !» (édito, S. Beau et S.Prat). Un bourbier chimérique tel qu'aujourd’hui hédonistes, individualistes ou simples vivants se voient opposer une suspicion permanente d'égoïsme, de cruauté coupable, voire criminelle.

    Solitaire ou solidaire ? s’ouvre sur un entretien avec Philippe Corcuff, mené par le fondateur du Parti Individualiste Unifié lui-même (le fameux P.I.U) : Stéphane Beau en personne. Philippe Corcuff y retrace avec une clarté remarquable une recherche éminemment complexe, concernant l’Individualisme, précisément, et un parcours pour le moins méandreux, intellectuel comme politique. Quoiqu’il en soit, sa méthode sociologique (relationniste : où individus et collectifs sont des réalités secondes par rapport aux relations sociales qui les réalisent) et la philosophie pratique qui l’anime (vers une sociale-démocratie libertaire ! Nom d’un barbarisme de barbare !…), l’ouvrent à des chantiers intellectuels tels que je n’imaginais personnellement pas qu’il en existât encore... Comment ?! On pense encore, aujourd’hui ?! On cherche ? Quelle perte de temps inattendue ! Mais, dîtes-moi,  Philippe Corcuff ne serait-il pas un brin fainéant, hédoniste & compagnie ?

    La Fiesta pour l’oisiveté de Guy Darol agit sur ce Grognard comme un sommet familier, une parole qui se lève et se pieute avec le jour, avec la tranquillité de ses gouffres, les « flots de ses feux » (Rimbaud). Salve poétique contre le mot travail et ses renoncements menteurs, ses impasses, ses feintes, ses supercheries macabres, la « fiesta » nous livre relief et contraste, sens du débordement et du retrait, du « ralentissement du temps », sur un plateau foisonnant de sagesses interdites, où les dites illusions sautent aux yeux, évidentes, noires et absurdes. Un brûlot « déberluant », solaire, vif, danseur. L’ agitateur conseil s’y joue personnellement, la mémoire longue et festive, formidablement accompagné, habité. Forme et fond liés corps et âme, rien à dire. La vie.

    L'autre sommet se nomme Edward Carpenter, poète anglais, ami de Walt Whitman et continuateur de son socialisme en acte. L’extrait que nous publions de La civilisation, sa cause et ses remèdes, datant de 1895, projette de bien cruelles lumières, lunaires et pleines, sur la consomption sociale de nos « nations policées », par contraste avec l'incontestable santé de l'humanité pré-morale, barbare, abordée ici à travers des réflexions-témoignages ou ethno-philosophiques ( l’ «Ancient Society » de Lewis Morgan, élevé parmi les Indiens de l’Iroquois, « travels on the Amazon » de Wallace, « Our wild Indians » de Dodge, entre autres compagnonnages sauvages…). Santé pré-morale encore souveraine, agissante, relativement épargnée par notre Civilisation définie par Carpenter comme maladie, comme perte d’unité…   
    Solaire et lunaire, la cosmogonie limpide de ce
    Grognard pouvait encore bercer tendrement les « berlurés » les plus endurcis si au contraire, à mesure que s’est levée la purée de pois des opinions qui nous tiennent lieu de liberté de pensée, on n’avait commencé de distinguer quelques voies (et voix) s’y côtoyer ou s’y croiser déjà, sans le savoir, quelques chemins qui ne mènent généralement nulle part, et fuient le plus souvent les lendemains qui chantent comme l’anesthésie du présent perpétuel, solitaires parfois, aussi, mais dont la défiance vis-à-vis de l'illusion collective et individuelle est l'atmosphère commune. Stéphane Prat

    Individualistes, j’m’enfoustistes, fainéants, oisifs, solitaires et solidaires, curieux acteurs des mots et auteurs de vos existences, le Grognard n°5 arrive près de chez vous ! ...

    Au sommaire :
    Philippe Corcuff : Entretien  -  Du relationnisme méthodologique à la Social-démocratie libertaire - Christian Tanguy : Deux chants solidaires (poème) - Stéphane Prat : Le Parti de la fainéantise - Serge Muscat : Les Illusions du 21e siècle - Edward Carpenter : La Civilisation, sa cause et ses remèdes - Fred Johnston : Aux yeux bandés (poème) - Stéphane Beau : Manifeste du Parti Individualiste - Guy Darol : Fiesta pour l’oisiveté - Bruno Toméra : Physique des poivrots - Stéphane Prat, Pascale Arguedas :  Du côté des livres

    Sortie le 1er mars

    Vous pouvez d’ores et déjà réserver votre exemplaire (7 €) par mail à l’adresse suivante : revue.le.grognard@gmail.com .

    Web : LE GROGNARD