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LITTERATURE TUMULTUAIRE - Page 4

  • CHARLES MONSELET ❘ L'HOMME DE GOUT


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    Romancier, critique, poète, bibliophile, essayiste, librettiste, nouvelliste… Charles Monselet (1825-1888) fut tout cela, points de suspension compris. « Polygraphe aux accents éclairés », selon Sylvain Goudemare, cet écrivain se fit connaître par des pastiches, des parodies (Dumas, Sue) et définitivement remarquer grâce à une préface aux Mémoires d’Outre Tombe de Chateaubriand. Chroniqueur au Figaro, à l’Événement, au Journal du Matin, au Pays, au Monde Illustré, il apparaît comme une « vedette du journalisme » et est vite apprécié de ses contemporains : Sainte-Beuve, Hugo, Tellier, Barbey d’Aurevilly. Sa Lorgnette Littéraire (1857) est un témoignage exceptionnel sur les littérateurs du XIXe siècle. Il s’y attache de « petits » auteurs (Defontenay, Scholl) tout de même qu’il y défend Pétrus Borel et Xavier Forneret, alors que ce dernier est moqué de tout le monde.


    Admirateur d’Hugo et de Nodier, et avec eux du romantisme, Charles Monselet est autant un propagandiste de talents connus ou obscurs qu’il est un écrivain méritoire, assez génial dans ses études cocasses et satiriques, particulièrement lorsqu’il soigne le portrait des plumissieux. Auteur d’une cinquantaine d’ouvrages dans lesquels il mélange tous les genres, il est capable de trousser avec un égal bonheur poésies et recettes de cuisine.
    Chroniqueur de la Revue des Gastronomes et du Gourmet, il a créé de délicieux sonnets dont une « Ode au Cochon » qui le déconsidéra auprès de Jules Laforgue alors qu’il espérait se faire élire à l’Académie Française.


    Subtilement et joyeusement annoté par Sylvain Goudemare, Le Plaisir et l’amour permet d’accéder à un très étonnant volume qui réunissait quelques figures du XVIIIe siècle passés dans l’ombre. Les Oubliés et les Dédaignés, paru en 1857, réhabilite en effet des auteurs dont, sauf exception de Rétif de la Bretonne, le succès n’a jamais retenti. Sylvain Goudemare a choisi de présenter, parmi ces oubliés, le Chevalier de la Morlière, le Cousin Jacques, Louis-Sébastien Mercier, Grimod de la Reynière et Charles Lassailly, ce « petit romantique », plus vaste que l’étiquette qui l’épingle.


    Charles Monselet qui, selon Sylvain Goudemare, « préfère la sensation à la pensée », commente l’histoire de ces hommes et de leurs œuvres avec un penchant pour le détail qui donne un trait bien net et de la couleur vive. « Critique impressionniste », il sait aussi pincer et tirer à boulets rouges lorsqu’il évoque l’exploitation de Lassailly par Balzac.


    L’auteur des Roueries de Trialph fut en effet élu par Balzac qui collectionnait les secrétaires afin d’ébaucher, voire de grossoyer sa besogne. Enfermé dans sa manufacture à romans, Lassailly était soumis à un travail d’esclave. Attelé à la tâche jour et nuit, aiguillonné contre le sommeil par des platées d’épinards et d’oignons en purée, Trialph, comme le surnommait ses amis, joua la fille de l’air pour mettre fin à ce régime de forçat.


    Monselet qui aimait dessiner les êtres, surtout les « infiniment pauvres », se révéla un bon aquarelliste du Paris Montmartrois. Quelques-unes des belles pages du Plaisir et l’amour immortalisent, comme les clichés du photographe Eugène Atget, les aspects aujourd’hui mutilés d’une ville qui appartenait alors aux carriers et aux fabricants de bougies. Guy Darol

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    Le Plaisir et l’amour
    Anthologie présentée par Sylvain Goudemare
    Editions du Griot, 1988

    Le Monselet gourmand
    Florence Arzel et Maryse Aupiais
    Editions Jeanne Lafitte, 1988              

    LE COCHON

    (Le plaisir et l'amour)

    Car tout est bon en toi: chair, graisse, muscle, tripe !
    On t'aime galantine, on t'adore boudin
    Ton pied, dont une sainte a consacré le type,
    Empruntant son arôme au sol périgourdin,

    Eût réconcilié Socrate avec Xanthippe.
    Ton filet, qu'embellit le cornichon badin,
    Forme le déjeuner de l'humble citadin;
    Et tu passes avant l'oie au frère Philippe.

    Mérites précieux et de tous reconnus !
    Morceaux marqués d'avance, innombrables charnus!
    Philosophe indolent qui mange ce que l'on mange !
    Comme, dans notre orgueil, nous sommes bien venus
    A vouloir, n'est-ce pas , te reprocher ta fange ?

    *

    Le sonnet de l'asperge

    Oui, faisons lui fête !
    Légume prudent,
    C'est la note honnête
    D'un festin ardent.
    J'aime que sa tête
    Croque sous la dent,
    Pas trop cependant.
    Énorme elle est bête.
    Fluette, il lui faut
    Plier ce défaut
    Au rôle d'adjointe,
    Et souffrir, mêlé
    Au vert de sa pointe,
    L'or de l'œuf brouillé.

    Figurines parisiennes par Charles Monselet


    PREMIER COUP DE CRAYON

    Il en est de Paris comme de l'Océan : les poëtes et les peintres en feront le sujet éternel de leurs toiles et de leurs pages, de leurs croûtes et de leurs chefs-d'oeuvre. Paris est un modèle qui pose pour tout le monde. Les uns le peignent en pied, les autres en buste ; ceux-là en font une académie, ceux-ci une miniature ; il en est qui le montrent de face, de profi l, de trois quarts ; j'en ai rencontré qui se contentaient d'un oeil ou d'un pied, de moins encore.

    On me demande d'être vrai. Je le serai ; - à cela près cependant que je ne réponds pas des distractions de mon modèle. Si mon modèle bâille ou fait la grimace, s'il a les yeux rouges ce jour-là, s'il ne se souvient plus aujourd'hui de la pose d'hier, la faute n'en sera jetée que sur lui. - Peut-être adviendra-t-il, par suite, que le Paris de tel chapitre sera tout opposé au Paris de tel autre. Pour cela, que l'on ne crie pas à la contradiction, ou pire encore, au paradoxe. D'ailleurs, Paris m'a tout l'air lui-même d'un paradoxe effréné.

    Ceux qui sont venus avant moi ont adopté pour la plupart des formes convenues, un cadre précis. Les timides, les ingénieux, les amusants, et quelquefois aussi les philosophes, se sont déguisés en Persans, en Turcs, en Tartares, en Mogols, en Arméniens, en Japonais, en Chinois et en Cochin-chinois. Dans ce cas, Paris s'appelait Ispahan, Bagdad, Constantinople. Le XVIIIe siècle tout entier s'est longtemps amusé de cette mascarade ; le sévère Montesquieu et le turbulent Diderot se sont tous les deux affublés du turban et de la robe bariolée aux longues manches pendantes : «Que Mahomet vous donne la prudence des lions et la force des serpents !» ont-ils dit à M. Jourdain, le bourgeois de Paris. - Ensuite est arrivée la mode des spectateurs, des observateurs, des ermites. Quelques écrivains privilégiés ont rencontré des fées, des génies, des ombres illustres qui se sont fait un véritable plaisir de leur servir de cicerone et de leur fournir la clef des charades de la rue et des logogriphes du salon. De plus humbles se sont contentés d'un petit vieillard ou d'une petite vieille, centenaire pour l'habitude, à l'oeil vif, à la voix cassée, au sourire malin, au nez barbouillé de tabac, portier ou marquise, gentilhomme ou femme de chambre, un débris du siècle passé, qui, entre deux accès de toux, crachait une épigramme ou un portrait.


    L'HOMME QUI ENGRAISSE LES COMÉDIENS

    Je le connais, - et voilà pourquoi je parle de lui. Si je ne l'avais pas vu, je ne voudrais pas croire à son existence. C'est un des originaux les plus incompréhensibles que l'on puisse rencontrer sur le pavé de Paris, où, cependant, se trouvent rassemblés tant d'originaux. Il y a quelques années seulement que s'est révélé l'homme qui engraisse les comédiens. Son visage est insignifiant, sa mise est celle de tout le monde ; il n'a de vraiment singulier que sa grande maigreur. Auprès de lui, Voltaire paraîtrait gras. Cette maigreur a résisté jusqu'à ce jour aux nutritions les plus excessives ; les rosbeefs d'Angleterre et les pâtes d'Italie n'agissent sur lui pas plus que sur un clou.

    Ses antécédents sont enveloppés d'un mystère impénétrable. Fût-il marchand de cuirs comme Chicard, fleuriste comme Brididi, professeur de musique comme Carnevale ? A le voir errer tout le jour en oisif, on supposerait qu'il savoure les fruits d'un héritage inespérément éclos sous ses pas. Il se tient d'ordinaire aux environs des théâtres lorsque commencent les répétitions, et le reste du temps dans les cafés fréquentés par les artistes dramatiques, tels que le café de la Gaîté, celui de la Porte-Saint-Martin et l'estaminet des Variétés. D'ailleurs, il ne fume pas, il ne joue pas, il ne lit pas les journaux. - Que fait-il donc ? il guette.

    L'homme qui engraisse les comédiens met paisiblement ses mains derrière son dos, il regarde au plafond, il se mouche avec un bruit de trompette ; on n'est pas plus candide. Toutefois, il tourne déjà autour de son homme. Insensiblement, il s'approche de la partie commencée ; si c'est le billard, il est la galerie ; il approuve les coups, il sourit avec entraînement ; vienne un point douteux, il est pris pour arbitre et désormais il a le droit de conseiller. Vous trouveriez difficilement un homme plus poli que lui : il offre de l'absinthe au comédien, et puis encore de l'absinthe ; alors, il s'enhardit à causer, il a vu le comédien dans tous ses rôles, et le comédien lui a paru prodigieux, complet, trente mille fois supérieur à ses confrères. Le comédien gobe modestement cette énorme louange.

    Mais l'heure d'une nourriture plus substantielle est arrivée. L'homme qui engraisse les comédiens propose un dîner chez Bonvalet ou au Banquet d'Anacréon.

    Ici commence son travail. Dès qu'il tient son comédien à table, il se transfigure. De ses yeux si béats tout à l'heure, se dégagent d'électriques paillettes. Il mange peu, mais il l'incite à manger ; et pour cela, il fait venir des vins extraordinaires, des vins jaunes, qui bruissent sourdement et font les courroucés dans les verres ; il évoque les sauces furieuses de la Provence. Puis, du coin de l'oeil, il observe si le comédien engraisse. Pour lui pousser plus facilement les morceaux, il lui rappelle ses créations les meilleures. - Oh ! que vous étiez magnifique dans Pascal le Ramoneur ! - N'est-ce pas ? Au quatrième acte surtout... - Encore un peu de cette sauce aux crevettes, dit-il subrepticement. - Si le comédien ne mange pas, la louange s'arrête ; elle recommence s'il mange ; elle se fait tour à tour insinuante, emportée ; elle est cordiale, elle s'attendrit ; elle pleurerait presque.

    Le comédien engraisse.

    Bien entendu que l'homme qui engraisse les comédiens les choisit jeunes et fluets autant que possible. C'est aux jeunes premiers, aux amoureux qu'il s'attaque, à tous ceux pour qui l'embonpoint est un fléau. Et quand une fois il les tient, croyez qu'il ne les lâche plus. Il est le contraire des vampires : il tue par la vie. Dès qu'il a saisi un comédien, ainsi qu'un magnétiseur saisit un sujet, il entre de gré ou de force dans son intimité, il se fait obligeant, puis nécessaire et enfin indispensable. Alors, il faut que le comédien dîne tous les jours avec lui. Sans cela, le comédien serait un monstre d'ingratitude. Il faut que le comédien se laisse traîner successivement chez Véry, chez Leblond, à la Maison dorée ; il faut qu'il mange quand on remplit son assiette, il faut qu'il boive quand on remplit son verre. Il faut que le comédien engraisse, en un mot.

    L'homme qui engraisse les comédiens est implacable. Un mois, deux mois au plus lui suffisent pour faire d'un être svelte un mortel à peu près obèse. Il a engraissé déjà cinq comédiens des théâtres du boulevard ; ces malheureux n'ont pas pu réussir à renouveler leur engagement ; le directeur leur a ri, non pas au nez, mais au ventre. Ils sont ruinés aujourd'hui. Il ne leur reste plus qu'à prendre l'emploi des queues rouges ou celui des pères nobles. - Lui, cependant, l'homme qui engraisse les comédiens, continue à rester toujours maigre.

    J'ai longtemps cherché le secret de cette monomanie : je suis presque convaincu que cet homme poursuit une vengeance ; j'entends une vengeance collective. Le souvenir de quelque drame intime et amer, expiré derrière une coulisse, doit perpétuellement le tenailler ; c'est sans doute par le théâtre qu'il a souffert, et c'est sur le théâtre qu'il veut se venger. Qui sait si lui-même n'a pas brigué jadis l'emploi de jeune premier, et si sa maigreur révoltante ne l'a pas fait repousser de toutes les scènes ? Dans ce cas, c'est contre toute une cohorte qu'il se rue ; c'est un genre tout entier qu'il tend à faire disparaître de l'art dramatique. Il veut détruire les comédiens par la bonne chère. Mais les comédiens sont prévenus ; j'ai signalé l'homme et je signale le danger.

    J'espère que cela suffira pour déjouer les menées ténébreuses de l'homme qui engraisse les comédiens.


    L'ABOYEUR DE SÉRAPHIN

    Il y a quelques années, l'aboyeur du Théâtre-Séraphin n'était pas ce jeune homme que l'on voit tous les soirs sous les arcades du Palais-Royal, annonçant à voix haute et très-intelligible les féeries d'Ali-Baba, ou la sept millième représentation de l'impérissable Pont-Cassé. C'était un vieillard, coiffé d'un chapeau gris et enveloppé d'un carrick contemporain de la Sainte-Alliance ; son dos était voûté, sa voix était enrouée, il rappelait quelques-unes des créations ténébreuses et grimaçantes d'Hoffmann. Tout le monde le connaissait, car depuis plus de vingt ans il remplissait son emploi d'aboyeur et traînait sur les dalles du Palais-Royal les plis de son immuable carrick.

    J'ai su l'histoire de cet homme. Il s'appelait M. de Saint-V***, et était le beau-frère d'un des plus spirituels acteurs du Théâtre des Variétés, aujourd'hui éloigné de la rampe. Jadis M. de Saint-V*** avait mené une existence brillante, légère, amoureuse ; à l'époque de la première révolution, c'était un petit-maître accompli, avec un brin d'épée sous la basque et du fard au talon. Un des premiers il avait émigré à Coblentz. Là, on ignore si, à l'instar de plusieurs courtisans, il remua des salades ou s'il donna des leçons de danse pour vivre.

    Sous le Directoire, M. de Saint-V*** était déjà bien déchu : il courait la province en compagnie de comédiens et de comédiennes, donnant des représentations partout où il y avait une grange ou une salle municipale ; menant l'existence accidentée et flottante de Desforges, de Pigault-Lebrun, de Plancher-Valcour et de Mayeur de St-Paul ; dînant trop ou ne dînant pas ; usant son coeur en galanteries vulgaires, et voyant chaque jour s'effacer en lui les traces distinctives de sa noblesse et de son éducation.

    Lorsque vint l'Empire, il acheta un carrick, - ce même carrick qui a fait notre étonnement et que nous avons froissé tant de fois. Avec ce carrick, il trouva encore le moyen de coqueter pendant quelque temps ; puis enfin de décadence en décadence, il arriva jusque devant la porte du Théâtre-Séraphin, que dirigeait alors François Séraphin, successeur et neveu de Dominique Séraphin, le grand, le fondateur. M. de Saint-V*** possédait de remarquables restes de haute-contre ; on l'engagea, lui et son carrick, en qualité d'aboyeur.

    Tristesses de ce monde ! - Pendant plus de vingt ans l'émigré de Coblentz, le muscadin de l'an VII s'est égosillé sur le seuil de ce spectacle de marionnettes et d'ombres. Ombre lui-même, il a rivalisé de haillons avec le cynique Duclos ; il est devenu une des curiosités de ce Palais-Royal où il s'était promené si souvent en cadenettes et en habit vert ; les enfants ont ri de lui comme d'un casse-noisette, - de lui ; vicomte de Saint-V***, qui avait tenu l'emploi des Almaviva à Bordeaux et en autres lieux ! Mais de tout cela il se consolait avec la bouteille.

    Quelquefois, il voyait se rendre chez Frascati des femmes qu'il avait connues jadis et qu'il avait aimées ; des femmes aux épaules toutes nues ou toutes couvertes de diamants ; des femmes qu'eût admirées et peintes Gérard ou Guérin. Il les voyait passer sans qu'elles le reconnussent, et il ne s'en émouvait pas davantage, qu'elles s'appelassent Euphrosine ou Aglaée, Aspasie ou Héro. Lui continuait à crier, stoïque et insinuant : - Entrez, messieurs et mesdames, le spectacle va commencer ; vous allez voir la Belle et la Bête, le Voltigeur mécanique et le Magicien Rotomago...

    Et puis, comme je viens de le dire, il aimait la bouteille. Avec cela, on devient aisément philosophe, dans le sens banal et poétique attaché à ce mot ; avec cela, on oublie d'abord ses douleurs, et insensiblement on arrive à pardonner à ceux ou à celles qui vous les ont faites. C'est le véritable baume de fier-à-bras dont parle Cervantes dans son roman. Parfois, M. de Saint-V*** passait deux ou trois jours sans paraître à son poste accoutumé ; quand il n'aboyait pas, il buvait. On le rencontrait alors sur les hauteurs de la montagne Sainte-Geneviève, dans quelque cabaret de la rue Clovis ou de la rue de l'Epée-de-Bois, perdu dans un sourire heureux ou endormi dans son carrick.

    Sur les derniers temps, ses absences devinrent plus fréquentes. Sa voix s'éteignait aussi, son regard était rentré dans la coulisse, il marchait difficilement. Il arrive un moment où les vieillards, ces représentants d'un autre âge, doivent se trouver bien effarés ou bien accablés du poids du passé qu'ils portent sur leurs épaules. Songer qu'alentour les jeunes gens se disent : - Voilà le dix-huitième siècle ! Et n'avoir, Atlas indigne, que le vêtement troué de M. de Saint-V*** pour cacher sa honte ou draper sa dégradation !

    La fin de ce pauvre homme arriva tout à coup, en une enjambée. Un soir qu'il récitait son boniment sur une note plus lugubre et plus basse que de coutume : - l'Oiseau bleu... le Pont-Cassé.... la Chasse aux Canards... - il tomba soudainement. Les passants s'amassèrent autour de lui et voulurent lui prodiguer du secours ; mais tout était inutile : M. de Saint-V*** ne vivait plus.

    Dans l'intérieur du Théâtre-Séraphin, on chantait :

    Les canards l'ont bien passé,
    Tire lire lire, tire lire laire ;
    Les canards l'ont bien passé,
    Lire lon fa.


    IL PLEUT, IL PLEUT....

    S'il y a un chapitre à écrire, c'est principalement sur la fange proverbiale des trottoirs parisiens. Après l'eau, l'air et le feu, la boue peut être classée, du moins sur cette partie du globe essentiellement crottée, comme un nouvel élément et prendre place en cette qualité dans les manuels de physique. Comment la boue se produit d'un instant à l'autre, c'est un phénomène, une énigme. Dix minutes d'une pluie volante suffisent pour changer en cloaque le quartier tout à l'heure le plus net et le mieux entretenu. - Mais peu importe au bourgeois de Paris ! au contraire ; le bourgeois va à la pluie comme le fer à l'aimant, le papillon à la chandelle. C'est sa glu, à lui. C'est juste au moment où le ciel se rembrunit, qu'il songe à l'affaire importante qui l'appelle à l'autre quartier de la ville ; et point ne remettrait si belle partie au lendemain. Néanmoins, comme le bourgeois de Paris est un homme prudent et de précautions, il se munit du parapluie, ce roi des meubles ; et le voilà qui se met en route, après avoir déclaré que cette pluie ne serait rien. - Remarquez bien qu'il est persuadé du contraire ; sans cela il ne serait point sorti. - Mais quelle jouissance pour lui et quelle noble conquête de choisir le pavé le plus propre a u milieu de ces pavés engloutis par l'averse ; de disputer aux plus opiniâtres le trottoir du côté des maisons ; de hausser et de baisser alternativement son parapluie selon la taille des passants, tout en risquant de l'accrocher dans les enseignes ou d'éborgner ceux qui sortent des magasins ! Il ferait dix lieues de la sorte, sans s'apercevoir qu'il est trempé jusqu'aux os. De temps en temps, et pour l'acquit de sa conscience, il hèle un omnibus qui l'éclabousse, mais il a bien le soin de ne s'adresser jamais qu'au plus complet. S'il a l'occasion de passer sur la place du Carrousel, il la saisit avec empressement, dût-il même être forcé de faire un détour pour cela. Il peste contre le vent, il maudit les gouttières et les ruisseaux, mais ce n'est pour lui qu'un thème purement de convention. Examinez plutôt l'aimable expression de sa figure, lorsque la violence de la pluie le force à se réfugier sous une porte cochère. - Ah ! messieurs, quel abominable temps ! s'écrie-t-il en saluant avec urbanité. - Vient-il à monter chez un de ses amis, la scène prend alors un aspect plus héroïque ; c'est avec une orgueilleuse satisfaction et un sourire de conquérant qu'il s'entend adresser des reproches sur son imprudence : - comment avez-vous pu vous décider à sortir par une pluie semblable ? C'est de l'entêtement, de la folie ! vous en ferez une maladie, bien certainement ; voyez un peu comme l'eau ruisselle de votre redingote ! - C'est vrai, répond-il, et de mon chapeau aussi. - Ainsi fait le Parisien, cet homme souverainement heureux, qui prend le temps comme Dieu le lui envoie, et qui ne se plaint autrement que pour la forme ; être à demi aquatique qui passe à travers les plus grandes tempêtes, sans en presque rien sentir. - Pour un Parisien qui attrapera un rhume de cerveau à s'être mouillé les pieds une demi-journée, trente Provinciaux gagneront une fluxion de poitrine. Mais le Parisien est une plante qui a souvent besoin d'être arrosée par l'eau du ciel.


    COMMENT SE FONT LES VAUDEVILLES

    Il y a un vaudevilliste nommé D***, qui est très-mélancolique et qui ne peut trouver les sujets de ses vaudevilles qu'en suivant les enterrements. Enterrement de ses amis ou de ses ennemis, peu lui importe. Il sort de chez lui, il prend des gants blancs, qui lui ont facilité déjà plusieurs situations ; il revêt un habit noir instigateur de couplets, il se met à la queue du convoi et penche la tête d'un air navré. A vrai dire, il serait très-embarrassé de nommer le mort qu'il suit, mais il ne s'en préoccupe que médiocrement ; ce qu'il guette, c'est une idée nouvelle, c'est un dénoûment curieux, une exposition inusitée. Il a déjà fait de la sorte plusieurs pièces d'un fort comique et d'un entrain délicieux. Lorsqu'il trouve un calembour sur le bord d'une fosse, il s'estime l'homme le plus heureux du monde. D*** est d'ailleurs un convive charmant, qui improvise de spirituelles chansons au dessert.

    A la première représentation de son dernier vaudeville, il portait au coude gauche un crêpe, - qu'il avait oublié d'arracher.


    OU L'ON CULTIVE LES ROSIÈRES

    Nanterre est un village coquet, situé entre Colombes et la forêt de Saint-Germain. Les femmes y sont toutes habillées de robes de la couleur des tomates ; on y vend des gâteaux beurrés et l'on y entend, mêlé au son des cornemuses, les pscht, pscht du chemin de fer. L'idylle est traversée par une locomotive.

    Ceux de Nanterre, comme on s'exprimait dans le vieux langage, couronnent une rosière tous les ans. Quand nous disons tous les ans, c'est tromperie. Il n'y a pas eu de couronnement en 1848, à cause de la révolution ; mais à présent les choses ont repris leur train ordinaire.

    - Bonjour, monsieur le bailli et monsieur le tabellion ; Blaise, va-t'en chercher ton tambourin et faisons danser un peu les jeunesses du pays. Une rosière ! la peste ! quel excellent gibier d'opéra-comique !

    La rosière de Nanterre figure d'une façon plaisante au milieu de notre époque. Il y a comme cela deux ou trois coins de terre en France où l'on s'occupe de cultiver la vertu, de même qu'on s'occupe de cultiver les dahlias et d'élever les vers à soie. Tout est procédé aujourd'hui. Seulement le nombre des villages éleveurs s'amoindrit de jour en jour. Nanterre et Salency font bonne contenance encore ; mais leur vertu fait peine à voir, tant elle est laide et piteusement fagotée. C'est de la vertu quand même. Salency surtout, ce bosquet peint par Greuze, - n'est plus maintenant qu'un taudis bas Breton, un repaire de Maritornes. Ses habitants ont le rosièrisme passé dans le sang, et, pour n'avoir point voulu se mêler avec leurs voisins, leurs générations s'en vont petit à petit, crétinisées, bossuées et bancalisées par la vertu.

    C'est la comtesse de Genlis, - la petite Georgette, comme on l'appelait, - qui s'est vantée d'avoir découvert les rosières de Salency : «J'avais dix-huit ans. Salency est à quatre lieues de la terre que j'habitais, et j'ignorais jusqu'au nom de ce village, devenu si fameux depuis. Nous jouions la comédie ; l'un de nos principaux acteurs nommé M. de Matigny, était en même temps magistrat de Chauny et bailli de Salency. Un jour que nous voulions le retenir à coucher, pour faire une répétition le lendemain, il nous dit qu'il était obligé d'aller dans un village voisin. - Et pourquoi ? lui demandai-je. - Oh ! répondit-il, pour cette bêtise qu'ils font là tous les ans. - Quelle bêtise ? - Il faut que j'aille, en qualité de juge, entendre pendant quarante-huit heures, tous les verbiages et tous les commérages imaginables. - Et sur quel sujet ? - Il s'agit d'adjuger, non pas une maison, ou un pré, ou un héritage, mais une rose... Alors on ne donnait rien qu'une rose à de pauvres filles qui manquaient souvent de pain. «La curiosité de madame de Genlis eut cela de bon, que M. Lepelletier de Morfontaine, qui l'accompagnait, fonda une rente perpétuelle de deux cents livres pour la rosière de Salency. - A Nanterre, la rente est de trois cents livres.

    La rosière de cette année a pour nom mademoiselle P*** ; elle demeure à l'extrémité du village, dans la maison dite Maison des voleurs. Déjà vous me demandez si elle est jolie. Mais comment peut-on être jolie avec des gants de coton blanc, comme la pauvre fille en portait ? Cependant elle a la beauté du diable, si cette expression mal sonnante peut s'appliquer à une vierge. Ne faisons point trop fi de la beauté du diable, et n'allons point quérir un goupillon d'exorcisme ; bien heureux ceux qui la possèdent ! En ces diaboliques temps que nous nous sommes faits, tout nous vient un peu du diable.

    La cérémonie a eu lieu dans l'église de Nanterre, auprès du puits miraculeux de sainte Geneviève. Un groupe de petites filles portait la couronne de roses, douillettement posée sur un coussinet de velours. Derrière le tambour, entre le maire et son adjoint, la rosière venait, les yeux bas, rougissante et modestement embarrassée de sa vertu. Elle était accompagnée de la rosière de la dernière année : cela faisait deux rosières. L'église était pleine jusqu'au clocher, où toutes les cloches mises en branle dansaient leur vacarme réjouissant.

    Deux monstrueux sapeurs se tenaient, ornés de leur hache affilée et brillante, de chaque côté de l'autel. Au premier aspect, nous n'avons pas bien compris ce rapprochement entre les sapeurs et les rosières. Il y en avait un surtout qui ressemblait comme deux gouttes de sang à un tortionnaire des gravures d'Albrecht Durer. Il a donné le frisson à mademoiselle P*** quand elle a levé les yeux sur lui. A quelque distance de ces hommes on remarquait les anciens du village, avec des noeuds de rubans bleus à l'épaule et des houlettes pavoisées de la même nuance. Puis la famille populeuse de la rosière, pour laquelle des bancs dans le choeur avaient été réservés. Ce tableau naïf et remuant, au milieu duquel poudroyait un rayon de soleil fièrement transversal, donnait frais au coeur comme un bon réveil.

    Le soir, la rosière a paru un instant au bal Morel, sur la pelouse, - à quinze pas des blés de Nanterre, où se mélangent si joyeusement pendant deux lieues de chemin le rouge des coquelicots, le bleu des bleuets et le jaune des navettes.

    On trouve aussi des rosières au pays de Montesquieu, au château de la Brède, - un joli château, trempant ses pieds dans l'eau comme la sarcelle. - Mais le meilleur pays de production, c'est sans contredit le département de Lot-et-Garonne. Au mois de janvier 1846, je me suis trouvé à l'apothéose des vestales de Tournon, avec Jasmin, le barbier-poëte. Ce jour-là, vingt et une couronnes ont été distribuées par la commission syndicale. Vingt et une rosières d'un seul coup de filet ! - Qu'on vienne parler de Nanterre après cela. - Il est vrai que ces jeunes filles laissaient beaucoup à désirer sous le rapport des grâces, et que la quantité suppléait largement à la qualité. A peine en ai-je remarqué une, une seule, presque enfant, un peu mignonne, tout étonnée, - rosière avec des yeux de Rosine, - et sur le visage de laquelle, comme disait Jasmin en patois, roses et lis étaient escrapoutis.


    LE PEINTRE DES MORTS.


    Comme la nuit j'ai peur du diable
    Et que je cains les revenants,
    Je mets la chandelle sur la table
    Et je ferme les contrevents.

    Ces vers d'une chanson campagnarde me sont rentrés dans la mémoire un soir de la semaine dernière pendant que l'on causait fantômes et seconde vue chez un de nos collègues. On avait vidé le sac aux effrois et rappelé des choses terribles : les apparitions du boulanger François, les chasses du grand veneur de Henri IV, les fièvres chaudes de Guilbert de Pixérécourt. Chacun de nous, plus ou moins, s'était senti tirer les pieds passé minuit, ou avait vu, - comme je vous vois, - une figure blanche, au pied du lit accoudée.

    La conversation, toute frissonnante, s'en allait de la sorte, tour à tour provoquant l'incrédulité ou forçant la foi, lorsque le musicien V*** fut amené à raconter une histoire très-étonnante et très-effrayante, malgré son côté goguenard, ou plutôt à cause précisément de son côté goguenard.

    La voici :
    - Mon père, dit la musicien, était, comme vous le savez, un peintre intelligent et estimable ; on l'appelait souvent pour peindre les gens après leur mort, triste spécialité dans laquelle il avait réussi à se faire une réputation. Il m'emmenait quelquefois avec lui, pour m'aguerrir, disait-il, mais plutôt, je crois, pour s'aguerrir lui-même, et aussi pour l'aider dans ses funèbres préparatifs.

    Ordinairement il faisait la barbe aux défunts, avant de les peindre ; il les cravatait quand c'était des hommes, il leur peignait les cheveux et leur faisait la raie. Aux femmes, il mettait des chapeaux à plumes, des colliers, des gants ; il leur frottait les joues avec de l'esprit de vin pour rappeler les rougeurs évanouies.

    Un jour, mon père fut mandé par un riche étranger, un Russe, dont la femme venait de mourir. - Allons, petit, donne-moi ma boîte à couleurs, et viens avec moi. - J'aurais autant aimé rester à jouer du violon, mais je n'avais pas le choix. En sortant, mon père me mit sous le bras un roman qui venait de paraître et qui faisait quelque bruit, le Cocu, par Paul de Kock.

    Arrivés à la maison mortuaire, nous trouvâmes le Russe en proie à la plus vive douleur ; il nous conduisit en sanglotant auprès du lit de la morte, et nous eûmes toutes les peines du monde à lui faire comprendre qu'il fallait absolument qu'il se retirât afin que nous puissions travailler. Une fois seuls, mon père disposa la dame, la coiffa d'un bonnet à rubans et lui plaça un bouquet de roses au corsage. Je la vois encore ; c'était une personne imposante et de grande taille ; elle semblait respirer, et de temps en temps se dégageaient de son corps les derniers glouglous de la vie. Mon père me fit asseoir sur le lit, à côté d'elle, et, m'ordonnant de la tenir soulevée sur son séant en l'enlaçant d'un bras, il me dit de lui lire le roman que j'avais apporté.

    Je me souviens que la journée était magnifique, et que, par une fenêtre ouverte, il nous arrivait un soleil éblouissant. Mais ce beau temps et les joyeusetés du Cocu, que je lisais sans interruption, ne parvenaient pas à détourner mon esprit de ce cadavre que je serrais contre moi. Il me semblait qu'il y avait dans cette lecture faite à l'oreille d'une morte quelque chose de sacrilége. Je n'étais pas rassuré, et lorsque, après deux heures de séance, je descendis enfin du lit, je crus que mes pieds étaient devenus de marbre. Mon père me plaisanta beaucoup sur ma pâleur, - et il m'enjoignit de faire une corne à l'endroit du roman où nous en étions restés...

    Ici le musicien s'arrêta comme quelqu'un qui hésite.

    - Est-ce tout ? lui demandai-je.

    - Non, répondit-il ; l'histoire a un dénoûment, et ce dénoûment c'est toute l'histoire. Mon père, qui était un esprit fort méritait d'être puni. Il le fut, en effet, mais d'une manière épouvantable, terrifiante. Appelez cela vision ou cauchemar, toutefois est-il que ses cheveux, de gris qu'ils étaient, devinrent blancs au bout d'une semaine. C'est que pendant une semaine, toutes les nuits régulièrement, la princesse russe revint lire à mon père le Cocu, de Paul de Kock.


    UNE BIBLIOTHÈQUE DE GRISETTE

    Emile Debreaux, qui fut le Gentil-Bernard des grisettes, a fait une chanson intitulée : Ne montez pas chez elles. Dans cette chanson, notée sur l'air de la Catacoua, il décrit le désordre pittoresque de leur ameublement et rit tant qu'il peut des loques éparpillées, des corsets errants, des bas qui sèchent sur des ficelles, des carafes qui implorent les coquilles d'oeufs purificatrices. Il n'oublie qu'un trait : il ne parle pas de la bibliothèque des grisettes, une des choses qui provoquent le plus l'étonnement et l'hilarité.

    Cette bibliothèque est une dans toutes les mansardes. Elle se compose invariablement d'Hippolyte, comte de Douglas, de Maria ou l'Enfant de l'infortune, - et d'un Almanach des Amours ou Almanach de la Closerie des Lilas, je ne sais plus lequel, mais il est reconnaissable par un frontispice colorié représentant des étudiants en béret qui portent triomphalement sur leurs bras une grisette, agitant en l'air une queue de billard. Sur le devant, on aperçoit un symbolique Béranger, recourbé par en haut comme une canne, et regardant passer le joyeux cortége avec un sourire - très-mal venu sur la pierre lithographique.

    Le même almanach contient presque toujours des fragments poétiques de Privat, tel que l'hymne célèbre où se rencontrent ces deux vers rimés avec une rare fierté :

    Le boulevard où l'on coudoie
    La jeune fille au long cou d'oie

    .

    La bibliothèque des grisettes a ses éditeurs particuliers et ses auteurs spéciaux. Parmi les premiers, Renault et Krabbe sont ceux dont le commerce est le plus considérable ; ils font refaire, en falsifiant le titre, les oeuvres à succès que les petits lecteurs n'ont pas les moyens d'acheter ni même de louer. C'est ainsi qu'on peut se procurer chez eux pour six sous l'Histoire du fameux comte de Monte-Cristo et de ses trésors, les Aventures de d'Artagnan et de ses trois compagnons, Mathilde ou l'Innocence d'une jeune femme, les Mystères de la Tour de Nesle, etc., etc.

    Je croyais, jusqu'à présent, qu'il n'y avait qu'un seul nom pour désigner ce trafic : contrefaçon. Il paraît que les libraires susdits, en ont trouvé un autre, qui est : réduction.

    En dehors de ces réductions, on ne distingue pas un grand nombre de romans inédits, dans le sens absolu du mot. La vogue est toujours aux Amours d'une jeune servante et d'un soldat français. Dans ce genre, Pécatier et Picquenard n'ont pas encore rencontré de rivaux.

    N'oublions pas de mentionner, au milieu de cette nomenclature, un minime bouquin, épais et carré, - de la forme d'un pavé vu au petit bout d'une lorgnette, - ayant pour titre : la Goguette de Lilliput, et orné des trois profils de Piron, de Gallet et de Collé. C'est un recueil de vieilles chansons grivoises qui menacent de se perpétuer à travers les siècles, en ramenant toujours le même sourire sur l'air de Turlurette, et le même clignement d'yeux à propos du refrain : Eh bien !... Vous m'entendez bien.

    Mais de tous les livres affectionnés par les grisettes, celui que vous êtes le plus certain de rencontrer au fond de la corbeille à ouvrage, à côté du jeu de cartes traditionnel, du dé à coudre et de l'oeuf en bois qui sert à repriser les bas, le livre le plus consulté et partant le plus recroquevillé à ses angles, celui qu'on s'empresse d'ouvrir au saut du lit, lorsqu'on est à jeun, - sur lequel on médite avec délices ou que l'on rejette avec dépit ; le confident, le conseiller, l'écho, c'est le livre intitulé diversement : la Clef des Songes, - l'Oracle des Dames et des Demoiselles, - la Voix du Destin, - l'Urne magique - ou la Sibylle couleur de rose.

    C'est en feuilletant un livre semblable, écrit par les farceurs les plus naïfs, qu'on peut se rendre compte, mieux que par la lecture de Senancourt et des romans esthétiques, de tout ce que l'âme d'une femme contient de faiblesse, de crainte, d'illogisme, d'irrésolution et de folies. Une femme qui consulte la Clef des Songes cesse d'être une énigme et un problème ; vous pouvez dès lors la dominer tout à votre aise, avec la certitude que les moyens les plus grossiers seront les meilleurs.

    La Clef des Songes ou «interprétation de tous les objets qui peuvent apparaître dans le sommeil, >d'après les plus subtils docteurs du monde», a été, j'en suis assuré, la cause de bien des mariages, de bien des séparations, de bien des suicides. Ce livre cache une importance extraordinaire sous des apparences bénignes. Qui pourrait voir, en effet, des catastrophes sous ces simples lignes, que nous copions :

    BARBE. Se la faire : réussite complète ; - à un autre : mauvais présage.
    BOUDIN. Affliction ; - en manger : surprise.
    GENDARMES. Lumière profitable ; - qui vous arrêtent : travail rémunéré.
    OIGNONS frits : lasciveté étonnante.
    HUITRE. Ouverte : satisfaction infaillible ; - fermée : embuscades périlleuses.
    JOUES potelées : joies ineffables.
    La
    Clef des Songes est quelquefois plus compliquée :
    MURAILLES. Devant soi : preuves d'impuissance ; - qu'on surmonte : amélioration ; - avec un fossé : emblême menaçant ; - tomber d'une muraille :
    plaisir incomparable (oh !).

    D'autres fois, elle est littéraire et railleuse :
    JOURNAL. En lire un: perte de tranquillité.
    NAVET. Esprit improductif et froid. (Cela est évidemment une flatterie à l'adresse de l'auteur des
    Libres Penseurs).
    TRAGÉDIE. En voir jouer : tristesse, pâles couleurs.
    Le plus souvent, la
    Clef des Songes accumule comme à plaisir des impossibilités :
    BRAS musculeux : triomphe.
    COURONNE. Dignité personnelle ; - si elle est d'os de mort, avec des feuilles de saule : destruction. (Qui diable peut voir en rêve une couronne d'os de mort, et
    avec des feuilles de saule encore !)
    NOMBRIL. Voir son : c'est être dans la bonne voie pour le royaume des cieux.

    Ce dernier est le plus étonnant, et nous n'en citerons pas d'autres.

    Beaucoup cependant, parmi les femmes qui consultent la Clef des Songes, ont réclamé le droit de monter à la tribune et de faire des lois !

    L'Oracle des Dames et des Demoiselles surpasse encore en extravagante puérilité la Clef des Songes : il répond à «toutes les questions sur les événements et les situations diverses de la vie» ; la dernière édition en a été corrigée et augmentée d'après les manuscrits des savants Etteilla, Lavater et Julia Orsini. C'est cet oracle qui, à l'éternelle question : Que fait maintenant la personne à laquelle je pense ? ne manque jamais de répondre : Elle soupire après le jour qui vous réunira.

    Ou bien : Serai-je bientôt mariée ? - Oui ; avec ton petit brun.

    Ou bien : Comment finira l'affaire de coeur qui m'occupe ? - Une coquette te supplantera.

    Ou bien : De qui dois-je attendre la fortune ? - Des heureux que tu feras.

    Ou bien : Que pense-t-on de moi dans le monde ? - Ne cherche pas à le savoir. (Quelquefois l'Oracle est moins poli, il répond : On te trouve prétentieuse).

    Ou bien : Aurai-je ce que l'on m'a promis ? - Oui, si tu es sûre de toi.

    Ou bien : Quel sera mon avenir ? - Tu regretteras le passé.

    Ou bien : Quelle sera l'humeur de mon mari ? - Meilleure que la tienne.

    Ou bien : Dois-je profiter de mes beaux jours ? - A ton âge on ne fait pas de pareilles questions.

    Il faut avouer que les grisettes sont de bonnes personnes, n'est-ce pas ? Et ceux qui les ont tant calominées n'avaient pas sans doute visité, comme nous, leur bibliothèque.


    LA FILLE ROUGEOLINA

    «La fille Rougeolina, dite Petite-Clère ou la Tête de Veau, était attablée, dans un cabaret de la rue aux Fèves, avec la Muette de la Cité, quand tout à coup...»

    N'ayez pas peur. C'est tout uniment un passage du journal de ce matin que nous venons de copier ; non pas un extrait du feuilleton, mais un simple fait-Paris, la chose la plus commune du monde. - Qui est-ce qui disait donc qu'il n'y avait plus maintenant ni mystères ni chourineurs ? Rougeolina, la Muette de la Cité, la Tête de Veau ! ne croirait-on pas avoir sous les yeux des personnages sortis tout palpitants d'un souterrain de mélodrame ? Soyez tranquilles, le pittoresque n'a pas seulement élu domicile dans le roman ; il y a encore, au fond de la vieille Cité, une douzaine de gaillards qui ne s'entendent pas mal à la triture des incidents dramatiques et qui, les bras retroussés jusqu'au coude, écrivent encore, dans le vin et le sang, des histoires toutes frémissantes de passion.


    LES COMÉDIENS APRÈS LA COMÉDIE

    Nous voulons parler des comédiens retirés du théâtre. Plaignons-les de tout notre coeur. En dehors de la rampe, ils ne traînent plus qu'une existence stérile et ennuyée ; ils ne savent que faire, ils respirent mal, on dirait qu'une machine pneumatique les oppresse. Nous avons vu Elleviou, marié richement, rôder autour de l'Opéra-Comique, avec des soupirs de tristesse et d'envie ; le moindre figurant à cinquante francs par mois lui semblait plus heureux qu'un empereur.

    Nous avons vu Saint-Prix, dans sa maison de campagne des bords de la Seine, guetter des villageois pour leur réciter des tirades entières de Mithridate. D'autres, devenus rentiers ou maires de commune, reviennent de temps en temps se glisser dans les cafés obscurs, où ils serrent la main à leurs vieilles connaissances, la basse-taille de Moutauban, le trial de Nantes et cette éternelle famille dont les membres s'appelaient hier encore Florimon, Saint-Ange, Valsain, Belval, Mélincour, Doliban et Rosambeau. - De plus honteux et de plus tristes s'enferment dans leur cabinet ; ils tirent d'un coffre à secret le costume des jours anciens ; ils s'habillent comme pour la représentation ; mais qu'ils ont maigri, justes Dieux ! la culotte de peau des Deux Edmond grimace laidement sur les cuisses ; l'habit trop large pend, flétri, sur les épaules. - Ils marchent et se pavanent devant leur miroir ; à voix basse ils fredonnent un couplet sur le timbre : Du moineau qui te fait envie ; ils font de grands pas, ils tuent, ils pardonnent, ils maudissent, ils donnent et reçoivent des coups de pied, ils parlent à la cantonnade, ils rient aux éclats, et puis, s'apercevant soudain de leurs cheveux blancs, de leurs rides sur lesquelles le fard ne prend plus, de leur maigreur sarmenteuse, de leurs mains qui tremblent et de leur bouche édentée, les voilà qui ouvrent de grands yeux, qui s'arrêtent, et qui se laissent tomber sur le vieux coffre, - en pleurant.....

    C'est qu'ils se rappellent ces nuits illuminées dont ils étaient les héros ; les doux regards des avant-scènes reviennent leur percer le coeur ; ils voient le souffleur dans son trou, inquiet, attentif :
    - A propos, se demandent-ils, qu'est devenu ce pauvre Édouard ?

    C'est le nom du souffleur ; ils s'attendrissent sur le souffleur et sur le concierge, et sur le chef d'accessoires, et sur le machiniste, bien qu'un jour il ait laissé tomber un arbre sur leur dos, puis un autre jour une maison tout entière. Mais bah ! c'étaient bagatelles, et comme ils seraient heureux maintenant si le même machiniste voulait bien avoir la complaisance de les écraser sous toute une ville !

    Rien ne peut leur rendre le théâtre ni leur en tenir lieu, à ces âmes en peine ; le théâtre, cet enfer qu'on aime ! Rien ne vaut pour eux cette suprême jouissance de venir placer son oeil au trou du rideau et d'entendre les accords grinçants de l'orchestre. - N'oubliez pas de me donner ma lettre à la quatrième scène, lorsque je me trouve avec le vieux général. - Ai-je mon billet de logement ? dit Almaviva, au moment de faire son entrée ; et il se tâte. - Oh ! les beaux et furieux battements de mains ! Et, par-ci par-là les jolis rires d'enfants ! - Tenez (c'est toujours le comédien retiré du théâtre qui parle), il y a surtout en haut, dans un coin des quatrièmes, une jeune fille du peuple, mal vêtue, qui ne manque pas de venir un seul dimanche et qui écoute de toute son âme, les yeux fixes et brûlants, les mains crispées sur le rebord du paradis. Je la reconnais bien. Je ne le dis à personne, mais, voyez-vous, cette enfant, c'est mon talent, c'est mon ouvrage, c'est mon amour. - A la place où elle se mettait, j'ai coupé pieusement un morceau de vieux velours de la banquette.


    L'AMOUREUX D'UNE OMBRE CHINOISE

    Les Ombres Chinoises ont presque absolument manqué d'historiens, malgré le rang exceptionnel et bizarre qu'elles occupent dans les annales du théâtre. Bien peu de critiques se sont inquiétés jusqu'à présent de ces drames découpés en noir sur un fond lumineux, de ces petits personnages profondément fantastiques qui n'appartiennent ni à la classe des marionnettes, ni au peuple grossissant et multicolore des lanternes magiques.

    Celui sur qui nous avions longtemps compté pour remettre les ombres chinoises en honneur, le seul d'entre nous qui nous parût spécialement apte à ce travail, c'était Edouard Ourliac, qui avait la parade et l'amour de Fantoccini passés dans le sang. Edouard Ourliac avait publié dans le Journal des Enfants une série de proverbes picaresques et napolitains qui témoignaient d'une vive connaissance du fil d'archal et du ressort.

    On rencontrait souvent, bien souvent, Edouard Ourliac assis dans un petit coin du théâtre Séraphin, près du joueur de piano qui figure l'orchestre. Il était révérencieusement attentif ; et ses yeux non plus que ses oreilles ne quittaient la scène d'un instant. Il avait le rire approbateur ; et quelquefois il assista à deux représentations dans la même soirée.

    Mais aujourd'hui l'auteur des Nazarille est mort, mort ainsi que Charles Nodier qui, lui aussi, avait de naïves tendresses pour le poëme du Pont Cassé.

    Depuis des années, nous hantons la salle Séraphin et nous y goûtons de l'agrément comme une nourrice, de l'agrément sans remords et sans paradoxe. Jamais au sortir de la Chasse aux Canards la moindre pensée mauvaise ne nous est venue ; l'Ane Rétif a toujours laissé notre conscience pure et fraîche comme le jet d'eau du Palais-Royal, devant lequel nous passons en nous retirant. Les pièces du long des boulevards, où l'on se tue et où l'on crie, ne sauraient donner ce sommeil baigné d'innocence, à peine agité par une douzaine de silhouettes légères qui dansent en rond sur notre estomac.

    Nous avons été pendant six mois amoureux d'une petite ombre chinoise qui avait un profil délicieux, et en guise d'oeil un trou par où passait la flamme de la coulisse. Sa bouche était mécanique, et s'ouvrait et se refermait avec un sourire que nous n'avons jamais trouvé que chez elle. De plus elle possédait un corsage dessiné supérieurement, une taille à fourrer dans une bague chevalière, et un jupon court qui montrait deux vrais pieds de Chine. Ainsi bâtie, babillarde et leste, elle nous ravissait l'âme. On distinguait à peine le fil qui la faisait mouvoir par en bas.

    C'était une ombre chinoise toute neuve. Elle avait dû coûter quelque chose comme six francs.

    Je l'avais vue débuter par le rôle de Fanchon, la marchande de bouquets, dans les Cris de Paris, cette pièce où j'ai toujours remarqué ces deux vers adressés à Polichinelle par un faraud, en costume de Cadet Buteux :

    Si le cuir de tes reins a besoin qu'on le tanne,
    Mon pied pour t'obliger fera l'offic' d'un' canne !

    Elle eut beaucoup de succès et elle chanta le couplet final de manière à enlever les suffrages. Dans mon enthousiasme, j'allai jusqu'à me lever de mon banc et à lui jeter un bouquet qui rebondit sur la toile transparente...

    Depuis cette soirée je ne manquai pas une seule de ses représentations. Parfois il me semblait qu'elle me saluait et me souriait imperceptiblement, lorsqu'elle se tournait de mon côté.

    Il est vrai que chaque fois, claqueur solitaire, je ne manquai jamais de lui faire une entrée.

    C'était une grande actrice. Elle avait de la verve, de la mémoire, quelques traditions ; elle savait principalement se tourner, ce qui est l'écueil des ombres chinoises inexpérimentées. Sur ma conscience, je crois qu'elle eût fait dans l'avenir un des talents les plus remarquables de Paris.

    Pour moi j'en étais devenu fou. Je fis tout mon possible pour obtenir mes entrées dans les coulisses. Ce fut en vain. Je lui écrivis plusieurs billets doux qui restèrent tous sans réponse.

    Cet état de choses durait depuis plusieurs mois lorsque un soir d'avril dernier, à mon vif étonnement, je vis apparaître dans les Cris de Paris une autre Fanchon que ma Fanchon, une autre bouquetière que ma bouquetière. Les bras m'en tombèrent. La débutante était massive, engoncée, sans grâce, sans tournure ; ses bras jouaient à tort et à travers ; elle remuait sans raison le menton et les jambes. Et puis son oeil était si mal percé !

    Je n'attendis pas la fin de la pièce pour me précipiter hors de la salle, et je réclamai le régisseur.

    Le régisseur, qui était l 'ouvreuse, parut.

    Hélas ! il m'apprit que mon ombre chinoise était morte, morte sans rémission ! L'avant-veille elle s'était cassé un ressort ; et le directeur, ne voulant pas faire la dépense d'un raccommodage, l'avait supprimée et remplacée par la petite malheureuse que je venais de voir.

    Un profond soupir sortit de ma poitrine, et je jurai de n'avoir plus désormais aucun amour de théâtre.


    CE QU'ON ÉCRIT SUR LES MURS

    On a, de tout temps, écrit sur les murs.

    La première inscription de ce genre commence au Mané, Tecel, Phares, de phosphorique mémoire.

    Le peuple, qui n'a pas de quoi payer un imprimeur, écrit sur les murs sa malédiction ou sa vengeance : A bas quelqu'un ou quelque chose !

    En sortant des Tuileries, après la journée du 10 août, il écrit sur les murs : Magasin de sire à frotter. Plus tard, il colle au front de tous les monuments les trois mots sacramentels : Liberté, égalité, fraternité.

    Pasquin et Marforio écrivaient sur les murs leurs diatribes ardentes contre la Rome des papes et des courtisanes.

    L'exemple fut suivi dès lors par beaucoup de poëtes :

    .... Tel autrefois Faret
    Charbonnait de ses vers les murs d'un cabaret.

    Voltaire écrivit les premiers chants de la Henriade sur les murs de la Bastille. Mais le gouverneur d'alors, qui n'avait pas le goût des autographes, - surtout dans un tel format, - fit étendre, après le départ du poëte, une couche de badigeon sur les quatre feuillets de son cachot.

    Hoffmann barbouillait, de ses croquis emportés et de ses épigrammes au fusin, les tavernes de Berlin et de Dresde.

    C'est un mot sur un mur : ÀNÀGKH qui a fourni à Victor Hugo son curieux roman dans le genre de Walter-Scott : Notre-Dame de Paris.

    Dans les casernes, dans les tribunaux, dans les salles de spectacle, tout le monde écrit sur les murs. Voici la chanson d'un soldat, copiée sur les murs d'un corps de garde.

    L'autre soir, je m'attardai trop
    A tes côtés, belle Collette !
    En vain, pour arriver plus tôt,
    En te quittant j'ai pris le trot.
    L'adjudant, qui toujours me guette,
    M'a mis la main sur le garrot.

    Il voudrait te faire la cour,
    Et je m'aperçois qu'il enrage
    De nous voir aller chaque jour
    Vider un litre à Beau-Séjour.
    Il bisquera bien davantage
    Si tu me gardes ton amour.

    L'écolier écrit sur les murs de la cour de récréation, et en autres lieux : - Vivent les vacances ! et A bas les pions !

    Il y a une vingtaine d'années, tout Paris était couvert du nom de Crédeville ; on ne pouvait faire deux pas sans que ce nom ne vous jaillît aux yeux. Les crédevillistes étaient alors partagés en deux camps : ceux qui écrivaient Crédeville tout court, et ceux qui écrivaient Crédeville, voleur. Mais ces derniers étaient des grossiers et des ignorants, qui ne possédaient pas la tradition Crédeville (on l'a su plus tard) était un officier de l'armée de la Loire qui, après la péripétie du grand drame de 1815, se réfugia, avec le général Gilly, dans les Cévennes, où, selon toutes les apparences, il aura trouvé la mort en combattant les royalistes.

    La personne qui traça pour la première fois le nom de Crédeville sur les murs de Paris, ce fut une pauvre marchande de prunes, une aliénée, dont le visage gardait cependant encore des traces de distinction. Suivie et interrogée, on sut qu'avant la chute de l'Empereur, elle avait été fiancée à Crédeville, et que des revers de fortune, joints à l'ignorance où elle était du sort de son amant, avaient déterminé un ébranlement complet de toutes ses facultés. C'était le désir de retrouver Crédeville qui lui faisait écrire ce nom sur toutes les murailles. Le théâtre du Palais-Royal représenta en 1832 un vaudeville intitulé : Crédeville.

    L'époque de Crédeville est aussi celle de la poire et du nez de Bouginier

    On sait que la poire était la caricature de Louis-Philippe. Quant au nez de Bouginier, il est toujours resté pour moi un mythe inconnu.

    Crédeville, la poire et le nez de Bouginie sont reproduits sur la plus haute des pyramides d'Egypte.

    Ils ont été remplacés en ces derniers temps par Bonino, crétin ; lequel Bobino était, ou est, je crois, un élève de l'atelier de M. Picot.

    Aujourd'hui, - ce qu'on écrit sur les murs, c'est : Durançon a le sac. Avoir le sac, c'est, comme on le devine, avoir de l'argent. Cette inscription se multiplie de jour en jour, et expose aux plus grands dangers M. Durançon.


  • HENRI CALET


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    Henri Calet (1904 – 1956) pratiquait l’évocation à contresens. Son œuvre regarde la vie qui s’enfuit. « La vie, un petit mot d’une syllabe, presque un soupir », note-t-il dans Le Tout sur le tout, le livre par lequel je l’ai découvert. C’était à Montpellier, l’été 1980. Une commotion. Dès lors, je devais tout lire. Sans doute est-il avec André Hardellet, Joseph Delteil, Luc Dietrich et François Augiéras, l’auteur que j’ai le plus relu. Selon les circonstances de mon existence brinquebalée (souvent bancale), j’ai soigné mes déceptions et mes tristesses au contact de ses mots lucides. Par exemple, Monsieur Paul me fut bien utile, lorsque ma fille âgée d’un an me fut soustraite. Sa mère s’en étant allée avec jouets et bagages, je fus seul,  longtemps, attaché à mes livres comme le naufragé à sa planche. Le récit de rupture que raconte Calet m’aida à supporter l’arrachement. Monsieur Paul cautérisa et m’encouragea à lutter. Je ne voulais pas connaître le sort de ce père que l’époque (très probablement) oblige à baisser les bras. C’est bien paradoxal mais la déréliction de Calet agit sur moi comme un tube de vitamines. Elle me fortifie. Sans quoi, ses expéditions à rebours, voyages presque toujours mélancoliques, laissent peu d’espoir au lecteur qui viendrait y chercher le frais. Et puis, il y a Paris dont il est l’un des porte-voix. Un étendard presque aussi vaste que Léon-Paul Fargue. La plupart de ses récits sont des hymnes à Pantruche. « Je connais cette ville à fond ; je pourrais la démonter pierre à pierre et la rebâtir ailleurs. C’est ce que j’ai fait lorsque j’ai dû m’éloigner d’elle. » Je peux dire que j’applique cette méthode à la lettre. Depuis que j’ai quitté Paris, en 1999, pour mes chemins creux de Bretagne, je m’y promène chaque jour, explorant ce fond de poche que mon père m’a cousu lorsque j’étais enfant. Avec lui, j’ai visité toutes ses rues et embrassé toutes ses façades.

    « Par précaution, j’emportais toujours avec moi Paris dans une bouteille, pour ma soif. » Henri Calet devait souvent ouvrir ce flacon lorsqu’il s’embarqua vers la rive Amérique. Il y eut dans sa vie, une mystérieuse béance, un drôle d’écart qui le conduisit à Montevideo et dans cette petite bourgade-frontière du Brésil et de l’Uruguay, à Jaguaraõ. Il évoque ce déplacement, loin de Paris, dans Un grand voyage. L’homme de la rue (grand admirateur du Lion de Belfort) devenant uruguayen et entrepreneur, cela ressemble à une double vie ou une suspecte éclipse.

    medium_Numeriser0006.2.jpgDans Montevideo, Henri Calet et moi, Christophe Fourvel se penche sur ce passé pour le moins mystérieux. Mieux, il arpente des rues, côtoie des personnages. Bref, il enquête dans l’hémisphère sud. Son livre, imagé par des photographies couleur de Lin Delpierre, ne compose pas vraiment un récit d’investigation. C’est tout d’abord un beau texte, finement écrit, dépourvu de toute espèce d’effets ou de grandiloquence. Sec un peu mais humain, à la manière de l’observé. Ce qu’il nous dit est intéressant. Il dévoile une amitié effusive, singulière, durable. Et l’on découvre à la fin de ce grand ouvrage (bien que mince, sans couenne excessive) les lettres adressées de Paris et de Vence à Luis Eduardo Pombo, frère (ou autre chose) d’Amérique. On lit la dernière lettre rédigée à celui qu’il embrasse, les derniers mots affranchis par la Poste, ultime bouteille à la mer lancée deux jours avant le voyage sans billet de retour. « La vie, en définitive, c’est vite fait et c’est bientôt dit ». Guy Darol

     

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    Montevideo, Henri Calet et moi

    Christophe Fourvel

    La Dragonne, 75 pages, 15 €

    3, rue Chanzy

    54 000 Nancy

    Diffusion Les Belles Lettres

    www.bldd.fr

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    Bibliographie

    La Belle Lurette, Gallimard, 1935 ; collection L’Imaginaire, 1979.
    Le Mérinos, Gallimard, 1937 ; Le Dilettante, 1996.
    Fièvre des Polders, Gallimard, 1939 ; Le Passeur, 1997.
    Les murs de Fresnes, éditions des Quatre Vents, 1945 ; Viviane Hamy, 1993.
    Le Bouquet, Gallimard, 1945 ; collection Folio, 1983 ; Collection L’Imaginaire, 2001.
    America, éditions de Minuit, 1947.
    Trente à quarante, éditions de Minuit, 1947 ; Mercure de France, 1964 et 1991.
    Rêver à la Suisse, éditions de Flore, 1948 ; Pierre Horay, 1984.
    Le Tout sur le tout, Gallimard, 1948 ; collection L’Imaginaire, 1980.
    Monsieur Paul, Gallimard, 1950 ; collection L’Imaginaire, 1996.
    L’Italie à la paresseuse, Gallimard, 1950 ; Le Dilettante, 1990 (épuisé).
    Les grandes largeurs, Gallimard, 1951 ; collection L’Imaginaire, 1984.
    Un grand voyage, Gallimard, 1952 ; Le Dilettante, 1994.
    Les Deux bouts, collection L’Air du Temps, Gallimard, 1954.
    Le Croquant indiscret, Grasset, 1956 ; collection Les Cahiers Rouges, 1992.
    Contre l’oubli, Grasset, 1956 ; collection Les Cahiers Rouges, 1992.
    Peau d’ours, Gallimard, 1958 ; collection L’Imaginaire, 1985.
    Acteur et témoin, Mercure de France, 1959.
    Lettres, 1935-1956, correspondance avec Georges Henein, Grandes Largeurs, n° 2-3, 1981.
    Cinq sorties de Paris, Le Tout sur le Tout, 1989.
    Une stèle pour la céramique, Les Autodidactes, 1996.
    De ma lucarne, collection Les inédits de Doucet, Gallimard, 2000.

    Jeunesses, Le Dilettante, 2003.

    Correspondance Henri Calet – Raymond Guérin, Le Dilettante, 2005

    Sur Henri Calet

    Revue Europe (n°883-884, novembre-décembre 2002).

    Le Matricule des Anges (n°65, juillet-août 2005).

    On lira avec profit

    31, allées Damour, Raymond Guérin 1905-1955, Jean-Paul Kauffmann. Berg International/La Table Ronde, 2004.

  • CLEMENT PANSAERS

     

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    Alors qu’il demeure, à Berlin,  chez l’écrivain Carl Einstein, Clément Pansaers (1885 – 1922) rejoint le mouvement Dada. Il conçoit pour Ça ira !, la revue de Paul Neuhuys, un numéro philippique intitulé : Dada, sa naissance, sa vie, sa mort et édité à Anvers en novembre 1921.

    D’un duel oratoire avec André Breton, Pansaers fait un mot en forme de boulette puante. Il le qualifie de pape « gonflé au pourpre violet de l’excommunication ».

    Dadaïste belge aussi misérablement connu que Walter Serner, Pansaers est cependant l’auteur de coups de feu tels que Le Pan-Pan au cul du nu nègre et Bar Nicanor, écrits en un style qui méprise les manières univoques, la lisibilité gnangnan, la pulsation papa-maman.

    Il cherchera, en vain, un acquiescement à ses polyfolies auprès des dadaïstes parisiens mais se moque bien vite de leurs « petites choses amusantes » sans radicalité flamme.

    Le moins propagandé des dadaïstes est le plus libertaire des poètes belges.

    Dans L’Apologie de la paresse, il invite en mélopées, à s’étendre sur une grève ensoleillée. Car c’est ainsi vraiment que se pratique la grève !

    Il dit :

    « … Tout ce qui vit cagnarde

    L’homme seul reste forçat.

    Entends-tu la joie diaphane

    des grands libertaires ? ».

    Passé inaperçu de son vivant, il connaîtra durant sa mort l’insistant appui de Louis Aragon qui l’évoquera dans Projet d’histoire littéraire contemporaine puis Je n’ai jamais appris à écrire ou les incipit.

    Ainsi les éditions Champ Libre publieront ses œuvres complètes en 1986.

    Aujourd’hui, les éditions Allia pointent les fumigènes sur cette littérature enragée.

    À (re)découvrir toutes affaires cessantes si l’on veut employer l’été utilement en broutant « des bruits bruts ».

    Lire mêmement Archives Dada/Chronique, Marc Dachy. Éditions Hazan, octobre 2005. Guy Darol


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    Aux Editions Allia

    16, rue Charlemagne

    75004 Paris


    Clément Pansaers, Bar Nicanor. 45 pages, 6, 10 €

    Clément Pansaers, Le Pan-Pan au cul du nu nègre. 47 pages, 6, 10 €

    Clément Pansaers, L'Apologie de la paresse. 61 pages, 6, 10 €

    www.editionsallia.com

     

  • VILLIERS DE L'ISLE-ADAM ❘ LA CONNAISSANCE CACHEE


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    Comme Gérard de Nerval, ce rêveur de l’impossible, comme Charles Nodier accédant au monde des réminiscences par des voies qui bravent la logique, Villiers de l’Isle-Adam (1838-1889) doutait que la réalité fut une écume offerte au regard. Pour lui, « les réalistes sont les éternels provinciaux de l’Esprit humain ; ils ont raison comme le fossoyeur a raison ». Le grand Remy de Gourmont le proclama « Évangéliste du rêve et de l’ironie », sauf qu’il ne fut le prédicateur d’aucun dogme. Résolu, presque acharné, à penser la réalité sur un autre plan, il a conçu une œuvre que ses éditeurs regimbaient à publier, œuvre pour un futur qui ne semble pas s’être éveillé.
    Passés aux flammes de l’occultisme, enluminés aux ors d’un christianisme ésotérique, rattachés à la tradition hermétiste comme le boulet aux pieds du bagnard, force est de dire que les écrits de Villiers n’ont pas atteint le lecteur dans l’évidence qu’ils appelaient. Il fut désigné par ses contemporains comme un génie dont les conversations portaient à l’éblouissement. Mais il ne fut pas compris et il mourut dans le plus complet dénuement, tué par la misère et finalement aimé d’une pauvre servante, sa Dévouée, à qui il demande au moment de mourir : « Tiens-moi bien que je m’en aille doucement. »
    Villiers dédicace L’Éve Future « aux rêveurs, aux railleurs » et fait dire au héros d’Axël : « Le Destin me force à vivre de rêves. »
    Toute la puissance de sa pensée complexe et prodigieuse se trouve concentrée dans Isis, son premier roman publié en 1862. Là est tracée, en pointillés, la perspective d’un monde où l’infini est mis en rapport avec l’homme.
    En 1788, à Florence, un jeune aristocrate de vingt ans, le comte de Strally-d’Anthas est présenté, lors d’une soirée mondaine, au prince Forsiani, ambassadeur de Toscane en Sicile, décrit comme un vieux courtisan, fin et froid. Riche d’une expérience qui l’a mené à déceler tous les rouages de la bassesse, le prince indique au comte, au cours d’une longue discussion, le chemin qui conduit à la maturité. Initiation donc mais à une réalité rendue plus vaste et où l’amour joue le rôle d’intermédiaire et de catalyseur. Car ce qui est montré au moyen d’aphorismes (« Les obstacles sont aussi nécessaires que le pain », « Le manque d’humilité et d’espérance a donné pour résultat l’ennui égoïste et dévorant. ») est l’amour élevé à ce haut degré de la beauté qui exige simplicité et compréhension. L’amour que le prince dessine en traits de pensée fulgurants, prend alors le nom d’une femme, la marquise Tullia Fabriana. Celle qui fait vivre.
    Or, à l’instant de la rencontre physique avec la créature, à la seconde où il perçoit sa voix, le jeune comte à cette sensation d’effroi que le timbre ne lui est pas inconnu, qu’il lui vient d’un impalpable passé. Ce qui lui parvient de Tullia Fabriana est l’esprit d’une femme arrivée après plusieurs siècles à la quintessence de son identité. Car elle est moins corps que pensée et surtout son image ravit ceux qui ne voient pas encore. Moins créature que création, support au déploiement de l’image, à une expansion intérieure vers le principe d’immortalité, Tullia permet au comte de voyager au-delà du réel, d’entrevoir l’impossible, d’aller plus loin qu’il n’aurait jamais pu se rendre.

    Isis, déesse égyptienne, n’est-elle pas l’autre nom de la connaissance cachée, celle vers quoi tendait Villiers pour atteindre peut être ce Réel absolu sollicité par Novalis. Guy Darol


    Isis

    Villiers de l'Isle-Adam

    Préface de Bernard Noël

    Editions Ubacs, 175 pages

    ou

    Editions Ombres

    "Petite Bibliothèque Ombres", 183 pages

     

    Oeuvres de Villiers de L'Isle-Adam

    1858

    Juillet. DEUX ESSAIS DE POÉSIE. Paris, imprimerie de L. Tinterlin et Cie. 3, rue Neuve-des-Bons-Enfants. In-8° de 15 pages y compris le titre; et 1 page blanche (sans couverture). Signé, page 15 : Comte A. Villiers de L'Isle-Adam. Contient Ballade et Zaïra. Édition originale.

    1859
    Décembre, PREMIÈRES POÉSIES.1856-1858. Fantaisies nocturnes. Hermosa. Les Préludes. Chants du Calvaire. Pt. in-8°, couv. impr. de 180 p. y compris le faux-titre; 1 f. n. ch. portant : Droits de traduction et de reproduction réservés; et 1 f. n. ch. (marque de l'imprimeir). Lyon , Librairie Scheuring et Cie. 9, rue Boissac (Lyon, Imprimerie Louis Perrin). Édition originale. (Deux ou trois exemplaires entièrement imprimés sur le papier quadrillé or ayant servi à la couverture - Clouzot P. 162)

    1861
    15 lévrier.Lasciate ogni speranza (2) « La Revue Fantaisiste » (Directeur : Catulle Mendès, 15 février - décembre 1861). Premières Poésies.

    1862
    L'Espérance ; Saint-Brieuc.
    Août (30).
    ISIS, 1ère. partie (Les autres parties n'ont pas été publiées. Le manuscrit du tome II a été perdu). Paris, Librairie Dentu (Imprimerie Poupart-Davyl et Cie). In-8, couv. imprimée. 2 ff. (faux-titre et titre, avec une épigraphe latine); 1 f. (A Monsieur Hyacinthe du Pontavice de Heussey); 1 f. (Prolègomênes); 226 pp.; et 1 f. n. ch. (table). Édition originale.

    1863
    1er décembre. Philoméla, livre lyrique par Catulle Mendès « Revue Nouvelle » (mensuelle. Albert Collignon, décembre 1863 - juin 1865).

    1865
    Janvier (14). ELEN, drame en trois actes, en prose. Paris, Imprimerie Poupart-Davyl et Cie. In-8, à 2 colonnes, de 24 pp. y compris le titre, avec une épigraphe empruntée à Th. Gautier; couverture muette. Édition originale.

    1866
    - 3 mars. Hélène - A une enfant taciturne, (Contes cruels : Conte d'amour) «LeParnasse Contemporain» (1ère série, 3 mars 1866, 1 vol. in-8°. Lemerre.).
    -
    Esquisse à la manière de Goya (non reproduit). Mars (24).
    - mars. MORGANE, drame en cinq actes en prose. Saint-Brieuc, imprimerie-librairie Guyon Francisque 1866. In-8°, couv. impr. : 1 f. blanc, 1 f. (faux-titre); 1 f. (titre avec une épigraphe latine signée P. H.); 1 f. (avertissement et "Personnages"): et 151 pp. Édition originale, t irée à petit nombre et non mise dans le commerce.
    - ELEN. Deuxième édtion. Saint-Brieuc, imprimerie-librairie Guyon Francisque 1866. Grd. in-8 de : 1 f. (titre avec une épigraphe empruntée à Th. Gautier); 3 ff. n. ch. (Elen); 1 f. (dédicace à Théophile Gautier); 1 f. (second faux-titre); et 75 pp.

    1867
    - 13 octobre. Histoires moroses : I. Claire Lenoir (Tribul at Bonhomet) « Revue des Lettres et des Arts » (Villiers de l'Isle-Adam rédacteur en chef, 13 octobre1867 - 29 mars1868.).
    - 8 décembre.
    Hamlet (Chez les Passants) « Revue des Lettres et des Arts ».
    -
    Histoires moroses : II. L'Intersigne (Contes cruels) « Revue des Lettres et des Arts ».

    1868
    - 12 janvier. Histoires moroses : II. L'Intersigne (fin) (Contes cruels) « La Revue des Lettres et des Arts ».
    - 19 janvier.
    Les Présents (Contes cruels : Conte d'amour) « La Revue des Lettres et des Arts »
    - 2 février.
    Paul Forestier (Contes cruels : Conte d'amour « La Revue des Lettres et des Arts ».
    - 9-23 février.
    Elen (Contes cruels : Conte d'amour) « La Revue des Lettres et des Arts ».
    - 15 mars.
    A Elen (Contes cruels : Conte d'amour) « La Revue des Lettres et des Arts ».
    - 1er avril. Derniers soucis : Elen (2). A Elen (2) « L'Artiste » (le1er et le 15. Arsène Houssaye, 32e année. Nouvelle période, janvier 1868).
    -
    A une grande forêt. - A une enfant taciturne (2). - Les Présents (2) « L'Artiste».

    1869
    26 juin. Azraël (Contes cruels : L'Annonciateur) « La Liberté ».

    1870

    - 7 mai. Sigefroid « Le Diable » ( Le Diable, hebdomadaire, in-folio, 19 février-6 août J870 (cesse de paraître à lasuite de la déclaration de guerre). Principaux coll.: Banville, Goncourt, Dumas fils, Mendès, Zola, etc. Com. Marcel Longuet ).
    - Juillet (16).
    LA RÉVOLTE, drame en un acte en prose. Paris, Librairie Alph. Lemerre ( Impr. J. Claye). In-18 de : 58 pp. y compris le faux-titre et le titre. Édition originale dont il a été tiré qq. ex. sur papier de Chine (5 ?).

    1871
    A une grande forêt (2) « Le Parnasse Contemporain » (2e série,1869-1871).

    1872
    - 12 octobre. Axël « La Renaissance ».
    - 9 décembre.
    Axël (suite) « La Renaissance »
    - 14 décembre.
    Axël (suite) « La Renaissance ». La Renaissance, littéraire et artistique. Dir. : Emile Blémond et Jean Aicard. Principaux collaborateurs : Banville, Champleury, Cladel, Cros, Dierx, Daudet, Glatigny, Goncourt, Heredia, Leconte de Lisle, Mallarmé, J. Michelet, Monselet, Pelletan, Xavier de Ricard, Rimbaud, Verlaine, Zola, etc... in-4, 1872-1874 - 1872, 42, rue Jacob - 1874, Librairie de l'Eau-forte. 63, rue Lafayette. (Com. M. Longuet ).

    1873
    - 30 novembre, La découverte de M. Grave (Contes cruels : L'Afichage céleste) « La Renaissance ».

    1874
    - 1er janvier. Le Convive inconnu (Contes cruels : Le Convive des dernières fêtes) « Revue du Monde nouveau ».
    - 1er février.
    Le Candidat (de Flaubert) (Chez les Passants) « Revue du Monde nouveau » (Revue du Monde nouveau, mensuelle. Ch. Gros, réd. en chef, H. Mercier, dir. Ier janvier - 1er mai 1874).
    - 12 mars.
    Virginie et Paul (Contes cruels : « La Semaine Parisienne » (gazette artistique, littéraire et mondaine, in-4., tous les jeudis, 54, rue Taitbout. Réd. en chef : Jules de Clerville. Secrétaire de la rédaction : F. de Gantès, 5 mars- 6 juillet 1874. Com. Marcel Longuet).
    - 22 mars.
    La machine à gloire ( Contes cruels « La Renaissance ».
    - 26 mars.
    Contes cruels : Les demoiselles de Bienfilâtre (Contes cruels) « La Semaine Parisienne ».
    - 29 mars.
    La machine à gloire (fin) (Contes cruels) « La Renaissance ».
    - 23 avril.
    La tentation de saint Antoine, par Gustave Flaubert (Chez les Passants) « La semaine Parisienne ».
    - 7 mai.
    Histoires mystérieuses : Véra (Contes cruels) « La semaine Parisienne ».
    - 21 mai.
    L'Appareil du Dr Abeille E. E. pour l'analyse chimique du dernier soupir (Contes cruels : L'Appareil pour l'analyse chimique du dernier soupir « La Semaine Parisienne ».
    -
    Contes cruels. III. Le plus beau dîner du monde (Contes cruels) « La Semaine Parisienne ».
    - 18 juin.
    Intermèdes. I. Le médaillon (Contes cruels : Antonie) « La Semaine Parisienne».

    1876
    - 20 janvier. Sentimentalisme (Contes cruels) « La République des Lettres » (hebdomadaire. Dir. Catulle Mendès. Secrétaire de la rédaction : H. Laujol, 20 déc. 1875-3 juin 1877).
    - 27 janvier. Les demoiselles de Bienfilâtre (2) « Le Spectateur » (Le Spectateur, tous les jeudis. Revue théâtrale, littéraire et artistique. Réd. en chef : Jules de Clerville. Secr. de la réd. : Louis de Gramont).
    - 10 février.
    A s'y méprendre (Contes cruels) « Le Spectateur ».
    - 20 avril. Virginie et Paul (2) « La République des Lettres ».
    - 1er mai.
    Contes cruels : L'Inconnue ( Contes cruels) « Le Spectateur » (Revue franco-russe, politique, littéraire, artistique et financière. Directeur : Godefroy d'Herpent. Rèd. en chef : J. de Clerville. Paris. 1, rue Lepelletier. St-Pétersbourg, Muller. Librairie Cour Impériale. Com. M. Longuet).
    - 6 août. Véra (2) « La République des Lettres ».
    - 20 août.
    A propos des fêtes de Bayreuth (Histoires insolites : La Légende moderne) « Paris à l'Eau-forte » (hebdomadaice, in-8°. Publiée pac Richard Lesclide et Régamey, 1872-1877, 103, rue Montmartre.).
    - 30 décembre. La découverte de M. Grave (2) « Le Spectateur ».

    1877
    - 18 février. Le traitement du Dr. Chavassus (Contes cruels : Le traitement du Dr. Tristan) « La République des Lettres ».
    - 3 juin.
    Succès d'estime (Contes cruels : Sombre récit conteur plus sombre) « La République des Lettres ».
    - 1 er juillet.
    Ave, Mater victa; Le Parnasse.
    - 15 décembre.
    A. Sara (Contes cruels : Rencontre (Conte d'amour) « Le Parnasse».

    1878
    - 15 mars, A Hélène (2) « Le Parnasse ».
    - 15 juin.
    Souvenirs occultes (Contes cruels) « Le Parnasse ».
    - 5 août.
    Éloge de Chateaubriand « La Pomme » (indiqué par M. Le Noir de Tournemine. ).
    AZRAEL (2); Richard Lesclide.

    1879
    - 9 févcier. Souvenirs occultes (2) « Le Moli ère ».
    - 19 avril. Azraël (3) « La Croix et l'Épée » ((indiquée par R. du Pontavice, la date a été précisée par R. de Gourmont : Bibliographie des petites revues). La Croix et l'Épée, hebdomadaire, paraissant le samedi.Villiers de l'Isle-Adam, rédacteur, 19 avril - 17 mai 1879.).
    - 3 mai.
    Impatience de la foule (Contes cruels) « La Croix et l'Épée ».

    1880
    - 29 février. Les Demoiselles de Bienfilâtre (3) « La Vie Populaire » (édition hebdomadaire du Petit Parisien, in-4°. 18, rue d'Enghien).
    - Octobre. Véra (2) « Beaumarchais » (journal satirique, littéraire et financir, hebdomadaire. Directeur : Louis Jeannin, 9 octobre 1880-1883).
    - 30 octobre. (Conte d'amour : Contes cruels). Il comprend six parties qui avaient toutes déjà paru, plusieurs sous un titre différent. - I. Éblouissement (l'Artiste) (2). II. Aveu (A une enfant taciturne) (3). - III. Les Présents (2). - IV. Réveil (A Elen) (3). - V. Adieu. - VI. Rencontre (A Sara : le Parnasse ) « La Comédie française » ( in-folio, hebdomadaire).
    - 20 novembre. A une femme (Elen (3) « La Comédie française ».
    - 21 novembre. Histoire d'amour du vieux temps (Contes cruels : La reine Ysabeau) « Beaumarchais ».
    - 5 décembre. Une vengeance de reine (2) (Contes cruels : La reine Ysabeau) « La Vie populaire ».
    - 26 décembre. Virginie cet Paul (3) « La Vie populaire ».
    - LE NOUVEAU MONDE. Drame en cinq actes, en prose, couronné a concours institué en l'honneur de Centenaire de la proclamation de l'indépendance des États-Unis. Paris, Richard et Cie. In-8, couv. impr., XIV pp. ( pp. blanches, faux-titre, titre, avant-propos, avis au lecteur et "Personnages"); 1 f. (errata); 190 pp.; et 1 f. blanc. Édition originale dont il a été tiré qq. exemplaires sur papier de Hollande.

    1881
    24 décembre. - Vox populi (Contes cruels) « La Comédie humaine » (hebdomadaire, in-folio, 43, rue Richer. Dir. F. de Gantès, nos 1, 14, XII.).

    1882
    - 18 fébrier. - LA MAISON GAMBADE PÈRE ET FILS, SUCC. Plaq. petit in-12. (Chez les Passants : Le Socle de la Statue); Edité par la Comédie humaine.
    - Octobre.
    Axël (IIIe partie, scène XII); La Vie Artistique (Emile Delarue. Partie artistique : Henry Boutet, in-4).

    1883
    - 9 février. CONTES CRUELS - Paris, Calmann-Lévy. (Impr. P. Mouillot). In-18, couv. impr. : 2 ff. (faux-titre et titre), et 352 pp. Édition originale. Clouzot P. 163 signale qu'il existe une seconde couverture avec le mot "Contes" imprimé en plus petits caractères que le mot "cruels". Ce volume contenait les inédits suivants : Deux Augures. Duke of Portland. Le Secret de l'ancienne musique. Le désir d'être un homme. Fleurs de ténèbres. Les Brigands. Maryelle.
    - 19 avril.
    Louis Veuillot, bénédictin (Histoires insolites : Une entrevue à Solesmes) « Le Figaro ».
    - 12 mai.
    Le tsar et les grands ducs (L'Amour suprême) « Le Figaro ».
    - 9 juin.
    Gog « Le Chat noir » (hebdomadaire, in-folio. 82, boulevard Rochechouart, 1882).
    - 19 juillet.
    L'Avertissement (Chez les Passants) « Le Figaro ».
    - 29 septembre. Vox populi (3), signé : un Passant; « Le Figaro ».
    - 23 octobre.
    Le Secret de l'Échafaud (L'Amour suprême) « Le Figaro».

    1884
    - 1er mars. L'Aventure de Tsé-i-la (L'Amour suprême) « Le Figaro ».
    - 12 avril.
    La mort d'un héros « Le Figaro ».
    - 10 mai.
    Les expériences du Dr. Crookes ( L'Amour suprême) « Le Figaro ».
    - 16 juillet.
    Le Droit du Passé (L'Amour suprême) « Le Figaro ».
    - 10 août.
    Le meilleur amour (L'Amour suprême) « Le Figaro ».

    1885
    - 18 février. Le réalisme dans la peine de mort (Chez les Passants) « Le Figaro».
    - 25 avril.
    Idylle moderne (Histoires insolites : La Maison du Bonheur) « La Revue Contemporaine » (série I. Dir. : Adrien Remacle. Réd. en chef : Edouard Rod, 1 er janvier 1883 - 1er août 1886).
    - 8 mai. La Légende de Bayreuth (2) (Histoires insolites : La Légende moderne) « La Revue Wagnérienne ».
    - 19 mai.
    Une profession nouvelle (L'Amour suprême) « Le Succès » (Le Succès, Emmanuel Arène, 1 er février 1885 - 1 er déc. 1886.).
    - 28 mai.
    L'Instant de Dieu (L'Amour suprême) « Le Succès ».
    - 1 er juillet. Akédysséril (2) (L'Amour suprême) « La Revue Contemporaine ».
    - 18 juillet.
    L'Ève future, I « La Vie moderne » (hebdomadaire, illustrée; le samedi. Charpentier, 1879-1886).
    - l er septembre.
    Le Sadisme anglais (Histoires insolites) « Le Succès ».
    - 14 octobre.
    Trente têtes sur les planches « Le Succès ».
    - 1 er novembre. Axël « La Jeune France » (Paul Demeny, 1 er mai 1878-1887, in-8, 55, Rue de Châteaudun, le 1 er de chaque mois. ).
    - 11 novembre.
    Augusta Holmès (Chez les Passants) « Le Succès ».
    - L'Aventure de Tsé-i-la (2) « Contes de Figaro » (1 vol. in-8 ; illustrations de Myrbach. Ed. Monnier, 16, rue des Vosges, 1885).

    1886
    - 1 er janvier. Axël « La Jeune France ».
    - 30 janvier.
    L'Ève future « La Vie moderne ».
    - l er février. Axël, poème dramatique, 3e partie « La Jeune France ».
    - 24 mars. Axël, poème dramatique, 4e partie « La Jeune France ».
    - 24 mars.
    L'Ève future (fin) « La Vie moderne ».
    - 25 mars.
    L'Évasion « La Revue Contemporaine ».
    - 1 er avril. Axël, poème dramatique, 5e partie « La Jeune France ».
    - 4 avril. Souvenirs occultes (2) « La vogue » (Rédacteur en chef : G. Kahn. Secrét. de la réd. Ad. Retté, 1886).
    - 4 mai.
    L'ÈVE FUTURE. Paris, Librairie de Brunoff (Imp. Rougier et Cie). In-18 de IX-379 p. Couverture par Gorguet. (Qq. exemplaires sur papier de Hollande - Clouzot P. 163).
    - 13 mai. L'Auxiliatrice (Extr. de l'Ève future) « La Vogue ».
    - 15 mai.
    Poèmes pour assassiner le temps : Premier dizain « Chat noir ».
    - 1 er juin.
    Axël, poème dramatique, 5e partie « La Jeune France ».
    - 26 juin.
    Le Tueur de Cygnes (Tribulat Bonhomet) « Chat noir ».
    - Juillet (24).
    L'AMOUR SUPRÊME. Paris, Librairie Maurice de Brunoff. (lmp. Majesté à Châteauroux). In-18 jésus, 375 p. avec vignettes. (Qq. exemplaires sur papier de Hollande - Clouzot P. 163). Ce volume contenait les inédits suivants : L'Amour suprême. Sagacité d'Aspasie. Une profession nouvelle. L'agence du Chandelier d'or. La légende de l'Éléphant blanc. Catalîna.
    - 1er août. La Légende de l'Éléphant blanc (2), illustrations de Carbouin gravées par Laly « La Revue illustrée ».
    - 12 août. Souvenirs occultes (3) « La Vie populaire ».
    - 14 novembre.
    Un singulier Chelem (Histoires insolites) « Gil Blas ».
    - 29 novembre.
    Le jeu des grâces (Histoires insolites) « Gil Blas ».
    - 1er décembre.
    L'Etna chez soi (Histoires insolites) « La Revue indépendante » (série I, Félix Fenéon. Mensuelle, in-18; mai 1884-mai 1885. Série II, mai 1885-nov. 1886, Dujardin. Série III. nov.1886-1888, Fenéon. En 1868, une série paraissait avec G. Véran pour directeur. Le titre est beaucoup plus ancien).
    - 26 décembre.
    Les Phantasmes de M. Redoux (Histoires insolites) « Gil Blas ».
    - AKËDYSSÉRIL. Paris, M. de Brunoff (Impr. Rougier et Cie). Grd. in-8, couv. impr. : 1 f. blanc; 1 f. (faux-titre; au verso justification du tirage); 1 f. (titre rouge et noir, avec une épigraphe empruntée à des Livres Hindous); 1 f. (A onsieur le marquis de Salisbury); 67 pp.; 2 ff. n. ch. (vignettes, tirées en rouge); 1 f. n. ch. (achevé d'imprimer); et 1 f. blanc.
    Portait de Villiers de L'Isle-Adam, avec fac-similé d'autographe et 1 planche de Félicien Rops en triple épreuve (bleu, sanguine et bistre), hors texte.
    Première édition illustrée. Tiré à 250 ex. numérotés sur papier de Japon. Il a été tiré, en outre, d'après une annonce de l'éditeur, dans le feuilleton de la Bibliographie de la France du 3 juillet 1886, un ex. unique sur "papier peau d'âne", de format in-folio contenant : 1° l'original de la Volupté de Félicien Rops; 2° la triple suite de cette taille-douce, en bistre, sanguine et bleu; 3° le portrait de l'auteur avec fac-similé ; 4° un autographe authentique de l'auteur; 5° les originaux des deux dessins de Hervié et 6° les reproductions sur Chine de ces dessins.

    1887
    -1er janvier. Un Mécène (2) (Tribulat Bonhomet : Le Tueur de Cygnes) « GirlBlas ».
    - 6 janvier. Le jeu des grâces (2) « La Vie populaire ».
    - 8 janvier.
    L'Héroïsme du Dr. Hallidonhil (Histoires insolites) « Gil Blas ».
    - 29 janvier.
    Le Secret de la belle Ardiane (Histoires insolites) « Gil Blas ».
    - 1er février.
    L'Etna chez soi (fin) (Histoires insolites) « La Revue indépendante ».
    - 3 février. Le Dr. Hallidonhil (2) « La Vie populaire ».
    - 10 février.
    Le Banquet des Éventualistes (Tribulat Bonhomet) « Gil Blas ».
    - 13 mars.
    Motion du Dr. Tribulat Bonhomet touchant l'utilisation des tremblements de terre ( Tribulat Bonhomet) « Gil Blas ».
    - mai.
    TRIBULAT BONHOMET. Paris, Tresse et Stock (Impr. Émile Colin). In-18, couv. impr. : VI pp. (faux-titre, avec une épigraphe signée N. T.; au verso justification du tirage de luxe et "Avis au lecteur"); 1 f. (second faux-titre); 285 pp.; et 1 f. blanc. Dans le vol. sont encartés deux feuillets; au recto du premier se trouvent des errata; le verso de ce feuillt est blanc ainsi que les recto et verso du second. Édition originale. Il a été tiré 10 ex. sur Hollande et 10 sur Japon, tous numérotés. Certains ont une couverture bleue; si l'on en croit un renseignement fourni par des catalogues de libraires, les ex., avec couv. bleue, seraient des ex. d'auteur et des ex. de presse. Annoncé dans le feuilleton de la Bibliographie de la France du 21 mai 1887. Ce volume contient l'inédit suivant :
    Les visions merveilleuses du Dr. Tribulat Bonhomet.
    -15 juin. Souvenir (Chez les Passants) « La Revue Wagnérienne ».
    - 21 juin.
    La Céleste aventure « Gil Blas ».
    - 21 juillet. Le Secret de la belle Ardiane (2) « La Vie populaire ».
    - 1er août.
    Ce Mahouin ! (Histoires insolites) « La Revue indépendante ».
    - 4 août. La Céleste aventure (2) « La Vie populaire ».
    - 6 août.
    L'agrément inattendu « Gil Blas ».
    - 30 août. Catalina (2) « La Vie populaire ».
    - 15 septembre. Le Secret de l'échafaud (2) « La Vie populaire ».
    - 9 octobre. Les expériences du Dr. Crookes (2) « La Vie populaire ».
    - Octobre.
    Les plagiaires de la foudre (Histoires inso1ites) « La Revue de Paris et de St-Pétersbourg ».
    - 26 octobre.
    Le cas extraordinaire de M. Francisque Sarcey (Chez les Passants) « Gil Blas ».
    - 1er novembre.
    Conte de fin d'été (Histoires insolites) « La Revue indépen dante ».
    - 27 novembre. Une profession nouvelle (2) « La Vie populaire ».
    - 12 décembre.
    Les délices d'une bonne œuvre (Histoires insolites) « La Revue indépendante ».
    - 22 décembre. Les Phantasmes de M. Redoux (2) « La Vie populaire ».
    - 31 décembre.
    L'Inquiéteur (Histoires insolites) « Gil Blas ».

    1888
    - 1er janvier. Le couronnement de M. Grévy « Librairie de la Revue indépendante » (Annoncé dans la Revue indépendante de janvier 1888 : «La librairie de la Revue indépendante s'est procuré et met en vente quelques exemplaires d'un curieux pamphlet de Villiers de l'Isle-Adam, publié au mois de décembre dernier, dans le format des journaux quotidiens et dont la vente sur la voie publique a été interrompue immédiatement. Le couronnement de M. Grévy. Prix franco, 1 fr.».).
    - Février.
    La suggestion devant la loi (Chez les Passants) « La Revue de Paris et de Saint-Pétersbourg».
    - 21 février.
    Sœur Natalia (Nouveaux Contes cruels) « Gil Blas ».
    - 27 février.
    HISTOIRES INSOLITES. Paris, Librairie Moderne, maison Quantin . In-18, couv. impr. : 2 ff. (faux-titre et tutre, avec une épigraphe empruntée à Lamennais); 314 pp.; et 1 f. n. ch. (marque de l'imprimeur). Édition originale (dont il a été tiré 10 ex. sur papier de Hollande - Clouzot P. 163). Ce volume contient les inédits suivants :
    Les Amants de Tolède. Le Navigateur sauvage. Aux Chrétiens les lions.
    -10 avril. L'Incomprise (Nouveaux Contes cruels) « Gil Blas ».
    - 29 avril. Les délices d'une bonne oeuvre (3) « La Vie populaire ».
    - 1er mai.
    Le Chant du Coq (Nouveaux Contes cruels) « La Revue libre » (Réd. en chef : Paul Demény, mai 1888. Comme suite à la Jeune France).
    - 2 juin. L'Inquiéteur (2) « La Vie populaire ».
    - 4 juin.
    L'Enjeu (Nouveaux Contes cruels) « Gil Blas ».
    - 2 août. Ce Mahouin ! (2) « La Vie populaire ».
    - 13 août.
    La torture par l'espérance (Nouveaux Contes cruels) « Gil Blas ».
    - 24 août.-
    Une soirée chez Nina de Villars (Chez les Passants) « Gil Blas ».
    - 27 août.
    L'estime laïque (Nouveaux Contes cruels : Les amies de pension) « Gil Blas ».
    - 6 septembre. Sagacité d'Aspasie (2) « La Vie populaire ».
    - 18 octobre. La véritable légende de l'Éléphant blanc (2) « La Vie populaire ».
    - 2 novembre.
    L'Amour du naturel (Nouveaux Contes cruels) « Le Figaro ».
    - 9 novembre.
    L'Élu des rêves (Propos d'Au-delà) « Gil Blas ».
    - 13 novembre.
    NOUVEAUX CONTES CRUELS. Paris, à la librairie illustrée. In-18, couv. impr. : 150 pp. y compris le faux-titre et le titre; et 1 f. n. ch. (table). Édition originale. Il a été tiré qq. ex. sur papier du Japon. Enregistré dans la Bibliographie de la France du 1er décembre 1888. Ce volume contient l'inédit suivant : Sylvabel.
    - 15 novembre. Conte de fin d'été (2) « La Vie populaire ».
    - 15 décembre.
    N.-S. Jésus-Christ sur les planches (Chez les Passants) « Gil Blas ».
    LE SECRET DE L'ÉCHAFAUD - 1 vol. in-18. Marpon et Flammarion (Reproduction du texte de l'Amour suprême).

    1889
    - 7 avril - 2 mai. Tribulat Bonhomet (2) « La Vie populaire ».
    - 18 avril.
    L'Amour sublime. (Propos d'Au-delà ) « Universal Review ».
    - 25 avril - 7 novembre. L'Ève future (2) « La Vie populaire ».
    - 10 août.
    Le Meilleur Amour. (Propos d'Au-delà) « Le Figaro ».


    Posthumes

    1890
    - 15 janvier. L'Amour sublime « La Revue d'Aujourd'hui » (mensuelle. Tola Dorian, 15 janvier 1890) .
    - 17 janvier.
    AXËL. Paris, maison Quantin. In-8, couv. impr. : 1 f. blanc au recto, portant au verso la liste des ouvrages du même auteur; 1 f. (faux-titre; au verso : justification du tirage de luxe); 1 f. (titre); 300 pp. et 2 ff. n. ch. (table et marque de l'éditeur). Édition originale. Il a été tiré 20 ex. numérotés sur papier de Hollande.
    - 8 février.
    CHEZ LES PASSANTS. (Fantaisies, pamphlets et souvenirs). Frontispice de Félicien Rops, gravé à l'eau-forte. Paris, Comptoir d'édition, estampes, livres, musique ( Impr. Destenay, St-Amand - Cher). In-18, couv. impr. : 2 ff. (faux-titre et titre; au verso, justification du tirage de luxe) et 320 pp. La p. 305, non chiffrée, contient la table des matières; les pp. 307 à 320 , des annonces de librairie. Édition originale. Il a été tiré 15 exemplaiues sur papier du Japon, numérotés 1 à 15, contenant une double suite de frontispices. Ce volume contient les inédits suivants : L'étonnant couple Moutonnet . Peintures décoratives du grand Opéra. La couronne présidentielle (distribué en placard, note Revue indépendante).
    - 1er mai.
    Préface inédite de l'Ève future « La Nouvelle Revue » (Publiée par G. Guiches).
    - 15 mai.
    Vers inédits « La Revue d'Aujourd'hui ».
    - 1er juillet.
    Variantes d'Axël « La Revue indépendante » (Publiées par R. de Gourmont).
    - 1er août.
    Fragments inédits de l'Ève future, le Vieux de la Montagne, le Tsar et les Grands Ducs « Mercure de France » (Publiés par R. de Gourmont).
    - 7 novembue.
    L'ÈVE FUTURE - 1 vol. in-18 jésus de lV-383 p. Impr. Imbert. Librairie Charpentier (Reproduction du texte de la première édition. On a omis la dédicace : Aux rêveurs, aux railleurs).

    1891
    - Janvier.
    Fragments inédits de l'Ève future « Mercure de France » (Publiés par R. de Gourmont).
    - 17 février.
    Les filles de Milton (Propos d'Au-delà) « L'Écho de Paris » (Publié par R. de Gourmont).
    - 25 mars.
    Tarentelle « Le Magazine français illustré » (mensuel. A. Lacroix, dir. litt. - Albert Daudyl, dir. administratif - 1891 - le 25 puis le10 du mois depuis mai).
    - 28 mars.
    L'ÉVASION. Drame en una acte, en prose. Paris, Tresse et Stock (Mayenne, lmpr. A. Nézan). In-18, couv. impr. : 2 ff. (faux-titre et titre); 1 f. (préface signée R.D.); 1 f. (autre faux-titre etb"Distribution") et 24 pp. Édition originale. (Reproduction du texte de la Revue Contemporaine).
    - 1er mai.
    Pages inédites : Lord Lyonel « Mercure de France » (Publiées par R. de Gourmont).
    - 10 septembre.
    Me Pied (Propos d'Au-delà) « Le Magazine français illustré ».

    1892
    - Janvier. Pages inédites « Mercure de France » (Publ. par R. de Gourmont).
    - 1er mai.
    Entre l'ancien et le nouveau (Propos d'Au-delà) « Revue de l'Évolution ».

    1893
    -Janvier. Fragment de roman (Propos d'Au-delà) « Mercure de France ».
    PREMIÈRES POËSIES - 1vol. Lacomblez, à Bruxelles. Reproduction du texte de la 1ère édition.
    - 10 mai.
    NOUVEAUX CONTES CRUELS ET PROPOS D'AU-DELA. Paris, Librairie Calmann-Lévy. (Impr. Chaix). In-18, couv. impr. : 2 ff. (faux-titre et titre); 1 f. (note de l'éditeur); 1 f. (autre faux-titre) et 280 pp. Édition en partie originale dont il a été tiré 40 ex. numérotés sur papier de Hollande.Reproduction pour les Nouveaux Contes cruels du texte de la 1 ère édition.

    1894
    - mars.
    Le Convive « Le Journal ».
    - 23 juin.
    MORGANE. Le Mans, Librairie Chamuel (Impr. Monnoyer). In-8 de 232 p. Il a ét tiré 100 ex. numérotés sur Japon. (Reproduction du texte de la l ère édition). Première édition dans le commerce.

    1896
    23 octobre. ELEN - 1vol, in-8 de 171 p et portrait : Villiers sur son lit de mort, par Franc Lamy, Librairie Chamuel, 23 octobre 1896 (Reproduction du texte de la 1 ère édition).

    1897
    Mars (13). LA RÉVOLTE - vol. in-18 jésus de 61 p. Lagny. Impr. Colin. Paris, Libr. Stock, mars 1897 (Repr. du texte de la 1 ère édition).

    1899
    - 1 er mars. HISTOIRES SOUVERAINES - vol. in-4. Deman, Bruxelles. Culs-de-lampe, ornements de Teo Van Rysselberghe.
    Choix d'œuvres comprenant : Vèra. Vox populi. Duke of Portland. Impatience de la foule. L'Intersigne. Souvenirs occultes. Akédysséril. L'Amour suprême. Le droit du passé.Le tsar et les grands-ducs.L'aventuce de Tsé-i-la. Le tueur de cygnes. La céleste aventure. Le jeu des grâces. La maison du bonheur.Les amants de Toléde. La torture par l'espérance. L'amour sublime. Les filles de Milton.

    1900
    ISIS - 1vol. in-18 jésus. M. Thone. Impr. Bruxelles. Librairie internationale. Paris et Bruxelles, 1900. (Reproduction du texte de la 1ère édition).
    AXEL - vol, in-18. Société française d'édition d'art. 9-11, rue St-Benoit. Paris, 1900. (Reprod. du texte de la 1ère édition).

    1905
    L'ANNONCIATEUR - 1 plaq. in-16. Impr. Hérissey, Évreux. Libr. Ferroud, Paris. Compositions de Louis-Ed. Fournier gravées à l'eau-forte par X. Lesueur, 350 exemplaires, dont 1 à 15 sur japon et 16 à 350 sur vélin d'Arches.

    1906
    AKÉDYSSÉRIL - 1vol. in.8. Louis Conard, Paris. Illust. de G. Rochegrosse. 50 japon ancien, 20 japon impérial, 15 japon, 150 vélin teinté.

    1909
    HISTOIRES INSOLITES et L'AMOUR SUPRÊME en un vol. sous le titre DERNIERS CONTES. Paris, Mercure de France.

    Traductions

    En anglais.
    L'Aveu, traduit par A. Symons. Days andWight,1889.
    La Révolte, trad. par Mrs Th. Barclay. Fortnigthly Review, décembre 1897.
    L'Évasion,traduite par la même.
    Ces deux pièces ont été publiées à Londres en 1901, chez Durkworth, 1 vol. in-18 jésus avec introduction.
    Les Contes cruels.
    La torture par l'Espérance, a paru en 1896 dans le Strand Magazine, avec illustrations. Le traducteur a signé l'œuvre, tout simplement !

    En allemand.
    M. Hans Eins Ewers a publié sous le titre : Grausame Geschichten, le premier volume de sa traduction des Œuvres complètes de Villiers. Ce volume contient 23 contes; tous ne font pas partie des Contes cruels.

    Source

    www.sisyphe.com


     

  • VITEZSLAV NEZVAL A PARIS


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    Après la rencontre éblouie d’André Breton en mai 1933, Vitezslav Nezval (1900 – 1958) invita Paul Éluard et André Breton à Prague, au début de l’année 1935. Ayant organisé des conférences à leur attention, ce fut l’occasion pour Breton de rédiger deux textes théoriques majeurs : Situation surréaliste de l’objet et Position politique de l’art d’aujourd’hui. La force de l’amitié ressentie par le poète tchèque est telle qu’il éprouve le désir de revoir ses compagnons d’aventure. Le rendez-vous est fixé, en juin 1935, au moment du Congrès International des Écrivains pour la Défense de la Culture qui se tient à Paris. De ce grand jour, Nezval a tiré un livre de souvenirs, Rue Gît-le-Cœur, du nom de « la petite artère noire » (André Breton, Les Vases communicants) dans laquelle se trouve le restaurant où se réunissaient Nezval, Breton, Éluard et Péret. L’indication donnée par Bernard Noël dans sa préface donne le ton : « Nezval ne vient pas à Paris en touriste (…) mais en pèlerin désireux de visiter les lieux poétiques. » Essayiste et romancier, Nezval fonda le groupe surréaliste tchèque en compagnie de Styrsky et Toyen. Il fut, avec Karel Teige, le chef de file du Poétisme. De retour à Prague, Nezval n’a revu ni Éluard ni Breton. Celui-ci n’a jamais pris connaissance de ce livre d’amitié folle. Guy Darol
    ________________

    Rue Gît-le-Cœur (Ulice Gît-le-Cœur, 1936), récit traduit du tchèque par Katia Křivánek, préface de Bernard Noël. Editions de l’Aube, « Regards croisés », 1991, 144 pages, illustrations, 9,91€.

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    ________________

    (Biskoupky, Moravie, 1900 — Prague, 1958). Après ses débuts poétiques en 1922, il rejoint le groupement d’avant-garde Devětsil, et donne des recueils se réclamant du poétisme dont il se fait le théoricien avec Karol Teige (L’Acrobate, 1927 ; Édison, 1928 ; Poèmes à la nuit, 1930 ; Le Manteau de verre, 1932). En 1934, toujours avec Karol Teige, il fonde le premier groupe surréaliste pragois et publie les recueils, La Femme au pluriel (1936), Prague aux doigts de pluie (1936) ainsi que des ouvrages de prose poétique (Moscou l’invisible, 1935 ; Rue Gît-le-cœur, 1936 ; Le Passant de Prague, 1938). En 1938, il rompt avec le surréalisme et publie des poèmes d’inspiration sociale et patriotique. Après 1945, il soutient avec enthousiasme le régime communiste dont il devient le premier poète officiel (Staline, 1949 ; La Grande horloge, 1949 ; Le Chant de la paix, 1950), tout en essayant, parfois, de résister à la vague du réalisme socialiste qui déferle sur la littérature (Les Ailes, 1952 ; Les Bleuets et les villes, 1955 ; L’Inachevée, 1960). Créateur prolifique, « poète d’une fantaisie prodigieuse et d’une sensibilité hors du commun quant à la mélodie de la langue » (Hanna Voisine-Jechova), il a publié près d’une centaine d’ouvrages de valeur inégale : recueils de poésies, romans, pièces de théâtre, livres pour enfants, écrits théoriques, études consacrées à des poètes et à des peintres, ainsi que des traductions et un volume de souvenirs (De ma vie, 1959, inachevé).

  • JEAN-PIERRE GEORGE ❘ METAPHYSIQUE DU STRIP-TEASE

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    En marge des méthodes actuelles qui recommandent de surproduire pour exister un peu, Jean-Pierre George est un écrivain du compte-gouttes. Il publie peu mais  qu’il écrit bien !
    L’illusion tragique illustrée, son premier livre, fut édité en 1965. Ce compagnon discret des Situationnistes avait été contacté par Guy Debord pour participer de l’aventure mais Jean-Pierre George lui préféra la dérive des passions qui brûlent. L’auteur de La Société du spectacle dont on ne peut nier l’humeur sélective jurait cependant que L’illusion tragique illustrée était un ouvrage majeur.
    Le Diable et la Licorne vérifie, d’une certaine manière, ce que les Situationnistes exigeaient de la vie : qu’elle soit inspirée par les chauds principes de Charles Fourier, qu’elle suive les vicinales de l’amour vrai plutôt que l’autoroute des vanités.
    C’est au cours d’une soirée chez Henri Lefebvre – marxiste éminent dont l’œuvre réflexive décrit les rapports entre langage et marchandise – que Jean-Pierre George s’éprend de L.M. (Lady Madonna), reine du strip-tease aux grandes heures du Crazy Horse Saloon. Rita Lenoir transcende le jeu de la mariée mise à nu en se vouant à ce type de théâtre que fit germer Antonin Artaud. Dès lors, elle intéresse Marcel Maréchal, Antoine Bourseiller et tous ceux qui voient en elle l’incarnation combinée des masques de Georges Bataille et de Paul Delvaux.
    Ses performances déplacent Jean-Paul Sartre, Léonor Fini , Jack Nicholson, Lucia Bose. Elle est la femme hantée par excellence, celle dont la nudité révèle les fantômes.
    Promis à une carrière d’écrivain officiel, Jean-Pierre George s’épanouit à la lumière de L.M. Plus exactement, il grandit et souffre dans son ombre. Car il est inutile de dire que Jean-Pierre George disparaît à l’instant où apparaît sa Madone. Il n’est plus rien que dévouement absolu, adoration infinie, pur amour. Cependant, l’illusion tragique se dresse entre son idole et sa passion, quelque chose comme cette abrupte vérité égale de la mort : une fin de partie.
    Jean-Pierre George s’enferme alors dans l’attente, entre des murs qu’il peint en noir. Sa vie tout à fait privée de lueur se recrée au sein même de ce livre dont la portée est supérieure à celle d’un simple témoignage. Le Diable et la Licorne, grand œuvre assurément, où résonnent les sonorités hyperdéliques de Peter Hammill (Van Der Graaf Generator), des Beatles et des Doors, fait écho à la vertigineuse poésie des damnés que furent Jean-Pierre Duprey et Stanislas Rodanski. D’ailleurs, L.M. (Rita Lenoir) n’est pas sans rappeler la Rita de La Victoire à l’ombre des ailes, l’héroïne en celluloid du roman sans comparaison de Rodanski.
    Quant à ce troisième ouvrage de Jean-Pierre George, prosateur aux paupières de jupes, il est écrit comme un cristal. A travers lui s’exprime toute cette période aventureuse (la décennie soixante) qui  hésita entre révolution et éclipse, errance et étreinte.
    Certaines de ses pages auraient pu prendre place dans l’Anthologie de l’humour noir d’André Breton, cette antithèse du mensonge que Guy Debord confia un jour à Jean-Pierre George sans se douter – mais Debord n’était-il pas voyant ? – qu’il allait être lu par un grand écrivain post-punk. Au demeurant, Le Diable et la Licorne peut être honnêtement considéré comme un ultime traité de l’amour fou. Guy Darol


    Le Diable et la Licorne, Métaphysique du strip-tease

    Jean-Pierre George.

    La Table Ronde, 16 €.

    Pascal Comelade dans ses Ecrits Monophoniques Submergés (Editions Camion Blanc, 1999) :

    "Rita Lenoir, la plus fameuse strip-teaseuse du monde, a participé à la pièce de Picasso Le Désir attrapé par la queue, représentée en 1967 à Saint-Tropez, avec un accompagnement musical de Soft Machine, en chair et en os et en personne."


  • LUCIEN SUEL TRADUCTEUR DE JACK KEROUAC NOUS FAIT QUELQUES MOUES DE VEAUX

     

     

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    L'activité de Lucien Suel est sans répit. L'infatigable est récompensé de ses peines, aussi de ses joies. Son vingt-troisième livre, Mort d'un jardinier, publié à La Table Ronde en 2008 vient de paraître en poche. C'est le numéro 5105 de la collection Folio Gallimard. Va-t-il se reposer ? Rien n'est moins sûr. Lucien Suel doit pourtant envisager l'oisiveté. Il le faut pour admirer les porcs et mirer les moues de veaux. Ecrit-il sur une ardoise bord à bord ? Ce compassionnel (vraiment compassionnel ?) de la vie animale qui remplit nos assiettes rédige pendant que cliche Patrick Roy. Les photographies de Patrick Roy sont des gros plans sur des museaux nés pour perdre. Lucien Suel nous parle des animaux comme il sait le faire du jardin, d'être à être allais-je dire. On dirait qu'il remplit des cases, comme le veau occupe l'espace à mangeoire et le porc son bâtiment d'engraissement. Le texte et l'image se coudoient. Ce n'est pas ainsi dans le monde vrai où l'homme n'est pas l'ami du loup, où le loup n'est pas copain comme cochon avec le cochon.

    Ainsi qu'il est écrit en quatrième de couverture de Têtes de porcs Moues de veaux, Lucien Suel est né en 1948 à Guarbecque dans le Pas-de-Calais où il vit aujourd'hui. Editeur, traducteur, lecteur, artiste postal et poète ordinaire, il a animé de 1989 à 1998 le magazine MouE de VeaU. Traducteur donc. Alors que paraissait Sur la route sous-titré Le rouleau original chez Gallimard (quarante mètres d'un rouleau de papier qui "déroulé sur le plancher ressemble à la route"), les éditions La Table Ronde publiaient le Livre des Esquisses, un ensemble de notes couchées sur le motif entre 1952 et 1954. Du motif, il y en a entre New York et San Francisco, entre Montréal et Paris. Motif en forme de paysages, de visages, de grandes questions. Motif orné de rencontres : Burroughs, Ginsberg. Motif à mélancolie : l'évocation de la mort de Gérard, le frère de Jack. Motif à parler littérature : Dostoïevski, Melville, Blake, Yeats, Lawrence. Motif pour s'encourager à écrire

    Alors en moi cette écriture finira

    par être le moyen d'alléger

    peu à peu le fardeau

    de mon éducation

    pour occuper mon temps

    une self-thérapie du fardeau éducatif

    personnelle & surréaliste vers la

    Paix Agraire & Fellaheen

    Motif pour dire la supériorité du peuple Fellaheen. Occasion pour nous de visiter le monde à toute berzingue en suivant la colonne des mots de gueules, de sable, d'azur et de sinople vaillamment traduits par Lucien Suel. Nous suivons Jack Kerouac alias Memory Lane jusque dans Paris où il s'étonne de croiser des "types bizarres à la WC Fields". On ralentit le pas rue des Ecoles. On se cache derrière la statue de Montaigne pour observer l'homme qui inventa le jazz et le verbe tressés.

    Assis dans un petit parc sur la place Paul-Painlevé

    - une ligne courbe de magnifiques tulipes rosées

    raides et se balançant, des gros moineaux ébouriffés, superbes

    mademoiselles aux cheveux courts (une qui ne devrait jamais passer une nuit solitaire à Paris, garçon ou fille, mais je suis

    un vieil homme mauvais & haïssant le monde qui deviendra le plus grand écrivain ayant jamais vécu)

    On referme le Livre des esquisses avec le tournis bezef bono, heureux et triste mais mieux instruit :

    ECRIS EN PETITS CARACTERES

    QUAND T'ES BOURRE

    chuchote Jack Kerouac. Il ne faut pas tromper le lecteur avec de grands mots. Ce que Kirouac (lire page 225) savait, ayant beaucoup bu (rouquemoute et cie)

    Boire c'est bon pour

    l'amour - bon pour

    la musique - que ça

    soit bon pour

    l'écriture -

    Cette ivrognerie est mon

    alternative  au suicide,

    & c'est tout ce qui reste

    Cartographies flash sur un rail de grand huit. Il fallait un poète (pas si) ordinaire (que ça) pour transposer en langue française déflagratoire le poète bop. Lucien Suel l'a fait, bien fait. Il habite Jack Kerouac depuis si longtemps.

     

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    style="font-weight: normal;">TETES DE PORCS

    MOUES DE VEAUX

    Patrick Roy & Luci en Suel

    8 €

    Pierre Mainard éditeur

    14, place Saint-Nicolas 47600 Nérac

     

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    LIVRE DES ESQUISSES 1952-1954

    Jack Kerouac

    Traduction de Lucien Suel

    383 pages, 23 €

    La Table Ronde

     


  • CHARLES FOURIER EN DEUX TEMPS QUATRE MOUVEMENTS

     

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    Les Cahiers Charles Fourier fêtent leurs vingt ans : cent vingt-quatre articles publiés, vingt-et-un documents ayant fait l'objet d'éditions critiques, des centaines de comptes rendus de lecture rédigés. Depuis 1990, la revue de l'Association d'Etudes Fouriéristes ne faiblit pas en besogne. Dans son numéro 20, elle commente notamment La Théorie des quatre mouvements, l'ouvrage premier dans lequel Charles Fourier précise la manière dont l'Attraction Passionnée transformera la société.

    Publiée en 1808 puis en 1841 dans son édition définitive, La Théorie des quatre mouvements vient de reparaître aux Presses du réel dans la collection L'écart absolu, dirigée par Michel Giroud. Il convient de préciser que les Presses du réel sont l'éditeur des Oeuvres complètes de Fourier depuis 1998.

    Une conséquente introduction de Simone Debout-Oleszkiewicz présente le personnage de Charles Fourier , "poète d'un monde fantastique, qui relie la terre aux étoiles" sous l'aspect d'un solitaire vivant d'un métier qu'il méprise pour donner corps à sa vision.

    Obscur destin que celui de Fourier. Selon Simone Debout-Oleszkiewicz, "il est l'envers de la vraie vie qu'il imagina, le négatif des images radieuses d'Harmonie".

    Oeuvre d'une "bizarrerie étudiée", la Théorie des quatre mouvements est une doctrine dans un style nonpareil formé de pièces de couleurs semblables à l'habit d'Arlequin. Une énigme que Jonathan Beecher tente d'élucider dans le numéro 20 des Cahiers Charles Fourier où de puissantes études sont à découvrir portant sur Arthur Young philanthrope fouriériste ou encore sur les rapports ambigus des somnambules magnétiques, des médiums spirites et du fouriérisme au XIXème siècle en France. Charles Fourier est-il la clef du mystère du Chelsea Hotel ? se demande enfin Sherill Tippins.

    Assurément, on célébrera dans vingt ans quatre décennies de Cahiers Charles Fourier.

     

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    CAHIERS CHARLES FOURIER n°20

    144 pages, 15 €

    Thomas Bouchet

    13 rue du Levant 25160 Saint-Point

     

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    THEORIE DES QUATRE MOUVEMENTS

    Charles Fourier

    420 pages, 22 €

    Editions Les Presses du réel

     

  • REMY DE GOURMONT REVIENT ❘ HISTOIRES HETEROCLITES

     

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    Oui, il a tout fait Remy de Gourmont (1858-1915), il a tout essayé. Et d'abord allumer de la mèche à poudre avec Le joujou patriotisme (mars 1891), flèche contre les anthropophages de l'éternelle revanche. Ennemi public de la littérature officielle, cela lui coûta cher d'avoir attaqué le vieux tempérament de la race, d'avoir appelé à la fraternité de l'Allemand, du Berbère, du Finnois, de l'Anglais, du Chinois. Il lui en coûta des décennies de vie underground. Il fut pourtant le maître de futurs maîtres. Blaise Cendrars, par exemple.

    J'observe les rayonnages de mes bibliothèques. Cela me fait une belle tranche, de Physique de l'amour au Latin mystique. Car Remy de Gourmont fut tout et simultanément : poète, conteur et romancier ; biographe, historien, grammatologue ; pamphlétaire, épistolier, anthropologue. Et symboliste. Et animateur sans temps mort du Mercure de France. Ecrivain majeur toujours, comme le rappelle Kléber Haedens dans son Histoire de la littérature française que j'ouvre à la page 287 (Grasset, collection Les Cahiers Rouges) : "Remy de Gourmont a eu droit au titre de maître et de guide. Il reviendra."

    Il revient. Le voici porté aux étoiles par Christian Buat et Mikaël Lugan. Bien entourés par ces chercheurs et prosélytes enamourés, Remy de Gourmont au visage esquinté (lupus tuberculeux) se présente à nous, muni d'histoires rares. Histoires hétéroclites suivi du Destructeur sont de presque inédits. Ils ont paru naguère en revue et en journal. Voici réunis une vingtaine d'écrits du dangereux Remy de Gourmont. Voici l'occasion ou jamais de prendre leçon.

     

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    HISTOIRES HETEROCLITES suivi du DESTRUCTEUR

    Remy de Gourmont

    167 pages, 5 €

    Les Ames d'Atala éditions

    LES AMES D'ATALA LE SITE

     

  • LA SOEUR DE L'ANGE EMPOIGNE LA CRISE

     

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    Depuis 2004 qu'elle existe, La Soeur de l'Ange ("L'homme est le vainqueur des chimères, la nouveauté de demain, la régularité dont gémit le chaos, le sujet de la conciliation. Il juge toutes choses. Il n'est pas imbécile. Il n'est pas ver de terre. C'est le dépositaire du vrai, l'amas de certitude, la gloire, non le rebut de l'univers. S'il s'abaisse, je le vante. S'il se vante, je le vante davantage. Je le concilie. Il parvient à comprendre qu'il est la soeur de l'ange", Isidore Ducasse) a publié sept épais numéros d'abord aux éditions A contrario puis aux éditions du Grand Souffle. A présent, elle vit chez Hermann (Editeurs des sciences et des arts depuis 1876) sous la direction de Michel Host (Prix Goncourt 1986 pour Valet de nuit) et la rédaction en chef de Jean-Luc Moreau (théoricien de La Nouvelle Fiction, auteur de plusieurs ouvrages sur Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir et Albert Camus). La Soeur de l'Ange est une revue littéraire et philosophique ouverte au questionnement socratique, à la maïeutique généralisée.

    Sa particularité est de lancer des questions comme on allume des feux : A quoi bon l'art ?, A quoi bon la nation ?, A quoi bon résister ?, A quoi bon la Lune ?... Une méthode pleine de sens en un temps où la réflexion bat de l'aile, où rien ne semble brûlant.

    Vient de paraître A quoi bon la crise ? sur une dédicace d'Edmund Husserl et une ouverture de Senancour. La crise dans tous ses états et d'abord à la lettre, étymologiquement, sémantiquement, est ici dépliée. Pour Ado Huygens, la crise est un ouvreur potentiel de l'exister. Sandy Proust interroge la crise de la parole dans le monde du travail. Philippe Brenot envisage que la crise, c'est toujours avant. Monique Castaignède annonce une crise de tête. Nicolas Lebeau décide d'entreprendre en poésie pour répondre à la crise. La crise ne serait-elle pas le travestissement moral de la décadence ? demande François Cornée.

    Où il est également question de Joë Bousquet, d'Albert Béguin (crise du romantisme oblige), de Sarane Alexandrian et d'Arthur Conan Doyle.

    D'ici quelques semaines, Jean-Luc Moreau répondra à mes questions afin que La Soeur de l'Ange ne soit plus un mystère pour personne.

     

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    Jean-Luc Moreau


     

    En attendant, apprenez que les intitulés des prochains numéros sont :

    A quoi bon la Princesse de Clèves ?

    A quoi bon la santé ?

    A quoi bon tant de monde ?

    A quoi bon partager ?

     

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    Michel Host

     

    LA SOEUR DE L'ANGE n°7

    Pensées iniques

    Revue semestrielle

    200 pages, 20 €

    (Abonnement pour deux numéros : 36 €)

    Editions Hermann

    6, rue de la Sorbonne 75005 Paris