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littérature - Page 14

  • CLAUDE TARNAUD

    Cher Guy Darol,
    C’est par hasard que nous avons découvert il y a peu de temps qu’en août et novembre de l’année dernière il y a eu une discussion sur Claude Tarnaud sur votre site.
    Pour tous ceux qui s’intéressent à Claude Tarnaud nous avons créé avec l’aide de Michael Kopp un petit site sur Internet sous l’adresse
    Vous y  trouverez des informations sur la vie et l’œuvre de Claude Tarnaud.
    En plus un deuxième site a été créé :
    pour le groupe Postscriptum qui a publié en 2002 sous la conduite de François Di Dio des dossiers sur Jean-Pierre Duprey, Stanislas Rodanski, Claude Tarnaud et une anthologie sur Claude Pélieu.
    Gibbsy (Henriette de Champrel), Sylvie et Pierrille Tarnaud
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    Claude Tarnaud

     

  • LA SOEUR DE L'ANGE ❘ RESISTANCE ❘ JEAN-LUC MOREAU

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    En ces temps régressifs où l'Homme est invité à se diluer dans la valeur Travail, La Soeur de l'Ange, revue dirigée par Didier Bazy, se demande : "A quoi bon résister ?" Les réponses à cette question cruciale proviennent de différents sursauts face "à tout ce qui pue la mort". L'éditorial  agite bien justement "l'impératif catégorique de notre époque conditionnée par les contrôles puissants et insensibles de l'instrumentalisation généralisée où l'argent comme réponse à tous les problèmes tient une part de moins en moins négligeable." Selon Didier Bazy, l'état d'urgence coïncide avec la nécessité de "devenir un vivant sauvage." Sauvage, c'est-à-dire en résistance armée de mots, en dépit du risque, de l'incertitude, de l'aléatoire.

    Entretiens, épîtres, études, philippiques et même une fiction de Jean-Luc Moreau plus qu'éclairante composent un élan de front et une véritable mise en garde contre les menaces de néant voire d'apocalypse si l'on en croit Jean-Louis Cloët dont le propos très vigoureux annonce le meilleur du pire. Des figures considérables sont appelées à définir le besoin de résistance sinon la fin de partie : Antonio Negri, Samuel Beckett, Antonin Artaud, Paolo Virno, William Shakespeare, Henry David Thoreau, Friedrich Nietzsche, Georges Henein ...

    Par ailleurs, cette livraison pose la question des pouvoirs de la poésie dans un monde en crise (et l'on songe à l'interpellation d'Hölderlin : "Wozu dichter in durftiger zeit/Pourquoi des poètes dans un temps de manque ?") à travers l'oeuvre de René Depestre.

    La Soeur de l'Ange poursuit ici son exploration du Grand Jeu (Roger-Gilbert Lecomte, René Daumal, Roger Vailland, Pierre Minet, Josef Sima, Artür Harfaux, Maurice Henry, Hendrik Cramer, André Rolland de Renéville, Pierre Audard, André Delons, Monny de Boully, Zdenko Reich, Roger Caillois) avec des contributions de Claude Fournet et d'Alain Jugnon. Signalons que Le Grand Souffle éditeur de cette revue a eu l'excellente idée de publier récemment deux livres inévitables d'André Rolland de Renéville (Rimbaud le Voyant et L'expérience poétique ou le feu secret du langage) et l'essai de Michel Random, Le Grand Jeu, les enfants de Rimbaud le Voyant.

    Pour finir, ce remarquable volume de réflexions intempestives livre un texte du compositeur et guitariste Richard Pinhas (extrait des Larmes de Nietzsche, Deleuze et la musique, Flammarion, 2001) faisant l'apologie du plan de vie et du plan de composition ainsi qu'une lettre d'Armand Robin parue dans Le Libertaire du 29 novembre 1946 au sujet du Comité d'Epuration pour les Lettres. Comme on peut l'espérer de l'auteur de Le temps qu'il fait (l'une des plus belles fictions de tous les temps), il prend à la gorge les "poétereaux bourgeois" :

    " Ils m'ont banni de leur compagnie, que je fuyais ; ils m'ont exclu du monde de la vanité et des intérêts, ce que justement je cherchais ; ils m'ont désigné au mépris et aux railleries de ceux qui se mettent du côté des puissants, ce que justement je désirais. Ils ont eu raison : venant des travailleurs et m'obstinant malgré les réactionnaires "communistes" à vivre parmi les travailleurs, refusant de faire le beau dans les salons, les cafés littéraires, les antichambres où il est de bon ton qu'un écrivain soit lâche, j'ai osé, scandale des scandales, être poète ! "

    Saluons galure bas ce numéro très chaud et Jean-Luc Moreau (merci docteur Zeugme !) pour les lumières qu'il apporte sur Charles Nodier (un pionnier de la Nouvelle Fiction !) dans sa préface à La Fée aux miettes, ouvrage sur lequel je reviendrai prochainement.

    La Soeur de l'Ange n°5

    Dossier A quoi bon résister ?

    Editions Le Grand Souffle

    www.legrandsouffle.com

    http://revuelasoeurdelange.hautetfort.com/


    La Fée aux miettes

    Charles Nodier

    Avant-propos, postface et notes de Jean-Luc Moreau

    Editions Michel de Maule

    41, rue de Richelieu

    75001 Paris

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  • L'EPOPEE RODANSKI

    "Mon départ s'appelle toujours, tous les jours et tous les instants du grand jour."

    Stanislas Rodanski

    Il est une aventure qui place l'ailleurs hors de toute mappemonde. Elle se situe loin des cartes recensées et dans un temps évanescent. Ses héros sont sans courage pour le monde actuel. Personnages de passage, sans identité fixe, ils recherchent l'inconnu, la terra incognita enfouie dans leur millénaire mémoire. L'action qui les remue a le mobile des quêtes de Jason ou de Lancelot. Et pourtant, ils ne paraissent pas s'agiter. On ne les voit jamais courir. Jamais ils ne sont à l'affût d'une nef ou d'un cheval. Ils sont simplement immobiles. Les traits creusés, le cheveu en broussaille, la peau étrangement hâlée, ils ont la mine du voyageur. Leur silence est rude. Il les défend contre les curieux. Ce type d'aventurier a le regard de l'éclair. Il perce les corps et les murs.

    Stanislas Rodanski fut ce héros sans foi envers le maintenant et l'ici. Ecrivain d'une vie dépourvue d'épique, il s'inventa des rôles de Tristan, de Lancelot. Préférant la fiction au réel, il s'incarna en êtres de celluloïd pour affronter tous les dangers. A Honolulu, il est un pilote suicide chargé de livrer à un agent deux tonnes de gaz torture en boîtes de conserve. Sur un atoll, il couvre Rita Hayworth de baisers-cinéma. Il fume des cigarettes de séries B avec la moue du gigolo. Une fois sa mission achevée, il abandonne dédaigneusement son costume de mahousse. Surgissent alors de nouveaux décors, des architectures gênantes comme Shangri-là, la citadelle infinie aperçue dans un souvenir. Il croit en des images qui préexistent à l'existence. Il se rappelle avoir vécu à Shangri-là, auprès d'une éternelle jeunesse. A présent, il a le sentiment aigu, térébrant, d'être appelé vers elle, la ville disparue, la ville des horizons perdus où réside l'Hamour avec un grand H.

    Ses yeux sont comme des pistolets braqués sur l'horizon chimérique. "Y aller, pense-t-il, est une illusion." Il sait cependant qu'elle est tangiblement, tout de même que sont les fabuleuses civilisations du Timée de Platon. En une autre époque il y fut. Il s'en rappelle la rutilance.

    Loin derrière le voile, demeure l'Absolu, la Cité du Bonheur. Le temps, là-bas, est aboli. Ce qui dure est l'amour. A Shangri-là, il habite chaque geste. Stanislas Rodanski signe Lancelo. En esprit, il pénètre jusqu'aux confins de l'Autre Monde. Il a des aventures prophétiques. Dans cet univers où l'impossible peut survenir à tout moment, il a la vision de l'originaire. Il dit : "L'être a les rêves de ses origines s'il en est." Il dit : "Je vais de siècle en millénaire." Il dit que l'Inde est sa seule naissance et que c'est le pays du karma.

    Stanislas Rodanski consultait volontiers le valet de trèfle, sa carte d'avenir ; il contemplait l'horizon à la recherche du Point Secret, spectre du monde possible, celui que Théodore sondait dans la Théodicée de Leibniz. Dans cette quête errante d'un ailleurs, l'esprit de Stan a basculé. Le "romancero d'espionnage" en proie aux illusions de la Mâyâ "a cessé de jouer le rôle de sa vie". Il a tombé le cinémasque et s'est enveloppé de silence. L'épopée Rodanski se fige dans un hôpital psychiatrique.

    Né en 1927, Stanislas Glucksmann, "envoûté par l'image d'une personne existant par-delà la séparation", se fait appeler Rodanski puis Lancelo. Avec Sarane Alexandrian, Henri Heisler, Véra Hérold, Claude Tarnaud, il fonde la revue Néon (N'être rien Etre tout Ouvrir l'être Néant). Il est adoubé par André Breton puis exclu du groupe pour travail fractionnel. Il dit vouloir découvrir l'Indochine et s'engage dans l'armée. Un jour, il se présente en habit de para chez  Jacques Hérold. Devant la grimace du peintre, il jette l'uniforme à la rue. Stan envisage alors de faire le tour du monde en qualité de soutier. En 1952, dans une lettre à Claude Tarnaud, il propose de créer le club (très select) des Ratés de l'Aventure. Il écrit : "C'est beau comme une image la vie d'un desperado." En 1954, il se tait. Il entre volontairement à l'hôpital Saint-Jean-de-Dieu de Lyon, le "monde intermédiaire" qu'il ne quittera plus. Vingt-sept ans plus tard il meurt, il prend la fuite.

    L'oeuvre de Rodanski, arrachée à son indifférence, comprend peu de volumes. Passée sous un quasi-silence, elle connaît avec la publication de La Victoire à l'ombre des ailes, préfacée par Julien Gracq, un bref instant de gloire. On voudrait partager le goût de cette littérature sans majuscules qui fut une "expérience poétique" au sens où l'écriture est un brûlage et une renaissance. Comme Antonin Artaud, Stanislas Rodanski a parcouru la "géométrie sans espaces" et il est allé jusqu'au plus loin. Refusant toute limite, il a traversé les décors miragineux qui maintiennent l'homme dans sa gangue de certitudes. Ses livres sont une flèche qui mène "au creux de la mystérieuse aventure". Guy Darol

     

    in Roman, revue trimestrielle, n°22, mars 1988

     

  • STANISLAS RODANSKI ❘ L'AVENTURE INTERIEURE

    Rebelle dopé au stupéfiant pureté, Stanislas Rodanski (1927-1981) se défendait de publier. Ses productions (lettres-fleuve, nouvelles, poésies, fragments, bribes...) destinées aux amis (Alain Jouffroy, Claude Tarnaud, Julien Gracq), ont fini par sortir du petit cercle qu'elles n'auraient jamais dû quitter. Ce délit d'initiés plus ou moins pratiqué avec la complicité de l'auteur ne déchaînera pas la vindicte. La Victoire à l'ombre des ailes, livre paru aux éditions du Soleil Noir (l'enseigne de François Di Dio), connut une réédition chez Christian Bourgois en 1989. Mais un mur de silence semble s'être refermé autour de cet actionniste du rêve.

    Individu fréquentatif, selon sa propre définition, Rodanski semble d'un abord flou. Julien Gracq qui le rencontre à Montparnasse alors qu'il habite impasse de l'Enfant-Jésus évoque une distanciation atone. Il étonne autant par le vague qui est son état, où il cherche à s'atteindre.

    "Je vois mon âme en cette absence. Loin."

    Il paraît ne s'être jamais raccommodé à la réalité rugueuse suite à un film vu avec ses parents, Lost Horizon de Frank Capra. Ce film qui montre l'échouage d'un avion sur les sommets himalayens, décrit la rencontre des survivants avec Shangri-là, la ville des horizons perdus, surgie au coeur de la montagne. Effet de choc, Shangri-là revient à la mémoire de Rodanski comme "la cité sans fin" où il a vécu autrefois. Depuis cet instant, Stan, ainsi que le surnomment ses amis, a la conviction de souvenirs qui préexistent à l'existence. Il relate cette expérience de descente au fond de sa propre histoire millénaire dans un long poème justement nommé Horizon perdu.

    Il n'est pas pour Rodanski de meilleur interlocuteur que Jacques Vaché à qui il s'identifie. Même goût du jeu, de l'aventure dangereuse, de l'humour sans h qui est d'après l'auteur des Lettres de guerre, "un sens de l'inutilité théâtrale (et sans joie) de tout." Humour, pureté, révolte se comprennent par analogie. Dans la Lettre au Soleil Noir adressée à François Di Dio en réponse à une enquête sur La Révolte en question, Rodanski écrit : "Le révolté, toujours disponible pour la résolution des problèmes humains, généreux mais rigoureux, réaliste que rien de ce qui vaut ne rebute, lucide jusqu'à l'exemple, le révolté trouve dans l'humour, néanmoins, sa valeur d'élection. Comme la révolte, dont elle est le sort, dans la minorité opprimée, l'humour est le salut." Son mot d'ordre, mais plutôt de désordre, d'insurrection, est inscrit en lettres capitales dans cette épître jointe à La Victoire à l'ombre des ailes (Christian Bourgois éditeur) : "umore, précieux, ubique." L'ubiquité pour quelqu'un qui a, comme lui, accès à ses plusieurs vies antérieures prend les noms de Lancelo (orthographié sans t) et de Tristan. Rodanski est par ailleurs le pseudonyme de Glucksmann.

    L'homme qui se fait appeler Stan refuse résolument de se placer dans une trajectoire littéraire. Sa vie est d'aller vers l'action, de confronter le risque. Il envisage de faire le tour du monde en qualité de soutier sur un paquebot. Il revêt même l'habit de parachutiste. Mais l'aventurier demeure un velléitaire qui se revendique finalement du double titre de "guérillero de l'amour" et de "romancero d'espionnage". En octobre 1953, il adresse à Claude Tarnaud ces mots amers : "En effet, j'ai raté ma vie. Né pour l'action, je m'ennuie à mourir des suites de mon expérience poétique. Tout ce qui m'est arrivé de risqué, les dangers (bombardements, parachutisme) a l'irréalité du songe."

    Le songe à quoi Rodanski semble spécialement disposé prend la forme d'un récit fantasmatiquement autobiographique, La Victoire à l'ombre des ailes, loufoque histoire d'une livraison à un agent secret, sur un atoll du Pacifique, de deux tonnes de gaz torture par une escadrille de desperados. Le récit, comme un tour de voltige, pique sur un bar où se réunissent "les enfants terribles, les casse-cous, les coeurs brisés, les ratés de l'aventure, les pilotes perdus", et une petite assemblée d'éclopés. C'est dans ce caboulot d'escadrille, en pleine mer de corail, que le narrateur a la vision fatale d'une femme prénommée Rita, Hayworth devine-t-on, qui connaît la magie des baisers-cinéma et le programme des caresses d'évasion. Eclaboussée de couleurs pétard qui évoquent les peintures de Malaval, de Sam Francis, montée comme un cut-up sentimental, un roman-photo de désespoir, La Victoire à l'ombre des ailes mérite qu'on lui reconnaisse sa place, inégalable, parce qu'on ne peut lui trouver que des comparaisons extrinsèques : picturales, cinématographiques (Nicholas Ray, Joseph Lewis, Wim Wenders, Jean-Luc Godard) et musicales (Tom Waits, Albert Ayler, Captain Beefheart, Daniel Johnston).

    La trajectoire de Rodanski, ponctuée par le surréalisme dont il fut exclu en 1948 pour travail fractionnel et la création de la revue NEON (N'être rien Etre tout Ouvrir l'être Néant) qu'il fonda avec Sarane Alexandrian, Henri Heisler, Véra Hérold, Claude Tarnaud, sera une première fois stoppée par un internement volontaire à l'âge de vingt-sept ans, à la Maison de Santé Saint-Jean-de-Dieu à Lyon, avant de s'arrêter définitivement, vingt-sept ans plus tard, à cette toute fin de tout dont ne saura jamais avec Stan si elle équivaut à une fin ou à un commencement. Guy Darol

     

     

  • LE NOUVEL ATTILA ❘ 5 A 7

     

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    Le Nouvel Attila plante son soc dans la terre des littératures méconnues. Un numéro qui rend hommage aux noms d'André Baillon, de Germaine Beaumont, de Claude Silve, de Friedrich Karinthy, de Leopoldo Lugones, de Jacques Abeille, de Paul Wens, de L'Arétin, de Théophile de Viau, de Pierre-Corneille Blessebois, de Pierre Louÿs, de Maurice Fourré, de Maurice Pons, de Marcel Mariën, de Guy Cabanel, d'Annie Le Brun, de Michel Bernard ou encore de Topor ne saurait être ignoré.

    LE NOUVEL ATTILA

    127, avenue Parmentier

    75011 Paris

    www.lenouvelattila.net

    CRITIQUE
    André Baillon : les habits neufs de l’auteur
    Foin de Paris, d’après Fierre Fachet
    De Germaine Beaumont et de ses protégées (Irène Monesi & Claude Silve)
    Liste noire des livres épuisés
    Frygies Karinthy / Geda Csath : Hongrois rêver !
    Mike Watson dans le souterrain

    CREATIQUE
    Les mystères de Marseille : “D’une ville, d’une pièce”, de Guillaume Fayard,
    Un inédit de Leopoldo Lugones : « Un fenomeno inexplicable »
    « Maria Sombrano », le secret le mieux gardé de la littérature sud-américaine, par Jérôme Lafargue
    Eric Chevillard, le petit tâcheron rouge

    TRAFIC
    DOSSIER : “Jacques Abeille et ses ombres”.
    (Dans les arcanes / Interview / La société secrète / Les amours chiennes de Léo Barthe / “L’Oncle Léo”, fragment inédit des Voyages du fils)
    Deleatur: livres et ratures
    Le virus insulaire : James Joyce, Yumenu Kyusaku, José Lezama Lima Paul Wenz (1869-1937), par Hubert Haddad

    Supplément triple sexe (16 pages, 16 dessinateurs) :
    L’Arétin, Viau, Pierre-Corneille Blessebois, Charles Collé, Jean-Paul Richter et les textes à queue, Louÿs lecteur, Maurice Fourré, Maurice Pons, Guy Cabanel, Annie le Brun, Anne Marbrun, Michel Bernard (le château de scène), Mariën exégète pornographe, Roland Topor, La Brigandine (ou quand Vaneigem renie ses propres textes)...

     

  • CYRILLE FLEISCHMAN

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    Cyrille Fleischman

    C'est une faim insatiable. Dès qu'une image reparaît, celle d'une rue, d'une façade, d'un ancien cinéma, mon coeur s'amollit. Autrefois devient aujourd'hui. Dès qu'un livre annonce la couleur fuligineuse, promet de faire revivre Paris au temps de ses pavés, le passé se nomme présent. Chaque ouvrage de Cyrille Fleischman est une assurance pour la revie, un tour de magie qui rend visible les silhouettes à chapeau, groupées dans le square de la Place des Vosges, assemblées par un jeu de cartes. Quand vient un récit de Henri Raczymow, c'est la rue du Pressoir (vingtième arrondissement) qui ouvre ses fenêtres. D'où sortent des oiseaux ou si vous préférez des notes de musique klezmer. La rue du Pressoir fut la vigne dans laquelle je jouais jusqu'à mes six ans. Quant à la Place des Vosges, ceux qui ont lu mes Héros de Papier se rappellent qu'elle était la cour de récréation pour les écoliers de la rue de Béarn. Prenons Riverains rêveurs du métro Bastille, le onzième ouvrage de Cyrille Fleischman. C'est un recueil de quatorze nouvelles. D'emblée, il est question du cinéma Saint-Paul et quelques pages plus loin du Lux-Bastille, le cinéma Paramount situé au 2 de la Place, là où s'élève désormais l'Opéra qui s'autodétruit. Je n'ai trouvé aucune image de cette salle à façade crème et rouge sang, pas une carte postale, aucun effluve sur Google. Il faut pour aller y faire un tour appuyer sur la touche pause de votre zappeuse lorsque vous regardez Zazie dans le métro de Louis Malle. Quand Zazie tourne autour de la vieille bouche de métro située au-dessus du canal découvert, on aperçoit  distinctement le Lux-Bastille. On en voit l'allure fière, pimpante et il nous revient des souvenirs de films de Jean-Pierre Melville, de Robert Enrico, ceux qu'on allait voir avec papa-maman, le dimanche. Cela durait toute une après-midi. On entrait, le soleil luisait, zénithal. Tu sortais, il faisait nuit comme au fond d'un bois. Cyrille Fleischman fait revivre des souvenirs  d'enfance ashkénaze, il fait tinter des paroles perdues, des formules que l'on croyait ne plus jamais entendre. C'est un prestidigitateur. Je retrouve, grâce à lui, la forme de mes rues, un certain silence agité de frôlements. La rue de Birague est conforme à ma papeterie bleue, écaillée. La papetière y vend des cahiers, des illustrés (Kit Carson, Tartine...) et les derniers modèles Dinky Toys. La papetière porte une blouse bleue et des pantoufles assorties. Elle est douce. Cette douceur justement, Cyrille Fleischman sait en rendre le parfum. Riverains rêveurs du métro Bastille est une réjouissante insurrection contre la submersion d'un temps où un spectateur en colère disait d'une salle où il venait de se faire arnaquer qu'elle "valait zéro question bon cinéma." Guy Darol


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    Riverains rêveurs du métro Bastille

    Cyrille Fleischman

    156 pages, 15 euros

    Le Dilettante éditeur

    Parution le 4 mai 2007

    www.ledilettante.com

     

     

  • DJ SPOOKY ❘ REBIRTH OF A NATION

     

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    DJ Spooky That Subliminal Kid est un faramineux cador. Je ne conseillerai jamais assez la lecture de son Rhythm Science dans lequel ce générateur de musique des permutations met en relation déconstruction selon Jacques Derrida et platinisme.

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    Pour DJ Spooky, la soniture est un champ d'étude sous-exploré. Le DJ qui écrivit autrefois une thèse sur Feuerbach affirme sans barguigner que les textes de Nietzsche sont soniques. La lecture de ce manifesto doit suivre impérativement l'écoute du CD éponyme, un "gangsta dreamtime remix" où l'on peut entendre les voix d'Antonin Artaud, Gertrude Stein, Kurt Schwitters, Tristan Tzara, William S. Burroughs (That Subliminal Kid étant un emprunt à Nova Express), Guillaume Apollinaire, Gilles Deleuze...

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    Au fil de son manifesto, DJ Spooky cite avec intelligence Dziga Vertov, Oscar Michaux, Sergei Einseinstein, Oskar Fischinger, Man Ray et Griffith ("l'homme qui inventa Hollywood"), parce que dans le Dj-ing, "l'enchaînement des séquences et une narration et le mix, une cinématique". Depuis quelques années le "multimedia storyteller and social critic" travaille The Birth Of A Nation (1915) et cela donne Rebirth Of A Nation, un film qui sera diffusé les 4 et 5 mai prochains dans le cadre du Tribeca Film Festival de New York.

    Fort heureusement, le film, accompagné d'un précieux documentaire, sera bientôt disponible en DVD, dans une édition Starz Media. Nous y reviendrons.

    www.tribecafilmfestival.org
    www.djspooky.com
    www.rebirthofanation.com
    www.rhythmscience.com

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  • MISE A MORT DE LA LITTERATURE ANCIENNE

    Communiqué de la Maison des écrivains


    Dans le journal gratuit "20 minutes" du 16 avril, figure une interview de
    Nicolas Sarkozy. Entre autres sujets, il y parle de l'université et prend
    pour exemple de filière inutile, et qui ne devrait plus être  prise en
    charge par les fonds publics, l'enseignement de la "littérature ancienne" :

    "Vous vous fixez comme objectif de ne laisser aucun enfant sortir du
    système scolaire sans qualifications. Comment comptez-vous parvenir à cet
    objectif ?

    Par exemple dans les universités, chacun choisira sa filière,
    mais l'Etat n'est pas obligé de financer les filières qui conduisent au
    chômage. L'Etat financera davantage de places dans les filières qui
    proposent des emplois, que dans des filières où on a 5000 étudiants pour 250
    places.

    Si je veux faire littérature ancienne, je devrais financer mes études ?

    Vous avez le droit de faire littérature ancienne, mais le contribuable n'a pas
    forcément à payer vos études de littérature ancienne si au bout il y a 1000
    étudiants pour deux places. Les universités auront davantage d'argent pour
    créer des filières dans l'informatique, dans les mathématiques, dans les
    sciences économiques. Le plaisir de la connaissance est formidable mais
    l'Etat doit se préoccuper d'abord de la réussite professionnelle des jeunes
    ."

    www.20minutes.fr/article/151848/20070416-France-Le-Pen-ne-m-interesse-pas-son-electorat-si.php


    Ne prenons pas à la légère ces déclarations du candidat de l'UMP. Pour lui,
    l'Etat n'a pas à assumer le prix de la culture.

    Son jugement sur le « plaisir de la connaissance », opposé à l'utilité ou à
    la rentabilité érigées en principe politique, manifeste une ignorance et un
    mépris dangereux qui menacent le socle de toute société démocratique. Il
    avertit les artistes et les penseurs, nous écrivains, en particulier, du
    sort qu'il réserve à la culture, la littérature au premier chef, et à leur
    transmission par l'Education nationale

    Tous les chefs d'Etat, jusqu'ici : Charles de Gaulle, Georges Pompidou,
    François Mitterrand comme Jacques Chirac ont, chacun à leur manière, exprimé
    leur attachement à l'héritage intellectuel et artistique qui fonde
    l'identité française. Ils ont écrit, se sont revendiqués de la poésie, du
    roman, de l'art.

    Dans le contexte déjà alarmant que dénonce notre Appel Filières littéraires,
    une mort annoncée ? La gravité de cette déclaration ne peut nous laisser
    d'illusions. Elle engage la communauté littéraire et éducative à se
    mobiliser.

  • MATTHEW SHIPP ❘ JEAN GENET

    De passage à Paris, voici sept ans, le pianiste nitescent Matthew Shipp est confronté à une photographie de Rajak Ohanian. Il s'agit de Jean Genet, l'auteur de Notre-Dame des Fleurs. Un livre-flèche lu à 19 ans. Avec Sabir Mateen, William Parker, Gerard Cleaver et le comédien (grand lecteur de Pasolini et plus récemment d'Attila Jozsef) Denis Lavant, Matthew Shipp rend hommage à l'écrivain engagé dans le combat auprès des Black Panthers. Ce magnifique opus est accompagné d'un livret instructif proposant un entretien avec le pianiste né en 1960 et une savante étude d'Alexandre Pierrepont. Un livre-disque à découvrir pour en apprendre sur les alliances réussies entre le jazz, la littérature et la politique.

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    Label ROGUEART

    Declared Enemy :
    Matthew Shipp (piano)
    Sabir Mateen (clarinettes, flûte, alto saxophone)
    William Parker (contrebasse)
    Gerald Cleaver (batterie)
    Denis Lavant (lecture des textes de Jean Genet)
    Textes de Jean Genet, musique de Matthew Shipp
    Livret original comprenant :
    La copie d’un manuscrit inédit de Jean Genet et la copie d’un extrait d’un autre manuscrit,
    Un texte original d’Angela Davis,
    L’interview de Matthew Shipp par Steve Dalachinsky
    Un texte original d’Alexandre Pierrepont
    Photo de Jean Genet : Rajak Ohanian
    Photos de
    Declared Enemy : Lorna Lentini
  • PERPETUITE DE L'ESCLAVAGE ❘ JACQUES STERNBERG

     

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    "Il paraît, l'histoire du moins le prétend, que l'esclavage a été aboli sur terre. Ah oui ? Quand cela ? Et sur quoi se base-t-on pour affirmer cela ? Que sont ces millions d'employés, de salariés, d'ouvriers condamnés aux travaux forcés à bas prix, aux réponses forcées, au silence forcé, au zèle à perpétuité, à la réclusion à perpétuité, sinon des esclaves ? Mais l'homme a confiance en ses maîtres, en ses livres. On lui a dit que l'esclavage n'a plus cours, il le croit. Il en est fier. Il ne lui viendrait même pas à l'esprit qu'on l'a dupé. Sa naïveté est aussi tenace que sa passivité."

    Jacques Sternberg

    Lettre ouverte aux Terriens

    Editions Albin Michel, 1974