En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Herb Cohen, le manager de Frank Zappa, actif dès le premier album des Mothers Of Invention, co-créateur avec Zappa des labels Straight (Alice Cooper, Captain Beefheart, Lord Buckley, Jeff Simmons, Tim Buckley, GTOs ...) et DiscReet Records (Kathy Dalton, Tim Buckley, Ted Nugent, Growl, Brenda Patterson...) vient de lâcher définitivement l'affaire à l'âge de 77 ans. Il est décédé le mardi 16 mars dans sa propriété de la Napa Valley en Californie. Herb Cohen était né le 30 décembre 1932.
Il avait également travaillé avec Screamin' Jay Hawkins, Lenny Bruce, Theodore Bikel, George Duke et Tom Waits.
Barnley Hoskyns qui est un parfait géomètre de Los Angeles a parlé dans Waiting For The Sun de « la trinité païenne des morts du rock qui inaugura les années 70 ». Le triangle est connu et j'imagine qu'il est enseigné dans toutes les écoles où la musique est un pilier de culture. Pour ceux qui l'auraient oublié : Jimi Hendrix (septembre 70), Janis Joplin (octobre 70), Jim Morrison (juillet 71). Mais la décennie de l'errance a commencé avant la fin de partie d'Hendrix. Brian Jones (69) ouvre la voie des naufragés et certains d'entre vous auront raison de souligner que la mort d'Al Wilson (70) et de Brian Cole (72) fut pareillement traumatisante. Celle de Janis me fit pleurer. Si rapprochée de celle d'Hendrix que certains oseront dire (ne dit-on pas n'importe quoi ?) qu'elle précipita son suicide. Pour beaucoup d'entre nous, cette fin réputée suspecte (nez cassé, traces de lutte) avait valeur d'alerte. Elle démontrait que la drogue tue. C'était la version (rarement contestée) du docteur Thomas Noguchi. Il avait établi que Janis Joplin s'était injectée la totalité d'un sachet contenant 30% d'héroïne pure. Soit, six fois la dose habituellement utilisée par la chanteuse. Comment une jeune femme de 27 ans avait pu mettre un terme brutal à son parcours glorieux dans un hôtel d'Hollywood alors qu'elle préparait le meilleur de ses albums, accompagnée de son meilleur groupe ? La réponse est dans le cœur muet de Pearl, le surnom qu'elle s'était choisie pour mieux se fondre dans la communauté des êtres qui détestent les chefs. Son père n'était-il pas capitaine d'industrie dans une ville raffinière du Texas, Port Arthur, la plus moche de toutes les villes du monde, selon les mots de Janis ? Elle y avait chanté dans une chorale. Elle y avait écouté Bach et Beethoven mais surtout Bessie Smith, Odetta, Leadbelly, Big Mama Thornton. A l'université d'Austin, elle avait remporté le concours du mec le plus laid du campus. Ce qui reste à prouver. Tout lui parlait de fuite. Les livres des beat poets, ceux de Jack Kerouac ne lui donnaient pas le choix. Pour survivre, il fallait partir. Rejoindre San Francisco, la nouvelle Utopia. Là, elle rencontre Jorma Kaukonen (avant le Jefferson Airplane) et David Crosby. Dans les beautiful tribes d'Haight Ashbury, elle côtoie les membres d'un groupe psyché égalitaire. Big Brother and The Holding Company signe un contrat avec Mainstream Records (Carmen McRae, Helen Merrill, Nucleus) et réalise, Janis au front, un premier album éponyme. Frisco qu'elle croyait être la cité radieuse, sera son paradis de l'excès. Elle y découvre le goût de l'héroïne et du Southern Comfort, une boisson dont elle devient l'égérie commerciale. La firme de St. Louis lui offrira un manteau de fourrure pour la remercier de la publicité (involontaire !) faite à son enseigne.
Le samedi 17 juin 1967, au festival de Monterey (premier acte du summer of love), Janis Joplin casse la baraque. Elle ne dispose que de 15 minutes. Dans ce bref intervalle, les trois sculptures sonores qu'elle livre au public suffisent à l'ériger en superstar du blues. Sa version de Ball And Chain de Big Mama Thornton fige les sangs. L'incandescence du texte est une boule de feu dans sa gorge. Son poing fermé bat la mesure comme un marteau de rage. Une rage qu'elle condense sur « Cheap Thrills » (1968) où se détachent Piece Of My Heart et surtout Summertime, l'hymne des frères Gerschwin qu'aujourd'hui on traduit en onctueux trémolos. Cette « chaotique frénésie de petite fille déchirée » (Barnley Hoskyns) trouve de nouveaux élans. Et ce sont les musiciens du Kosmic Blues Band puis de l'excellent Full Tilt Boogie Band qui en donnent la couleur. Auréolée à Woodstock, elle se hisse sur scène soutenue par trois personnes. Sa voix de white blues singer n'a pas faibli mais le corps est brisé. Seul le grand repos parviendrait à estomper les ravages de l'héroïne et de l'alcool. Après le festival de Toronto et une kyrielle de dates, elle enregistre de nouvelles chansons (Cry Baby de Ragovoy & Berns, Mercedes Benz qu'elle compose avec le poète Michael McClure, Me And Bobby McGee de Kris Kristofferson et l'inoubliable Move Over), sous la houlette de Paul Rothchild, le producteur des Doors et du Butterfield Blues Band. La suite est un point final creusé dans la chair. Trop d'héroïne seringuée au Landmark Hotel et la mort sans témoins. « Pearl » est une œuvre posthume. « Ce que j'ai fait de mieux, dira Paul Rothchild, et probablement l'un des meilleurs albums arraché aux Sixties ». Guy Darol
À l'est de Birmingham, Leicester est un centre industriel à dégaine victorienne. Les usines y sont légion mais également les musées d'art. John « Charlie » Whitney, étudiant d'une Art School a choisi. Il maniera une Gibson SG EDS-1275 et écrira des mélodies définitives. Comme son camarade Roger Chapman alias Chappo, il s'est très tôt nourri de blues, de r'n'b et de country. Au sein des Roaring Sixties, Chappo laisse percer son vibrato exceptionnel. Sa voix de wildcat appartient à la légende des timbres rauques, celle des Joe Cocker, Rod Stewart et Van Morrison. Avec Ric Grech (violoniste et bassiste au long cours), le saxophoniste Jim King et le batteur Harry Ovenall, Whitney et Chapman forment The Farinas, un combo réinterprétant les classiques de Sonny Boy Williamson et de J.B. Lenoir. La route du quintette en costume rayé croise celle du producteur angelnos Kim Fowley qui travaille au développement des 'N Betweens (futurs Slade) et de Soft Machine. « Puisque vous aimez les tenues de mafieux, leur dit Fowley, appelez-vous plutôt Family ! » Ainsi fut lancé un tout neuf composite mêlant blues, folk, jazz, pop et traversées psychédéliques. Nous sommes à Londres, en 1967, et le groupe vit en communauté dans une vaste maison du West End où les rencontres de hasard portent des noms connus des amateurs d'épopée pop. Il est banal qu'au milieu d'une soirée lysergique les Byrds tapent la discussion avec les musiciens d'Aynsley Dunbar's Retaliation ou de Maggie Bell. Après le succès du single Scene Through The Eye Of A Lens, Dave Mason (guitariste de Traffic) produit un premier album. « Music In A Doll's House » sort en 1968 sur le label Reprise, la marque de Frank Sinatra. Dans le contexte évaporé des pièces de Pink Floyd ou de Caravan, la galette livre un son tranchant, presque frénétique. Dans la période qui suivra, dédiée à la vie sur scène à travers le monde, le rugueux Piece Of Mind sera souvent pris pour un hymne freak. Lors d'un concert à l'Albert Hall, il est le signal qui indique que le public peut monter sur scène et faire n'importe quoi. Family n'échappe pas à la mode festivalière qui écume désormais tous les sites de déflagration pop (Woburn Festival, Wight, Glastonbury Fayre...) mais c'est surtout lors d'une prestation au Fillmore East de New York que Roger Chapman donne le ton. La voix de Chappo semble échappée d'un Etna en ébullition. C'est un chanteur nerveux, à la gestuelle imprévisible. Il agite son micro avec l'agilité d'un jongleur ivre et parfois l'instrument lui échappe et va se loger dans une face amie. Bill Graham, patron du Fillmore à l'humeur réputée variable, invite Family et reçoit un micro en plein visage. Chappo manque de le tuer. Ça ne se fait pas. Est-ce cette maladresse qui confère à ce groupe un air d'exode permanent ? Toujours est-il qu'après le majestueux « Family's Entertainment », le turn over devient mode de vie. Ric Gresh part rejoindre Blind Faith puis Ginger Baker's Airforce. Il est remplacé par John Weider des New Animals d'Eric Burdon qui cède sa place à John Wetton, émérite abonné du double manche. Et voici John « Poli » Palmer (pianiste et vibraphoniste de jazz) qui injecte le son cool dont le meilleur exemple est Strange Band, l'une des nombreuses réussites de ce groupe à l'univers orné de beaux cuivres et de violons mirifiques. Après la disparition de la famille en 1973, Roger Chapman formera les splendides Streetwalkers. Il coule des jours heureux en Allemagne. « Rollin' & Tumblin' » (2001) est son dernier album signé de son nom d'animal vocal. Guy Darol
Chacun porte son barda, celui de l'enfance, rempli de cailloux et de sucreries. Le sac de Chan Marshall est lourd de peines. Sur les chemins qui ne mènent nulle part, la charge lui cassait le dos et la douleur l'obligeait à s'asseoir. N'importe où. Sans doute croyait-elle apaiser les petites plaies de l'âme en buvant chaque jour un peu plus. Jusqu'à vaciller dans l'oubli qui efface tout. Elle ne pouvait pas continuer longtemps. L'alcool était pire que le tas de cailloux.
Chan est née le 21 janvier 1972, en Georgie, USA. Ses parents se séparent presque aussitôt. Jusqu'à l'âge de 16 ans, sa vie est une errance à travers le Tennessee, l'Alabama, la Georgie pour aller d'une mère hippie à un père pianiste ambulant. Un jour, elle décide que sa mère est un monstre. Elle choisit de vivre au côté du père qui pratique l'art d'alléger les cœurs. Musicien, il sait que polir l'instrument est le plus sûr moyen de connaître la paix. Elle achète une guitare Silverstone millésimée 50. Il lui enseigne le gospel, le blues. Un univers qui lui indique la voie. Après des études cahoteuses, elle se rend à New York où elle forme un trio. Elle cherche un nom, comme une bannière qui rend visible. Un jour, en sortant d'un bistro, elle croise un vieil homme coiffé d'une casquette brodée de mots : Cat Diesel Power. Elle vient de trouver une ordonnance pour ajuster la thérapie. Une autre fois, après un concert de Liz Phair, elle rencontre Steve Shelley, le batteur de Sonic Youth et Tim Foljahn du groupe Two Dollar Guitar. Le train est lancé. Il y aura trois stations : « Dear Sir » (1995), « Myra Lee » (1996) et « What Would The Community Think » (1996), albums folk-rock habités. La voix de Chan a la rugosité du silex qui taille dans une brume de spleen. Avec le single Nude As The News, issu du troisième artefact, le succès est au rendez-vous. Elle a signé avec le label Matador (Belle and Sebastian, Interpol, Mogwai) et son programme est assuré. Concerts à mener comme la barre d'un navire en détresse. Chan a horreur des salles. Panique. Insécurité. Le miracle qui devait se produire s'est changé en billet pour l'enfer. Elle décroche.
Baby-sitter à Portland (Oregon), elle redécouvre l'anonymat et caresse des envies de fuite. Plus loin. Encore plus loin. Mais toujours avec le barda qui lui brise les reins. Avec Bill Callahan (du groupe Smog), son compagnon, elle se réfugie dans une ferme en Caroline du Sud. L'éloignement du monde qu'elle croyait bénéfique révèle un nouvel ennemi. Car c'est l'ennui qu'il faut combattre. Elle écrit « Moon Pix » (1998), album dédié aux phases de la Lune. L'enregistrement se fera à Melbourne en compagnie de Mick Turner et Jim White du groupe Dirty Three. Consécration absolue. Trop de gloire l'étouffe. Elle part en solo vers l'obscur. Dans les salles de cinéma, elle joue sur « La Passion de Jeanne d'Arc » de Carl Theodor Dreyer d'après le roman de Joseph Delteil. Cette matière cinématique se retrouve sur « The Covers Record » (2000) (avec l'incroyable reprise de Satisfaction, sans son riff, et des relectures de Lou Reed, Bob Dylan, Sam Coslow), opus sans frisottis. Un piano. Une guitare. En 2003, elle sort le splendide « You Are Free », avec Eddie Vedder (Pearl Jam), Dave Grohl (Nirvana, Foo Fighters) et Warren Ellis (Dirty Three), où scintillent des reprises de John Lee Hooker et de Michael Hurley. Le temps de la confiance n'a pas encore sonné et cette incertitude est toujours palpable lorsque Cat Power est en scène. Vrai jeu de massacre. Chant inaudible. Set interrompu par la pulsion d'effroi. L'envie de boire peut-être. Ou de pleurer. En février 2006, elle sort son meilleur album, « The Greatest », référence à Mohamed Ali ainsi surnommé quand il est l'imbattable. Mais Chan explique qu'elle a choisi ce titre pour rendre hommage à l'humanité tout entière. « The Greatest » est une plainte luxuriante (chœurs, cuivres et cordes créent une ambiance pharaonique) et Chan y chante toujours son cœur. Définitivement meurtri. Il lui semble que tout est raté. Même ce qui est bon lui échappe. À un journaliste qui lui demande ce qui la comblerait de bonheur, elle répond : « J'aurais voulu dire à mon père que je l'aime ». Elle dit ça. Elle boit. Elle disparaît. Tournée américaine annulée. Concerts européens reportés. La peur au ventre qui noue la gorge. Et une voix considérable, bouleversante, dans laquelle on pourrait voir briller quelques éclats noirs de Nick Drake, de Janis Joplin, de Mariane Faithfull et les mélopées solaires de Buffy Sainte-Marie. Guy Darol
Les murs du lycée Voltaire suintaient l'ennui. L'enthousiasme, nous l'éprouvions bouche bée à l'écoute de Roland Brunet et de Serge Koster, deux professeurs d'élite qui avaient misé sur le plaisir pour enseigner philosophie et littérature. Pour le reste, c'est au sommeil qu'il fallait résister ou à certaines démangeaisons de chahut. En ce temps-là, on s'éclipsait souvent dans les cafés environnants pour y pratiquer le babyfoot et la conversation sur un monde que nous envisagions de raser. Pour échapper à l'ennui et aux filles que nous ne parvenions jamais à approcher, on allait les uns chez les autres. Séances Teppaz. Des matinées entières, on faisait tourner une galette, toujours la même. Dans un contexte strictement scolaire, cette application aurait été récompensée. On étudiait en quelque sorte. En 1971, l'étude portait sur la dernière livraison de Gong : Camembert Electrique.
Je conserve précieusement (disons-le, dans mon cœur), ces images de matin frais où j'arpentais la rue de Belleville pour rejoindre Patrick Mabire, le complice des cours séchés. Fragrances de tabac blond. La salle à manger où nous décortiquions sagement les sonorités galactiques sentait le tabac de pipe que fumait son père. Un onguent nécessaire pour accéder aux subtilités psychépop de la Planète Gong. L'univers de Daevid Allen était habité de Pot Head Pixies et traversé par des théières volantes. Totalement fou. Mais doux. Bien moins spooky que les envolées lysergiques d'Hawkwind. Il régnait là une atmosphère souriante marquée surtout par l'influence des fairy tales et de Lewis Carroll. L'opus donnait envie de chanter et de sautiller sur les quais de métro. Ce à quoi l'on s'exerça longtemps lançant à pleine voix une sous la lune ou encore dynamite (avec l'accent de Glastonbury) à la station Châtelet sans craindre jamais de se faire épingler par la police du sous-sol. C'était vraiment délicieux.
Inutile de préciser la qualité de cet album (qu'il faut bien dire culte) marouflé dans le château d'Hérouville, propriété de Michel Magne, produit par Pierre Lattès et enregistré par Gilles Salle. Objet sonore sans contour fixe, Camembert électrique associe les noms de Christian Tritsch, de Didier Malherbe et d'Eddy Louiss et c'est cela (avec la voix intersidérale de Gilli Smith) qui fait la différence.
Reprises par The Orb, 808 State, Global, The Shamen, les pièces de cette inoubliable galette ne cessent de remuer les souvenirs et de nourrir l'inspiration. Jusque dans les contrées les plus inattendues. Five Fifteen, groupe finnois hard rock'n'roll, a récemment mis son horloge à l'heure de Gong en déclinant un singulier Six Dimensions Of The Electric Camembert.Guy Darol
GONG CAMEMBERT ELECTRIQUE SPALAX/LA BALEINE, 1971.
Il faut impérativement écouter Babilonia, petite perle pop-electronica de Jean-Philippe Verdin alias Readymade FC. Pourquoi cette injonction d'emblée ? Parce qu'il est rare de découvrir (en ces temps pléthoriques) un album sans ratés, somptueux jusque dans ses microfissures. Après Bold qui révélait un style où se tenaient en équilibre le dub, la techno et une electronica archi-mélodieuse, l'univers de Jean-Philippe Verdin (par ailleurs compositeur, arrangeur, producteur pour Luz Casal, Etienne Daho, Dani et Michel Delpech) vient de s'élargir à toutes les possibilités offertes par les machines et l'instrumentarium acoustique pop. Et c'est pur bonheur. Imaginez cette réunion, celle de Beth Gibbons et de Neil Hannon ou encore de Bob Dylan et de Brian Wilson. Le Jardin d'Eden est tout proche, n'est-ce pas ? Cette sensation de paradis existe tout au long des 13 titres de ce Babilonia aussi universel que son nom l'indique. « Barefeet », voici un air vraiment ineffaçable. « Snow Lion », nuageuse mélodie interprétée par Feist chassera tous vos démons. « Slide » chanté par Yael Naïm vous précipitera dans une douceur sans précédent. Quant à la présence de David Sylvian et de ses boîtes à musique sur « A Fire In Forest », elle s'apparente à un éblouissement dans une journée massacrée par l'ennui. Petite perle, ai-je dit. Guy Darol
Comme le rappelle Tim Willis dans son inestimable biographie de Syd Barrett ( Le Castor Astral éditeur), le génie calciné de Pink Floyd s'est perdu sur les chemins croisés de l'acide et des femmes. Jennifer Gentle fut l'amante envoûtante que Barrett décrivit au fusain sur The Piper At The Gates Of Dawn, le meilleur du Floyd. Et c'est désormais un binôme psychépop vraiment hallucinant. La palette sonore de ce quatrième album est sertie de références mi-nues mi-voilées. Impossible de ne pas entendre dans la voix de Marco Fasolo le grain délicieusement cockney de Steve Marriott. Quant à l'instrumentarium (glockenspiel de chez Joué Club, orgues Bontempi, flûtes en plastique, ballons de baudruche qui flatulent...), il convoque autant le souvenir de Joe Meek que celui des Einstürzende Neubauten. Et en écrivant cela, je me dis qu'une fois de plus Pascal Comelade s'est fait repassé. L'hommage explicite au vieux Barrett et subséquemment à ses excès lysergiques fait tendre l'oreille du côté d'autres sources. Il y a dans Valende un psychédélisme brut qui renvoie au 13th Floor Elevators de Roky Erickson et aux Electric Prunes de Jim Lowe. On y retrouve même l'acid rock des Beatles avec une citation anamorphosée de « Norvegian Wood ». Par ailleurs, les effets de réverb sur les vocalises ne sont pas sans ranimer les fantômes de Gong ou de Soft Machine. Enfin, lorsque Jennifer Gentle joue en roue libre, on dirait que le duo cligne des yeux vers les Mothers Of Invention. Tout cela pourrait laisser penser que l'album n'est qu'un savant salmigondis. Du tout. Voici du grand œuvre. Inusable même à forte écoute répétée. Guy Darol